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La vente d'art sur Internet représenterait 1,13 milliard d’euros en 2013 et devrait atteindre 2,7 milliards en 2018
La vente d'art sur Internet représenterait 1,13 milliard d’euros en 2013 et devrait atteindre 2,7 milliards en 2018
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Le buzz du biz

La vente d’art sur Internet représenterait 1,13 milliard d’euros en 2013 et devrait atteindre 2,7 milliards en 2018. Décryptage de ce phénomène dans la chronique du "Buzz du biz".

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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Il y a quelques années encore, peu de personnes imaginaient que des noms comme Saatchi ou Christie’s se mettraient à faire de la vente en ligne, au même titre qu’Amazon ou d’autres e-commerçants… Et pourtant, Internet a également bouleversé le marché de l’art !

La deuxième édition du rapport de l’assureur Hiscox est l’occasion, en ce début du mois de mai, de revenir sur le boom de ce nouveau marché. La vente d’art sur internet représenterait 1,13 milliard d’euros en 2013 et devrait atteindre 2,7 milliards en 2018. Déjà, le marché avait connu un boom en 2012, passant de 870 millions de dollars à 2,1 milliards. Evidemment, c’est encore peu par rapport à un marché total estimé à 47 milliards d’euros, mais la croissance est impressionnante.

Les sites se sont multipliés. Certains sont les relais de galeries existantes, comme Saatchi et Christie’s justement. Cette dernière maison a même lancé Christie’s live, qui propose des enchères en ligne. D’autres sont des plateformes totalement numériques, comme Artsy, qui veut rendre "le monde de l’art accessible à toute personne connectée à Internet". Depuis peu, c’est même le géant Amazon qui s’est lancé dans l’aventure (en réalité, il s’y était déjà essayé au début des années 2000, sans succès). Les sites et les gammes sont différents, mais la dynamique est commune.

Evidemment, ces pratiques ne sont pas du goût de tout le monde et nombreux sont les critiques qui considèrent que les risques sont trop grands, la fiabilité trop faible. Rendez-vous compte, sur Internet, le vendeur peut vous mentir (ce qui n’arrive jamais dans la vraie vie, ma bonne dame) ! Dans L’Express, un journaliste s’emporte : sur Internet, la description des œuvres n’est pas fiable, les œuvres proposées sur les plateformes sont souvent de second rang (voire vraiment du tout dernier rang) et les artistes peu connus (et carrément médiocres). Consommateurs fuyez, vous êtes en danger !

La réalité est loin de cette caricature. Elle enseigne, a priori, deux leçons.

La première leçon est que le marché est une institution fiable. Sur Internet comme dans le monde physique, des hiérarchies se créent, fondées sur les choix des consommateurs. Ceux-ci reposent notamment sur la confiance, la qualité et le service, que reflètent les prix (révélateurs de tout, aurait dit Hayek). Si le consommateur souhaite garantir son achat par une caution "qualité", il se rapprochera d’une institution connue, d’un vendeur « physique ». A l’inverse, s’il recherche le prix le plus bas possible – ce qui est tout aussi légitime – il ne pourra pas exiger les mêmes garanties. Au demeurant, le consommateur est assez « grand » pour faire des choix responsables : acheter une croute présentée comme étant signée par Picasso sur Amazon est aussi malin que d’avoir le même comportement dans une brocante du 15 août.

Cette fiabilité du marché est vraie pour les œuvres d’art comme pour bien d’autres biens : le service se paie et la relation de conseil avec un expert a un coût. D’une façon assez paradoxale, Internet valorise la proximité humaine et commerciale.

L’autre leçon est que dans le domaine de l’art, l’arrivée d’Internet doit être ramenée et appréciée à sa juste valeur. Au fond, est-ce vraiment une "révolution" si importante ? Comme le rappelle Gilles Lipovetsky dans son passionnant livre, L’esthétisation du monde, vivre à l’âge du capitalisme artiste, la démocratisation de l’art n’a pas attendu Internet. Elle est là depuis l’explosion de la société de consommation. C’est peut-être ce phénomène de diffusion à grande échelle, de généralisation de la démarche commerciale, qui a été porteur d’une plus révolution de la distribution artistique. Au fond, comme dans d’autres secteurs du commerce, Internet n’est « qu’ » un nouveau canal de distribution, une nouvelle façon de vendre…

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