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Les deux effets kiss kool (et toxiques) du gel de l’indice des traitements de la fonction publique
©Reuters

Demi bonnes intentions

Après des semaines de tergiversations, le couperet tombe : ce sera le gel des salaires de la fonction publique. Encore une fois, on aura fait l’économie d’une réflexion globale sur les missions de l’Etat.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Manuel Valls a tranché. Pour la fonction publique, ce sera le gel des salaires. Un dernier rappel pour Jean Marc Ayrault qui sur cette même question annonçait il y a deux mois "Ce n'est pas vrai... Pourquoi annoncer de fausses nouvelles ?". Le résultat est là pour les 5 millions de fonctionnaires qui avaient déjà subi 4 années de stagnation salariale. Ironiquement, l’INSEE publiait le même jour l’évolution de la perte de pouvoir d’achat des fonctionnaires, -0.8% pour la fonction publique d’état pour 2012. Chaque année d’ici 2017, ce sera le même tarif.

Des économies oui, mais une technique qui rappelle les recommandations faites par le gouvernement canadien, après que ce dernier soit parvenu à baisser drastiquement ses dépenses publiques "le rabot général ne fonctionne pas… il faut des baisses spécifiques" c’est à dire des choix, des réformes de structure qui peuvent emporter l’adhésion.

L’exemple de la Suède est encore plus décisif. Alors que le pays plafonnait à un niveau supérieur à 70% de dépenses publiques par rapport à son PIB au début des années 90, les réformes ont commencé à pleuvoir. Un alignement des retraites de la fonction publique sur le privé, une réflexion générale sur le rôle d’un état, sur ses fonctions essentielles, et des choix. Un recentrage sur les fonctions régaliennes de l’état. Les réformes "réussies" de la fonction publique ont un point commun : la mise en place d’une gestion du personnel venant du secteur privé ; de l’embauche…. jusqu’au licenciement. Car la grande spécificité de la fonction publique française est le taux d’emploi à vie, soit 87.5% de l’administration centrale. Ce que même la Chine tente de réformer et qui est appelé "le bol de riz de fer".  Mais de tout ceci on ne parlera pas. Mieux vaut faire payer tout le monde un peu, éviter le changement, et croiser les doigts. C’est un programme d’ensemble de revalorisation de la fonction publique qui passe à la trappe.

Malheureusement croiser les doigts ne suffit pas à masquer l’ironie de la situation économique française. Alors que le mot "déflation" fait aujourd’hui partie du vocabulaire commun, le lien ne semble pas bien être fait avec les réformes proposées. Et le gel du point d’indice des fonctionnaires ne fait que s’ajouter à la glaciation des prestations sociales. Car si ces revenus ne progressent pas, la stagnation ne fera que renforcer le risque déflationniste qui pèse aussi bien sur la France que sur la zone euro.

Et une déflation a la fâcheuse tendance de provoquer un effet boule de neige sur les niveaux de déficits et de dettes. Le Japon a pu en faire l’expérience en passant de 60% de dettes sur PIB en 1990 à 240% aujourd’hui, notamment grâce à l’effet magique de la déflation : baisse de 30% des recettes fiscales et alourdissement relatif du poids total des emprunts. Si les revenus baissent d’année en année, le montant de la dette reste elle fixe. L’équation est insoluble

En gelant ces différents revenus, le gouvernement remet une pièce dans le Jukebox déflationniste, ce qui risque bel et bien de neutraliser l’effet recherché par ces réformes : baisser les déficits et la dette. La conclusion est définitive : sans croissance les réformes proposées cumuleront deux inconvénients : le mécontentement des personnes visées et l’échec du but recherché (voir ici).

La raison pour laquelle les réformes canadiennes et suédoises font encore école aujourd’hui, si elles ont été possibles et efficaces, est que la croissance était au rendez-vous. Une croissance générée par l’autorité monétaire qui venait en soutien des efforts budgétaires. Il s’agit d’un "Policy mix" qui a fait ses preuves par le passé, mais qui suppose pour Manuel Valls d’obtenir le soutien de la BCE. 

>>>>>>> Pourquoi le pacte de responsabilité est malheureusement condamné à l’échec (ou les bonnes intentions diluées dans la recherche du moindre coût politique et social) <<<<<<<<

Pour lire le Hors-Série Atlantico, c'est ici : "France, encéphalogramme plat : Chronique d'une débâcle économique et politique"


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