Paris qui ? L'inquiétante perte d'influence de la France au cœur du pouvoir européen<!-- --> | Atlantico.fr
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Le pouvoir de la France décline au sein de l'Europe.
Le pouvoir de la France décline au sein de l'Europe.
©REUTERS/Philippe Wojazer

La chute

Entre un président français qui s'exprime moitié moins que la chancelière allemande lors des sommets européens et des pays du Sud qui semblent ne pas avoir besoin de l'appui de la France pour obtenir un compromis de l'Allemagne sur l'instauration d'un mécanisme de sauvetage de l'euro, on peut s'inquiéter de l'atonie d'un pays pourtant censé être l'un des piliers de l'UE.

Atlantico : La France semble se retrouver dans une position délicate sur la scène communautaire alors qu'elle n'arrive plus à s'appuyer comme auparavant sur les pays du Sud pour mener son bras de fer avec Berlin. Peut-on parler d'un "décrochage" de Paris ? Dans quelles proportions ?

Jean Quatremer : Effectivement : le décrochage de la France sur la scène européenne est lié à son incapacité à tenir, depuis dix ans, ses engagements, que ce soit en matière budgétaire ou de réformes structurelles. La France a même démontré, en 2005, qu’elle n’était pas en mesure de gagner un référendum alors que le traité constitutionnel portait son empreinte… Dès lors, cette faiblesse intérieure se retrouve sur le plan européen : comment traiter avec un gouvernement dont la parole ne vaut pas grand-chose ?

Ensuite, l’incapacité des dirigeants français à avoir une vision claire de l’Europe qu’ils souhaitent participe de cet affaiblissement. Depuis les années 50, ils hésitent constamment entre une Europe « inter-gouvernementale », celle où les Etats dominent, et une Europe disons « communautaire » si l’on souhaite éviter le gros mot qu’est devenu le fédéralisme. Peut-on à la fois vouloir que le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement - qui décide par consensus - ait toujours le dernier mot, tout en regrettant le manque de démocratie, ce qui passe par un renforcement du Parlement européen, ou encore militer pour l’Union bancaire qui représente un saut fédéral aussi important que l’euro ? Évidemment non. On ne peut pas avoir à la fois le beurre et l’argent du beurre. De ce point de vue, l’Allemagne et l’Italie, qui sont en faveur d’une Union fédérale, ou la Grande-Bretagne, qui militent pour une Europe intergouvernementale, sont plus conséquentes. Est-ce un hasard si personne, moi en premier, n’est capable d’expliquer ce que François Hollande a en tête pour l’Europe ?

Enfin, le fait que les deux partis de gouvernement, PS et UMP, aient « l’Europe honteuse », achève de discréditer la France. Comment peuvent-ils expliquer sur la scène intérieure qu’on veut une « autre Europe » alors qu’on a activement participé à la construction de l’Europe telle qu’elle est ? La démocratisation de l’Union, par exemple, a du être arraché à une France qui s’est toujours méfiée du parlementarisme…  Ce double discours est une spécificité bien française.

Guillaume Klossa : Le déclin ou le décrochage français sur la scène européenne est un processus de long terme. Il est à la fois économique, politique et culturel. Il est en grande partie lié au sentiment que notre pays est incapable de mener les réformes nécessaires à son développement économique. Au début des années 2000, alors que l’Allemagne est perçue comme déclinante, c’est la Grande-Bretagne de Tony Blair à qui tout semble réussir, qui sert de source d’inspiration avant que l’Allemagne ne prenne le relais à la fin de la décennie précédente. Du point de vue linguistique,  il s’accélère  avec l’élargissement aux pays nordiques au milieu des années 1990 qui scelle la perte de vitesse de l’utilisation de la langue française au sein des institutions européennes.  Beaucoup de hauts fonctionnaires même anglophones ou danois (le Danemark a rejoint la CEE en 1973) ont longtemps privilégié l’usage du français comme langue de travail communautaire, le français permettant à leur sens de mieux exprimer que l’anglais un intérêt général européen.

Mais Paris n’a jamais vraiment eu le souci de se battre pour l’usage de sa langue, préférant le combat pour le siège du Parlement à Strasbourg.  A la veille du référendum de 2005 et malgré l’élargissement à l’Est de l’UE, la France qui s’est opposée à la guerre d’Irak avec raison, semble reprendre du poil de la bête, mais le rejet du projet de Constitution européenne en mai 2005 isole à nouveau durablement le pays avant un rebond d’influence à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne du second semestre 2008 , que tous les présidents de groupes du Parlement européen, depuis les Verts en passant par les communistes, le PSE et bien sûr le PPE reconnaissent alors comme une très grande présidence : institutionnalisation du G20, paquet énergie climat, intervention politique dans le dossier géorgien plutôt réussie, capacité de réaction et de mobilisation collective à l’occasion de la crise financière.

Depuis, la France donne le sentiment de se replier sur elle-même. Le président Hollande au début de son mandat au dernier semestre 2012 a lancé l’idée implicite d’une alliance avec l’Espagne et l’Italie  mais ces deux pays ont eu le sentiment de ne pas être toujours soutenus par Paris quand ils en avaient le plus besoin : ils sont donc méfiants à notre égard. S’ils doivent obtenir la bienveillance du Conseil ou de la Commission, ils savent que c’est le soutien de Berlin qui est capital et qu’ils n’ont aucun intérêt pour l’obtenir à passer par Paris. Enfin, ils  ont choisi des voies de réformes radicales, très différentes d’ailleurs l’une de l’autre, et considèrent que Paris n’a pas encore véritablement lancé les réformes structurelles qui permettraient de relancer l’économie française, même s’ils accueillent favorablement le pacte de responsabilité.

Sylvie Goulard : Au regard de l’histoire de l’intégration communautaire, on remarque que ce n’est certainement pas quand la France s’est appuyée sur les pays du Sud contre Berlin qu’elle a réussi à faire peser son influence en Europe. C’est au contraire lorsqu’elle s’est engagé dans des compromis, parfois compliqués il est vrai, avec l’Allemagne qu’elle a su manifester son importance. Cette idée, souvent entendue, que les pays latins auraient tout intérêt à une coalition contre les pays d’outre-Rhin relève d’après moi d’avantage d’une illusion que d’une réalité diplomatique.

On a notamment évoqué pendant un temps une alliance entre la France et l’Italie de Mario Monti pour contrer les exigences budgétaires d’Angela Merkel, mais c’est une représentation finalement assez floue de ce qui s’est réellement passé. Peu après son arrivée au pouvoir en novembre 2011, Nicolas Sarkozy et la Chancelière allemande ont en vérité eu à cœur d’insérer leur homologue italien au centre du jeu, notamment en organisant un mini-sommet commun le 24 novembre à Strasbourg pour réaffirmer l’importance du rôle de la BCE. Loin de donner tous ses gages à la position française, M. Monti a de fait mené une double stratégie que tout le monde n’a peut-être pas su décrypter : d’un côté il acceptait d’engager des efforts colossaux sur le plan budgétaire, de l’autre il négociait une politique européenne d’avantage engagée vers la croissance. C’est à mon avis le pari gagnant qui a notamment amené le Conseil européen, en juin 2012, à reconnaître qu’il fallait faire des efforts pour soulager les pays s’engageant dans des réformes structurelles. Un acte qui n’est pas resté déclaratoire puisqu’il a ouvert par la suite la voie à Mario Draghi pour apaiser les marchés. Il est en tout cas erroné de croire que M. Monti, de même que M. Renzi actuellement, jouerait la carte de la confrontation aux côtés de Madrid et de Paris contre Merkel.

La première opposition à l'Allemagne sur le dossier de l'Union bancaire a été celle de l'Espagne et du Portugal, alors que la France était très attendue dans ce dossier. Que traduit ce manque d'implication ?

Jean Quatremer : Je ne suis pas d’accord avec votre analyse, puisque c’est bien Paris qui a poussé à l’instauration d’une Union bancaire la plus large possible, alors que l’Allemagne souhaitait la limiter aux pays qu’elle considérait comme peu sérieux, c’est-à-dire à tout le monde en dehors d’elle, de l’Autriche et des Pays-Bas. En bref, Berlin souhaitait que ses banques échappent au contrôle de la BCE et que le sauvetage des banques ne soit pas mutualisé. Pour le coup, la France a su, dans ce domaine précis, faire prévaloir ses ambitions. C’est d’ailleurs l’un des trop rares dossiers où elle a su effectivement se montrer réellement européenne.

Guillaume Klossa : Les avancées concernant l’Union bancaire sont une bonne chose et elles ont contribué à recréer la confiance sur les marchés à l’égard de l’Europe. Mais beaucoup de temps a été perdu en raison des réserves de Berlin et le calendrier de mise en œuvre est trop lent à mon sens. Mon inquiétude tient aussi à la dimension procyclique du projet. Tel qu’il est conçu, ce projet peut encourager les banques à se retirer des Etats membres où le risque est le plus élevé, ce qui est contraire à l’esprit du marché unique et peut rendre plus difficile l’emprunt à  un taux raisonnable pour les entreprises n’ayant pas la capacité à aller sur les marchés internationaux. Par ailleurs, certaines institutions bancaires notamment régionales sont exclues du contrôle de la BCE alors que leur défaut peut avoir un impact systémique, ce n’est pas non plus une bonne chose.  A mon sens, la  baisse de l’influence de Bercy sur ce dossier tient en partie au fait que nous avons du mal à développer une analyse systémique suffisamment étayée et visionnaire et que nous avons un doute sur ce que sont nos intérêts dans cette affaire mais aussi que nous n’avons pas été en mesure de définir une approche conforme à l’intérêt général  européen.

Sylvie Goulard : Rentrer dans le détail de tel  ou tel dossier peut nous faire perdre la vue d’ensemble. Dans ce cas précis je pense qu’il s’agit plutôt d’une capacité de compromis de la part du gouvernement Ayrault qui a su malgré tout faire avancer un dossier important. Les Allemands, et particulièrement la Cour de Karlsruhe, ont généralement une interprétation beaucoup plus « juridique » et restrictive des traités, ce qui explique qu’ils arrivent plus facilement que d’autres à imposer des conditions. Sur de nombreux dossiers et accords, la France se retrouve généralement en confrontation avec cette vision et se retrouve souvent contrainte au compromis, compromis que l’on interprète trop souvent comme une défaite. Il y a toutefois selon moi des éléments plus objectifs dans l’affaiblissement actuel de la France, et ces éléments sont clairement discernables depuis le début des années 2000, tant dans les positionnements politiques que sur le plan économique.

L'instauration d'un mécanisme de sauvetage de l'euro était au cœur des propositions françaises en 2010, bien que ce soit un groupe d'eurodéputés emmené par la portugaise Eilisa Ferreira qui a réussi à emporter les concessions finales à l'Allemagne là où Pierre Moscovisci avait échoué. Comment expliquer une si faible influence de Bercy ? La retrouve-t-on sur d'autres dossiers ?

Jean Quatremer : Cela s’explique davantage par la répartition des rôles au sein de l’UE. À un certain moment de la négociation, les gouvernements ont dû composer avec Berlin qui s’opposait à une communautarisation trop rapide du fonds de résolution des crises bancaires. Il y a un moment où les États réunis au sein du Conseil des ministres, sauf à vouloir déclencher une crise européenne, n’ont d’autres choix que de parvenir au moins mauvais compromis possible. Mais le Parlement européen, qui a le dernier mot sur bien des dossiers, peut exiger davantage, ce qui s’est passé sur le dossier de l’Union bancaire. Le Conseil des ministres arrache un compromis, le Parlement en arrache un de meilleure qualité s’il le peut. On peut difficilement reprocher à la France de s’être appuyée sur le Parlement européen et d’avoir joué la démocratie européenne. Évitons les mauvais procès et reconnaissons à la France quelques bons points en dépit des difficultés qu’on lui connaît actuellement.

Guillaume Klossa :  Je crois que François Hollande est conscient qu’une condition pour retrouver une part de notre influence politique est que notre pays retrouve la voie d’une croissance durable.  Sans retour à une croissance durable, la France ne sera pas politiquement audible en Europe. Mais ce qui me semble faire défaut est plus préoccupant, nous avons perdu notre capacité d’imagination politique, celle qui a permis de créer la CECA, d’imaginer le serpent monétaire, de faire l’euro, nous n’avons plus d’ambition pour les Européens et avons le plus grand mal à nous projeter dans le monde de demain. Cette créativité faisait partie de l’ADN européen de notre pays et était un élément majeur de notre influence politique, il est important que dans ses positions, le président porte cette inspiration européenne. C’est moins une question de nombre d’interventions que de souffle politique.

A-t-on finalement trop misé sur une influence politique en perte de vitesse sans privilégier les mécanismes hiérarchiques de l'Union ?

Jean Quatremer : L’Allemagne est parfaitement à l’aise dans l’Union européenne qui est bâtie sur le modèle allemand, c’est-à-dire décentralisé et parlementaire. C’est évidemment une vision qui colle mal à notre vision française du pouvoir où l’on croit que seul le sommet de la pyramide (ici le Conseil européen) décide et tranche. Les mécanismes d’influence se situent pourtant bien en amont, même en amont des propositions que formulent la Commission. Si cette réalité est bien connue des diplomates et hauts fonctionnaires français, le plus haut niveau politique ne la prend pas en compte et préfère jouer du pouvoir du Conseil européen et du Conseil des ministres. Or, quand un texte arrive à ce niveau, il est déjà trop tard : on ne peut plus l’influencer qu’à la marge. Berlin, elle, sait parfaitement jouer de tous les niveaux de pouvoir, ce qui lui donne un avantage comparatif évident.

En même temps, le centralisme à la française permet une extrême souplesse dans les négociations. C’est le côté pile de la pièce si vous voulez. Ainsi, ce n’est pas un hasard si la France n’est jamais dans la minorité lorsqu’il y a un vote formel au Conseil à la différence de l’Allemagne. Lors d’une négociation, il suffit d’un coup de fil à l’Élysée pour que le négociateur français change de position en négociant des concessions. Alors que les Allemands, de par la complexité de leurs processus de décisions interne (au sein du gouvernement, de la coalition, du Bundestag, des Länder pour les compétences partagées), sont eux contraints de maintenir le cap, jusqu’au bout, quitte à se retrouver dans la minorité. En même temps, cette rigidité leur offre un poids évident dans la négociation puisqu’ils peuvent faire valoir qu’un changement de position est trop complexe pour eux. On voit bien ici les avantages et les inconvénients qu’offrent les deux systèmes (français et allemands).  

Au-delà des considérations purement économiques, plusieurs cadres bruxellois évoquent le manque d'investissement du président Hollande sur la scène européenne, ce dernier s'exprimant "moitié moins" qu'Angela Merkel lors des sommets rassemblant les Etats membres. La France souffre-t-elle avant tout de son manque d'ambitions politiques ?

Jean Quatremer : François Hollande s’illustre effectivement par une timidité notable sur la scène européenne, à la différence de Nicolas Sarkozy, son prédécesseur. Pis : il n’aborde pratiquement jamais les thématiques européennes en dehors de Bruxelles, alors qu’il s’agit d’un sujet déterminant dans l’élaboration des politiques budgétaires et économiques de la France. Manuel Valls n’est pas en reste : il s’est contenté de quelques phrases sur l’Europe lors de son discours de politique générale. Un fait révélateur de cette prudence : en deux ans de mandat, François Hollande n’a jamais rencontré les journalistes français en poste à Bruxelles en « off » afin de clarifier sa politique, alors que tous les précédents locataires de l’Élysée avaient pour tradition de s’adonner à ce rituel dès qu’ils se rendaient à Bruxelles. Cette prise de distance avec la presse s’explique de manière assez simple : Hollande considère que la question européenne est un piège, le moindre faux pas risquant de réveiller les divisions internes à sa majorité. On voit pourtant bien à travers les crispations à gauche autour des 3% que cette stratégie du silence ne porte pas ses fruits...  

Sylvie Goulard : Les Français font trop souvent l’erreur de croire que tout peut émaner du simple discours politique, bien que le volontarisme et l’implication soient évidemment toujours nécessaires. La capacité économique est en vérité le facteur fondamental qui permet de mesurer le poids d’un Etat-membre et d’aucuns adoptent aujourd’hui un ton qui ne correspond plus à leur poids réel. De nombreux partenaires européens sont ainsi loin de partager mes idées, non pas tant par sentiment anti-français mais parce qu’ils ont simplement l’impression que l’Hexagone n’a pas de performance positive à faire valoir. L’Allemagne peut s’appuyer sur son industrie, la Finlande sur son modèle éducatif, l’Autriche sur la qualité de sa formation professionnelle, tandis que la France n’a actuellement que peu d’avantages concrets à mettre en avant. La puissance n’est jamais que la valorisation d’une position de fait, la simple parole ne suffisant pas à masquer les réalités économiques.

