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Ce que nous apprend l’analyse de la liste des secteurs qui attirent les investisseurs étrangers en France
©Reuters

Allez, viens !

D'après les derniers chiffres de l'Agence française des investissements internationaux, les investissement étrangers ont progressé en 2013. Bien que la France ne parvienne pas encore à attirer les pôles décisionnels, ce sont près de 30 000 emplois qui ont été créés ou sauvegardés, et 700 projets lancés.

Frédéric Fréry

Frédéric Fréry

Frédéric Fréry est professeur à ESCP Europe où il dirige le European Executive MBA.

Il est membre de l'équipe académique de l'Institut pour l'innovation et la compétitivité I7.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages et articles, dont Stratégique, le manuel de stratégie le plus utilisé dans le monde francophone

Site internet : frery.com

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Atlantico : Les investissements étrangers en France se sont révélés en progression en 2013, d'après l'Agence Française des investissements internationaux. Quels sont aujourd'hui les secteurs qui attirent les investisseurs étrangers ? Pourquoi ?

Frédéric Fréry : Les investisseurs étrangers plébiscitent la France pour plusieurs raisons. Le niveau de nos infrastructures (transport, énergie, communications, etc.) est considéré comme excellent, ce qui est toujours important pour des filiales qui par nature devront entretenir un niveau d'échange élevé avec l'étranger. De même, la situation géographique de la France, au carrefour de l'Europe, est un atout considérable. C'était déjà, il y a plus de 20 ans, ce qui avait convaincu Disney d'implanter son parc d'attraction à Marne-la-Vallée plutôt qu'à Valence en Espagne, en dépit de la météo. La troisième raison est le niveau d'étude de nos compatriotes, en tous cas ceux qui disposent d'une qualification. On trouve en France d'excellents techniciens, chercheurs et ingénieurs, dont les rémunérations restent raisonnables par rapport à celles de leurs équivalents scandinaves ou germaniques. Soulignons au passage la qualité de nos écoles de commerce, qui caracolent en tête des classements mondiaux. Enfin, ces dernières années, la France a su mettre en place des dispositifs particulièrement attractifs, comme le crédit d'impôt recherche, dont 2000 entreprises étrangères bénéficient chaque année.

A combien évalue-t-on ces investissements aujourd'hui ? Concrètement, qu'est-ce que cela représente ?

Selon le ministère de l'économie, la France est le quatrième pays mondial pour le stock d'investissements étrangers (1 095 Md$ en 2012), derrière les États-Unis, la Chine et le Royaume-Uni. En termes de flux, en revanche, nous sommes seizièmes mondiaux, avec une tendance qui selon les sources serait en forte baisse ou au contraire en légère progression (le calcul est en effet complexe, car il intègre des flux financiers internes aux multinationales étrangères implantées en France, dont les arcanes comptables sont par définition abstruses). Quoiqu'il en soit, ce sont 29 631 emplois qui ont été créés ou maintenus en France en 2013 grâce aux investissements étrangers, avec au total 685 projets d'investissement. Concrètement, cela reste assez modeste face aux chiffres du chômage, mais ce sont souvent des emplois qualifiés, voire très qualifiés, et on ne peut donc que s'en féliciter. D'ailleurs, le problème est moins celui de l'attractivité de la France pour les investisseurs étrangers que celui de la baisse de la part de marché française dans la plupart des pays étrangers, notamment en Asie.

Qui la France parvient-elle à attirer ? Qui sont nos partenaires ? Que viennent-ils chercher chez nous ?

Les principaux investisseurs sont les Américains, les Allemands et les Italiens. Les Américains cherchent avant tout une tête de pont en Europe de l'Ouest et du Sud, voire en Afrique, alors que les Allemands et les Italiens entretiennent le niveau de nos échanges commerciaux (ce sont nos principaux partenaires, avec les Belges). Les motivations des investisseurs sont donc différentes suivant leur origine géographique, mais les raisons de leurs choix restent celles évoquées plus haut : l'infrastructure, la localisation, la qualification et les dispositifs incitatifs.

Pour autant, en dépit de cette bonne nouvelle, la France peine toujours à attirer les pôles décisionnels et de responsabilité. Comment l'expliquer ? Quelles en sont les conséquences ?

La France est mondialement raillée pour son niveau d'imposition, la lourdeur de son administration et l'inconstance de sa législation. Ce n'est donc certainement pas chez nous qu'il est préférable d'implanter une direction générale, qui par nature centralisera des profits, versera de très hauts salaires et devra anticiper le contexte réglementaire. Autant il est pertinent pour des investisseurs étrangers de créer chez nous des usines, des laboratoires de recherche, des centres de services ou des départements de design, autant les sièges sociaux trouvent plus naturellement leur place aux Pays-Bas ou au Luxembourg, pays fiscalement plus accueillants et surtout moins sujets aux revirements idéologiques et aux atermoiements politiques. On peut d'ailleurs constater que même les groupes français ont de plus en plus tendance à délocaliser leurs sièges. C'est notamment le cas de Publicis Omnicom, Gemalto, Renault-Nissan, Schneider ou Lafarge.

Dans quels secteurs cela représente-t-il un potentiel danger ?

Faire fuir les centres décisionnels est toujours un danger, mais c'est particulièrement critique dans la finance, où la place de Paris n'est plus que symbolique. Plus largement, se priver des plus gros contribuables est regrettable pour nos finances publiques. Les Britanniques ou les Irlandais l'ont bien compris : attirer les riches, c'est s'assurer de confortables rentrées d'argent. Les faire fuir, c'est tôt ou tard être contraint à ponctionner davantage les classes moyennes.

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