Et si ça avait été DSK… La politique économique qu’aurait vraisemblablement menée l’ancien patron du FMI<!-- --> | Atlantico.fr
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DSK.
DSK.
©Reuters

La question à 0% de croissance

Dominique Strauss-Kahn fait son retour... médiatique. L'ancien patron du FMI a été l'invité vedette d'un documentaire économique "Le Roman de l'euro" diffusé sur France 2 jeudi 15 mai. En privé, l'ancien candidat à la primaire socialiste critique François Hollande, évoquant une France sans pilote et le qualifiant de "petit arrangeur", "sans vision" et "impuissant" selon l'Express.

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel est professeur à l'ESCP-Europe, et responsable de l’enseignement de l'économie aux élèves-ingénieurs du Corps des mines. Il est également directeur de la revue Sociétal, la revue de l’Institut de l’entreprise, et auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie, en particulier américaine.

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Atlantico : Quelle aurait été la ligne économique de DSK s'il avait été élu ?

Jean-Marc Daniel : Il aurait baissé l'impôt sur les sociétés comme on l'a fait dans beaucoup de pays. Deuxièmement, il aurait cherché à faire ce que préconise Mario Monti et Matteo Renzi en ce moment, une oxygénation de l'économie par une libéralisation de la concurrence. Il aurait été à la fois plus déterminé, plus clair et plus en harmonie avec le discours européen. Il aurait été capable de faire passer ce message européen auprès des Français. Il se serait clairement engagé en faveur de l'économie de marché. Par ailleurs Arnaud Montebourg n'aurait pas été nommé ministre, il aurait animé l'aile gauche du PS. Avec DSK, il n'y aurait pas eu de contradiction sur la ligne économique du gouvernement, la même ligne aurait été appliquée.

Quelles seraient les similitudes et les différences avec la politique économique menée par François Hollande depuis son élection ?

Au niveau des points communs, il aurait tenu le même discours que François Hollande quand ce dernier déclare vouloir favoriser la création de richesse plutôt que la rente. Il aurait tenu le même discours sur la nécessité de respecter l'engagement européen. Il aurait fait voter le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) tel que François Hollande l'a fait. Au niveau des relations économiques internationales il aurait approuvé les démarches de négociations du traité transatlantique, un sujet sur lequel François Hollande n'a pas pris position et n'a pas mis de veto formel.Il n'aurait par ailleurs pas touché aux 35 heures car c'est identifié comme étant son enfant. François Hollande pourrait quant à lui saisir l'opportunité et se démarquer de DSK. Sur les différences, il n'aurait pas tenu un double langage, celui de prétendre faire une politique originale par rapport à l'Europe tout en appliquant la même politique, par exemple lors du pacte de croissance de 2012 où la demande de dépenses de 120 milliards au niveau européen était assez fictive et s'est terminée par un habillage. DSK aurait assumé sa politique économique dès le départ plus brutalement. Pour lui, il vaut mieux cogner dès le début alors que pour François Hollande, quelques demi mesures suffiraient pour colmater les brèches de façon immédiate et pour rassurer les partenaires européens.

Sur le CICE, on peut penser que DSK n'aurait pas renié cette mesure, d'autant plus qu'il s'est prononcé pour une hausse de la TVA et pour l'allègement des charges des entreprises...

Il aurait probablement augmenté la TVA une fois actée la baisse de l'impôt sur les sociétés. Il s'y serait pris autrement sur le le CICE. Il aurait mené des politiques allégeant les charges des entreprises avec une baisse de l'impôt sur les sociétés.

Quand il était à la tête du FMI, il préconisait de réduire les dépenses publiques et d'augmenter les impôts. Une fois élu président, DSK l'aurait-il appliqué ?

Il cautionnait les préconisations du FMI mais il était plus modéré que la Troïka sur les hausses d'impôts. ll aurait essayé d'éviter le matraquage fiscal et privilégié le gel du point indice dans la fonction publique.

Les effectifs de la fonction publique auraient-ils connu une réduction drastique ? L'ex patron du FMI s'était prononcé pour mais il voulait aussi préserver les dépenses dans le domaine de l'éducation...

Je pense qu'il y aurait eu une baisse, c'est inévitable. La règle édictée par Nicolas Sarkozy sur le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite n'aurait pas changé. Sur l'éducation,  je ne sais pas trop comment il aurait géré la situation. La priorité à l'enseignement peut être interprétée de plusieurs façons, sur l'enseignement donné à l' informatique ou alors sur le recrutement.

Quels auraient pu être les engagements et les objectifs chiffrés de DSK en matière de réduction du déficit public ? Le ramener à 3% en 2015 comme l'a fixé le gouvernement actuel ?

DSK aurait pris des engagements très précis sur les déficits structurels après le vote du TSCG : il aurait dit voilà les enjeux, voilà comment les résorber. En Italie, Matteo Renzi dit que ce qui est important ce n'est pas de ramener le déficit à 3%, c'est la question des déficit structurels. Il aurait été plus cohérent, à partir du moment où on vote le TSCG les 3% ne sont plus importants.

Il y a eu récemment un rapport  sur la gestion de la Grèce par le FMI qui est critique à ce sujet. Est-ce ça aurait été un souci pour lui ?

Cela lui aurait posé un véritable problème dans sa campagne présidentielle. En Grèce c'est un problème d'endettement interne et non extérieur. Les experts du FMI n'ont pas été les plus pousse-au-crime, ce sont plutôt les équipes de la Commission, mais cela lui aurait été reproché pendant la campagne. Autre conséquence, Jean-Luc Mélenchon aurait été dans l'opposition dès le départ alors que François Hollande a été habile en ne le prenant pas frontalement.

Lors de la primaire socialiste de 2006, il était favorable à une augmentation du SMIC et des salaires. Six ans plus tard, après la crise économique, aurait-il changé son fusil d'épaule ?

Je ne pense pas. Un peu comme Laurence Parisot, son discours aurait été plus subtil, disant que le problème est celui de la distorsion entre le salaire et la productivité et que dans certains secteurs les salaires ne sont pas assez élevés. Il aurait eu une vision plus souple dans la définition du SMIC, régionalisé et sectorisé économiquement.

Sur la réforme des retraites, pensez-vous qu'il se serait contenté de l'allongement de la durée de cotisation à partir de 2020 ? Aurait il maintenu l'âge légal du départ à la retraite à 62 ans, comme l'avait instauré la précédente réforme d'Eric Woerth en 2010 détricotée par l'actuel gouvernement socialiste  ?

Il aurait maintenu l'age légal du départ à la retraire, mais des gens de son équipe réfléchissaient sur la gestion notionnelle, ce qu'il se passe en Suède. Beaucoup de gens disent que c'est vers ce modèle et sur cette direction qu'il faut aller.

Au final, la politique économique menée par DSK aurait-elle plus portée ses fruits que celle de Hollande ? La croissance serait-elle de retour ? Moins de chômage ?

C'est clair. François Hollande attend le retournement conjoncturel, il met des rustines et il colmate... François Hollande et Jacques Chirac c'est la même politique, celle de l'inconsistance et de la médiocrité. François Hollande n'a pas de vue à long terme, alors que DSK se serait positionné par rapport à son passé au FMI. DSK pense qu'il a la capacité d'organiser l'économie pour en tirer le meilleur avantage alors que François Hollande considère qu'il a de la chance.

Une partie des députés socialistes ont lancé une fronde contre Manuel Valls. Comment DSK, en menant une politique plus libérale, aurait-il pu gouverner avec l'aile gauche du parti ?

Il a laissé Martine Aubry faire l'attribution des circonscriptions après la primaire socialiste, c'est sa vengeance posthume. DSK avait des porte-flingues, comme Jean-Christophe Cambadélis ou Jean Marie Le Guen. Ces personnes seraient arrivés dès novembre 2011 et DSK n'aurait pas laissé la place aux députés frondeurs.

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