François Hollande a récemment renouvelé une partie du personnel d'Etat chargé des affaires européennes, incluant notamment Philippe Léglise-Costas, président du Secrétariat Général aux affaires européennes, dans le cercle de l'Elysée. Ces changements pourront-ils insuffler un nouvel élan à la politique française ou s'agit-il d'une manœuvre simplement cosmétique ?

Guillaume Klossa :  Nos partenaires, mais aussi la Commission et la présidence du Conseil européen ont eu le sentiment de cafouillages au début du quinquennat : multiplicité d’interlocuteurs, positions insuffisamment coordonnées entre Bercy et l’Elysée, voire Matignon, divisions au sein même de l’Elysée... La nomination de Philippe Léglise-Costa (ancien directeur du cabinet où Guillaume Klossa a officié, ndlr) qui était déjà conseiller Europe du président comme secrétaire général du Secrétariat général aux affaires européennes qui coordonne les positions interministérielles de la France en matière européenne, est à cet égard une très bonne chose.  Cette nomination est un signal politique fort, c’est désormais l’Elysée qui tranchera et à l’Elysée, c’est le conseiller Europe du président qui aura le dernier mot.  Philippe Léglise-Costa est dans le système européen l’un des hauts fonctionnaires les plus respectés notamment à Berlin, c’est aussi l’artisan du Paquet Energie Climat. Je me réjouis de ce choix  et de cet arbitrage d’autant que j’ai pu travailler directement avec lui pendant la présidence française et apprécié ses qualités intellectuelles et humaines. La nomination de Jean-Pierre Jouyet comme secrétaire général de l’Elysée est un autre signal politique fort à ne pas sous-estimer. Ancien directeur de cabinet de Jacques Delors à la Commission européenne et ancien secrétaire d’Etat chargé de la présidence française de l’Union européenne, il est également unanimement respecté en Europe et connu pour son empathie, une qualité clé pour un pays comme le nôtre souvent critiqué pour son arrogance et sa difficulté à être à l’écoute de ses partenaires.

Jean Quatremer : Ces changements montrent une volonté de centraliser la gestion européenne à l’Élysée. L’Europe a aussi fait partie du « domaine réservé » sous François Mitterrand lors de l’achèvement du marché intérieur et de l’élaboration du Traité de Maastricht qui allait créer la monnaie unique, de 1986 à 1992. Cet acte II de la centralisation des questions communautaires, aussi illustrée par la nomination à Bercy du fidèle Michel Sapin, semble a priori révéler une prise de conscience de l’importance du sujet « Europe ». On peut toutefois rester sceptique sur l’efficacité d’un tel dispositif alors que la pensée française reste empêtrée dans la confusion et le double discours...

Sylvie Goulard : Au-delà des nominations effectuées récemment, la vraie question réside dans l’adoption ou non des réformes structurelles qui pourraient remettre la France dans le jeu, non pas pour faire plaisir à Bruxelles, mais simplement pour sortir d’une dérive financière et budgétaire de plus en plus préoccupante. La Cour des Comptes ne dit ainsi pas vraiment autre chose que la Commission dans ce domaine. C’est donc une question économique avant d’être une affaire de transferts au plus haut-niveau de l’Etat. Une fois que cela est dit, il est vrai que la France a sur les dernières années sciemment gaspillé l’influence qu’elle pouvait avoir à Bruxelles. Lorsque l’on voit certains de nos députés arriver à Strasbourg tout en étant gêné par le cumul des mandats, il ne faut pas s’étonner de constater la faiblesse de la parole française dans de nombreuses commissions. Si l’objectif n’est clairement pas d’agiter partout son petit drapeau lorsque l’on est un député communautaire, on ne peut que regretter de voir que les institutions européennes ne sont pas en général pas prises au sérieux par notre personnel politique.

Pour lire le Hors-Série Atlantico, c'est ici : "France, encéphalogramme plat : Chronique d'une débâcle économique et politique"

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