FN bien parti pour arriver en tête aux Européennes : l’UMP pourra-t-elle se permettre d’attendre 2016 et ses primaires pour réagir ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
FN bien parti pour arriver en tête aux Européennes : l’UMP pourra-t-elle se permettre d’attendre 2016 et ses primaires pour réagir ?
©REUTERS/Philippe Wojazer

Le temps presse

Donné gagnant des prochaines élections européennes dans la plupart des sondages, le Front national est en progression constante depuis plusieurs mois. La victoire du FN le 25 mai pourrait entraîner des conséquences sur le plan national et contraindre les partis à réagir, à commencer par l'UMP, encore minée par ses divisions.

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud est professeur de sciences politiques à l’Institut d’études politiques de Grenoble depuis 1999. Il est spécialiste à la fois de la vie politique italienne, et de la vie politique européenne, en particulier sous l’angle des partis.

Voir la bio »

Atlantico : Est-ce que les électeurs se réfugient vers le FN en estimant que leur vote n'aura aucune conséquence puisque le FN n'aura pas la majorité au Parlement européen ? Le vote FN peut-il finalement servir de soupape de sécurité à un électorat français au bord de la rupture ?

Christophe Bouillaud : La vraie grande incertitude est de savoir si les gens vont aller voter. La réelle soupape de sécurité n'est pas le FN mais plutôt l'abstention. Les gens qui se détournent de plus en plus de la politique n'ont même pas envie de voter pour un parti. Ceux qui vont faire l'effort d'aller voter FN ne vont pas penser que ça ne sert à rien, ils vont se dire qu'il y aura un impact sur la politique nationale et sur le refus de la politique européenne telle qu'elle est menée. Il faut par ailleurs rappeler que le FN n'a jamais fait de scores extraordinaires aux Européennes. Là, ça veut dire qu'il se seraient rendus propriétaires des enjeux européens. C'est le FN qui va à l'avenir être identifié aux problèmes entre la France et l'Europe, ce n'est pas rien.


Les bons résultats du FN aux Européennes vont-ils avoir des conséquences sur le paysage politique français et le rapport de forces entre les partis ?

Ça va renforcer l'idée générale que les partis politiques ne font pas assez leur travail. Les partis traditionnels vont devoir mieux le faire. Ces 25 % vont être transformés et donner l'impression d'être 60 % alors qu'au final, le score additionné des autres partis politique sera bien plus important.

Le FN va-t-il continuer à réaliser des scores élevés au fur et à mesure des élections, ou, au contraire, ce phénomène n'est pas durable ?

Il est durable, et à court terme je ne vois pas de changement. Dans les circonstances actuelles et dans les années qui viennent, les mêmes causes risquent de produire les mêmes effets. Le chômage est élevé, l'activité économique est au plus bas... D'une certaine façon tout le monde dit : "le FN a raison sur l'Europe". Plusieurs autres raisons peuvent conduire le FN à maintenir des scores élevés dans le futur : la désindustrialisation, une société qui vieillit...

Dans quelle mesure cette progression du FN est-elle aussi la marque d'une crise politique plus profonde ? Quels en sont les ressorts ?

Structurellement, en France on est en train de constater que les deux grands partis, UMP et PS, n'ont pas une politique économique et sociale très différente. Du coup, le système d'alternance ne fonctionne pas très bien et ne signifie plus grand chose. Le grand problème c'est qu'on a le sentiment que les deux grands partis n'offrent plus de véritable choix. Nous sommes des sociétés organisées sur des croissances relativement fortes, et nous n'en avons plus. On ne sait pas organiser une société libérale et démocratique quand on a pas de croissance. La crise de la démocratie n'est pas qu'en France, pratiquement tous les pays développés sont concernés. Le sentiment est que le système politique ne fonctionne plus.

L'UMP paie-t-elle le prix de son incapacité à incarner une opposition unie autour d'un projet ? Davantage occupés par leurs dissensions internes, les cadres de l'UMP semblent avoir fait le choix de l'inertie en attendant 2016 et des potentielles primaires, ou un éventuel signe de Nicolas Sarkozy pour permettre de sortir de l’ambiguïté. Pourra-t-elle vraiment tenir aussi longtemps ? 

L'UMP fait tout pour avoir un moins bon score aux Européennes. La dissidence de dernière minute d'Henri Guaino et Laurent Wauquiez sur l'Europe est risible. Ils ne font, par ailleurs, quasimen pas campagne. Les chefs ont toutefois intérêts à attendre cette primaire. L'UMP est une machine prévue pour gagner la présidentielle. Ils peuvent tenir jusqu'en 2016 s'ils sont rationnels.

Que faudrait-il pour réveiller le parti ? Sur quelle base le rassemblement pourrait-il s'organiser ? Une explosion de l'UMP est-elle envisageable ?


Ils ont beaucoup plus de chances de gagner la présidentielle s'ils sont rassemblés plutôt que s'ils sont divisés. La vraie question, c'est la reconstitution d'un groupe encore plus large derrière l'UDI et le MoDem. Après le départ de Jean-Louis Borloo, qui va être capable de prendre le leadership ? Des leaders de l'UMP pourraient être tentés de quitter le parti pour faire le rassemblement UDI-MoDem. L'histoire montre que pour faire carrière il vaut mieux rester à l'UMP et au PS. Une explosion de l'UMP est envisageable, mais ils n'y ont vraiment pas intérêt. D'autant plus que la base électorale de l'UMP n'est pas aussi divisée que les chefs. Les militants sont des gens qui veulent l'unité.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !