Aymeric Caron contre Natacha Polony : quand les chiffres (arrangés et approximatifs) de la délinquance cachent la montée d'une violence gratuite et barbare<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Tribunes
Les "incivilités" n'ont pas droit de cité dans les statistiques officielles de la délinquance.
Les "incivilités" n'ont pas droit de cité dans les statistiques officielles de la délinquance.
©Reuters

Des mensonges qui font mal

Ce qui se passe, ce qui se vit, ce qui se subit en France n'est pas réductible à des formules mathématiques. Celles-ci mentent par sécheresse de cœur.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

Voir la bio »

C'était dans le train entre Évreux et Paris à l’arrêt Mantes-la-Jolie. Une toute jeune fille se tenait avec sa valise près de la portière. Deux grands gaillards en survêtement ont surgi et l'ont serré de très prés. "Ah, tu descends là ? Tu vas pouvoir nous sucer salope !" a dit l'un d'eux avec l’extrême élégance qui caractérise le parler en vigueur dans certains coins de nos villes.

Les deux troubadours sont descendus et sont restés plantés sur le quai – terrain conquis – à l'attendre. La fille a éclaté en sanglots. Et terrorisée elle a continué avec nous jusqu'à Paris. Nous avons essayé de la consoler : nous ne l'avons pas rassuré. A Paris elle a appelé ses parents pour qu'ils viennent la chercher. Elle habite Mantes-la-Jolie. Elle va sans doute continuer à y résider. Avec la peur au ventre pour toujours.

Ce n'est même pas un fait divers. Dans le langage aseptisé des statisticiens et des sociologues cela s'appelle "une incivilité". Et les "incivilités" n'ont pas droit de cité dans les statistiques officielles de la délinquance. Marc Bloch, le fondateur de l’École des Annales, disait que les historiens doivent s'intéresser "à la chair humaine". Aucun chiffre sur les homicides, vols, vols avec violence, violence aux personnes etc... (catégorie classifiée et classifiable) ne rend compte de la "chair humaine".

>> Lire également Chiffres de l'insécurité : le désastre dont personne ne voulait vraiment parler

L’histoire de la jeune fille de Mantes-la-Jolie date d'il y a quelques semaines. Elle m'est revenue avec une cruelle évidence alors que je regardais un débat entre Aymeric Caron et Natacha Polony. L'émission aurait pu s'appeler "Des chiffres et des lettres"... D'un coté les chiffres (Caron), de l'autre les lettres (Polony). Le premier avait des petits bouts de papier d’où il tirait la conclusion, non discutable, que la délinquance n'augmentait pas en France et qu’il fallait être nazi ou au mieux fasciste pour la lier à l'immigration. On le sentait brûlant d'envie de dire que c'était pire à l’époque de l'homme des cavernes et que la Cour des Miracles, si bien racontée par Victor Hugo dans "Notre Dame De Paris", était peuplée de Français de souche...

Natacha Polony parlait, elle, du ressenti. De ce que les gens éprouvaient et pensaient. Elle était dans la vérité. Bien plus que Caron avec ses chiffres, choisis, arrangés et approximatifs. Et le pitre hargneux (je ne trouve pas d'autres mots pour le qualifier), un peu hargneux, restait scotché à ses pourcentages vides de toute humanité et pour cette raison parfaitement mensongers. Et avec morgue il lançait l'accusation habituelle : c'était la droite et l’extrême droite qui instrumentalisaient telle ou telle agression pour faire monter la xénophobie et l’islamophobie. Je suppose que si on avait évoqué devant lui l'histoire de la jeune fille du train Évreux-Paris il aurait rétorqué qu'on allait quand même pas faire un plat pour une banale et innocente tentative de drague....

Aymeric Caron n'est pas grand chose. Certes il passe à la télé. Ce qui lui permet de se livrer à d’impudiques exhibitions de son politiquement abject. En réalité il n'est que le clone caricatural et boursouflé de tous ceux – très influents – qui déversent des tombereaux d'eau bénite sur une réalité puante dans l'espoir de lui donner une odeur de sainteté. Tout sera donc tu (qui agresse ?), dissimulé voire justifié (chômage...).

Ce mensonge là a des effets dévastateurs. Quand on cache les choses et les noms la perception (le ressenti) qu'en ont les gens transforme une vague en tsunami. Tous les Arabes, tous les Noirs deviennent alors des délinquants, des voleurs, des violeurs, des trafiquants. Il y a en a bien sûr mais pas tous, loin de là, sans doute un peu plus de délinquants violents à Stains qu'a Saint-Malo.

Les misérables petits chiffres de Caron et consort ne disent rien qui soit vrai et surtout ils cachent une métamorphose inquiétante et terrifiante. La délinquance n'augmente peut-être pas mais la violence, elle, monte de façon exponentielle. Consultez pour vous en convaincre le rapport de l'Observatoire national de la délinquance. La dernière étude de cet organisme note une grave augmentation des agressions contre les pompiers, les guichetiers et les médecins. Ce n'est quand même pas pour les voler ou les dépouiller.

Aucune – je dis bien aucune – cause sociale, ni celles qu'on avance communément, ne peut expliquer ce désir de faire mal, de frapper et d’insulter. Cette violence est gratuite et n'a qu'un seul but: faire peur et humilier. Elle obéit à une volonté de conquête de territoire. D'abord celui de la cage d’escalier, puis celui de la cité, puis celui de la ville, puis celui... Aymeric Caron est incapable de comprendre ça. La jeune fille du train Evreux-Paris si.

Et n'oubliez pas : le A-book de Benoît Rayski, Le gauchisme, cette maladie sénile du communisme, est toujours disponible à la vente sur Atlantico éditions : 

Le gauchisme, cette maladie sénile du communisme

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !