Et à part les élus en délicatesse avec le fisc, l’enfer fiscal français ça intéresse quelqu’un ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La Haute autorité pour la transparence de la vie publique vient de saisir le parquet concernant trois parlementaires UMP qui auraient omis "des avoirs détenus à l'étranger" dans leur déclaration de patrimoine.
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique vient de saisir le parquet concernant trois parlementaires UMP qui auraient omis "des avoirs détenus à l'étranger" dans leur déclaration de patrimoine.
©DR

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Les députés UMP Bernard Brochand et Lucien Degauchy, ainsi que le sénateur Bruno Sido (UMP également), ont omis de mentionner dans leur déclaration de patrimoine la détention d'un compte en Suisse. En septembre, Atlantico révélait déjà que des dizaines de parlementaires avaient maille à partir avec le fisc.

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier

Maître Thomas Carbonnier est Avocat et coordinateur pédagogique du DU Créer et Développer son activité ou sa start-up en santé au sein de l’Université Paris Cité (issue de la fusion Paris 5 et Paris 7). Il est titulaire du Master 2 droit fiscal, du Master 2 droit financier et du D.E.S. immobilier d’entreprise de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne.

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Lire également : Au-delà du cas Thévenoud, petites confidences sur les dizaines de parlementaires en délicatesse avec le fisc

Atlantico : La Haute autorité pour la transparence de la vie publique vient de saisir le parquet concernant trois parlementaires UMP qui auraient omis "des avoirs détenus à l'étranger" dans leur déclaration de patrimoine. Au mois de septembre déjà, Atlantico révélait que des dizaines de parlementaires étaient en délicatesse avec le fisc. Dans un tel contexte, comment se fait-il que personne ne suggère une réforme de la fiscalité ? 

Thomas Carbonnier : Les réformes fiscales, en France, sont plus motivées par une idéologie que par un souci d’efficacité. En effet, les pistes de réformes ne manquent pas et sont bien connues de Bercy.

Mais quel élu politique aurait de nos jours le courage de dépasser des clivages idéologiques au profit d’une rationalisation de l’impôt ?

L’ISF en est une belle illustration. Depuis belle lurette, cet impôt est considéré par tous comme improductif. Il génère une recette fiscale égale au coût de sa collecte. Pire, il contribue à l’exode de certains contribuables ne pouvant pas délocaliser leur patrimoine (surtout des propriétaires de valeurs immobilières par opposition aux propriétaires de valeurs mobilières). Suivant un principe d’efficacité, il devrait être supprimé. Pour autant, même lorsque l’UMP était au pouvoir, le Président Sarkozy n’avait pas osé l’abolir…

Combien de grandes fortunes françaises disposent d’un patrimoine essentiellement constitué de valeurs immobilières ? Très peu… La richesse autrefois immobilière est, de nos jours, mobilière (actions, obligations, titres financiers hybrides, etc).

Seul le contribuable disposant principalement d’immeubles ne peut pas dissimuler sa fortune… Dans de telles conditions, il n’est pas surprenant de découvrir que les contribuables disposant d’une fortune mobilière, c'est-à-dire délocalisable, tentent d’échapper à l’impôt en le dissimulant à l’étranger.

  1. Dans quelle mesure peut-on considérer que le système fiscal français contribue à encourager ce genre de comportement ?

Le système français doit sortir de l’idéologie pour se réformer et retrouver le chemin de la prospérité à l’aube d’une nouvelle crise économique (l’Europe pourrait entrer en récession mais, tout comme pour le nuage radioactif, la France sera bien entendu épargnée…).

La hausse de la pression fiscale voulue par le Président actuel incite le contribuable à la triche. L’instabilité fiscale française décourage l’investissement et le développement en France de jeunes sociétés.

D’ailleurs, avez-vous vu les manuels d’économie de classe de seconde en France ? Les avez-vous comparés à ceux utilisés en Allemagne ? La comparaison est édifiante. En France, il n’est question que de chômage, de précarité, de lutte des classes, de la protection des salariés, d’écarts de richesse… quand, en Allemagne, on étudie comment créer et développer une entreprise au travers d’exemples concrets.

En France, on s’interroge sur comment partager le gâteau de l’emploi qui s’amenuise au fur et à mesure que la pression fiscale augmente. En France, on stigmatise l’entrepreneur qui a réussi dans les affaires après s’être tué au travail. Plus encore, une fois celui-ci décédé, l’Etat aura la joie d’amputer son patrimoine quasiment de moitié !

Pendant ce temps, en Allemagne, on s’interroge sur comment créer de l’emploi et favoriser l’entrepreneuriat. Pour les Allemands le bonheur n’est pas forcément dans le salariat. Il peut également exister dans l’entrepreneuriat…

  1. Finalement, le système actuel n'est-il pas contre-productif ? 

Il est manifeste que le système fiscal actuel est contre-productif. Il a favorisé la fameuse "fracture sociale". La fracture sociale, développée comme thème de campagne en 1995 par Jacques Chirac, n’a pas cicatrisé. Bien au contraire, elle s’est aggravée.

  1. Quelles pourraient être les pistes à explorer pour améliorer la taxation en France ? 

La fiscalité suisse pourrait être une piste. Il s’agit d’un régime d’imposition au forfait. Cela signifie payer ses impôts sur son train de vie, sur ce que l’on dépense dans le pays et non sur ses revenus. Généralement, le revenu forfaitaire est évalué autour de 400 000 € annuels (variable selon les cantons). C’est sur cette base que sont appliqués les taux de l’IR. Sous réserve d’adaptations, ce pourrait être une piste à étudier pour réformer la fiscalité française...

L’exemple fiscal des pays de l’ex-URSS, un système de flat tax, pourrait être une autre piste de réflexion. Le taux applicable en Russie est par exemple de 13%. C’est fiscalement très alléchant.

Quelle que soit la piste retenue, il faudrait également s’intéresser à la réforme des prélèvements sociaux, aux droits de succession, aux droits de donation, etc, en remettant tout à plat dans un souci d’équité pragmatique.

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