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BPI et Caisse des dépôts : le bilan qu’en font les entrepreneurs
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Un financement pour l'innovation

La BPI a vocation, notamment à financer l'innovation et aider les entrepreneurs. Pour autant, tous ne sont pas particulièrement confiants quant à sa façon de fonctionner, et semblent y voir une institution plus politique que véritablement pratique. Retour sur ce dont elle est chargée et comment elle mène à bien ces tâches.

Guillaume Cairou

Guillaume Cairou

Guillaume Cairou est président du Club des entrepreneurs.

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Atlantico : Le Président de la BPI, Nicolas Dufourcq, a déclaré dans une interview au Journal du net être "très utile" aux entrepreneurs. Êtes-vous en accord avec son constat ? Les entrepreneurs partagent-ils cette vision plutôt positive de l'action de la BPI ? En quoi leur diagnostic peut-il différer ?

Guillaume Cairou : Je partage son avis. La BPI est particulièrement utile aux entrepreneurs et notamment à ceux qui se lancent et à ceux qui sont en difficulté. Les entrepreneurs du Club que j'ai l'honneur de présider saluent son action positive au service de l'entrepreneuriat en France même si il est encore parfois difficile de surmonter les contraintes administratives qu'elle impose pour constituer les dossiers. Elle a eu du mal à démarrer et son action manque de visibilité. Je suis convaincu qu'elle est indispensable dans le paysage entrepreneurial français. Elle en est un acteur essentiel. L'avenir dira si elle a su devenir incontournable.

Les financements débloqués correspondent-ils vraiment aux besoins des PME et ETI françaises ? Quels sont justement les besoins prioritaires ?

La principale difficulté que j'ai pu observer c'est que les entrepreneurs étaient méfiants et ont mis du temps à se tourner vers elle. C'est bien dommage. Les entrepreneurs se méfiaient de cette institution publique qui a souvent, à tort, semblé politique avant d'être utile. Je crois que ce problème est surmonté même si j'entends encore trop souvent au quotidien des entrepreneurs m'expliquer qu'ils sont convaincus de ne pas avoir la taille ou le temps nécessaire pour bénéficier des aides de la BPI comme de celles d'ailleurs des collectivités territoriales.

Les besoins prioritaires aujourd'hui sont doubles : le financement de l'innovation dont la France manque cruellement et le besoin de trésorerie. Je ne me résignerai jamais à accepter qu'une entreprise soit contrainte de fermer ses portes pour ne pas avoir trouvé quelques malheureux milliers d'euros. La difficulté aujourd'hui c'est que les banques ne prêtent plus et que les assurances n'assurent plus.

Une des grandes faiblesses de notre pays c'est qu'il n'y a pas encore assez de capital privé. La BPI permet de surmonter cette faiblesse. Les entrepreneurs avaient besoin de se mettre en avant, la BPI a réussi à obtenir à certains projets une belle et méritée médiatisation. C'est salutaire.

La BPI doit investir 12 milliards d'euros d'ici 2017 dans les entreprises françaises. Que savez-vous des orientations qui prévalent aux arbitrages en termes de secteurs notamment ?

On sait d’ores et déjà qu'elle investira en minoritaire directement ou via des fonds dédiés et à un certain niveau. On sait également qu'elle investira par principe dans certains secteurs et pas dans d'autres.

Tout est une question de dosage du volume d'aide aux entreprises. Les entrepreneurs ont besoin de proximité et de ce point de vue la BPI qui est encore une jeune institution a plutôt bien réussi notamment à travers ses fonds régionaux.

La crainte à la création de la BPI était qu'elle ne s'attache qu'aux canards boiteux, qu'en est-il ?

La difficulté me semble t il est plutôt inverse. Qu'elle ne s'attache pas suffisamment aux entreprises les plus en difficulté. J'ai en tête avec tristesse l'exemple des Atelières, ces femmes si courageuses et investies que la BPI n'a pas réussi à aider.

L'action de la BPI correspond-t-elle aux besoins des start-up ?

Oui. C'est une vraie réussite en la matière. Elle a souvent revendiquée par la voix de son Président son attachement à une culture startups. Elle a aussi ouvert un espace d'accueil de ces jeunes et brillantes entreprises au cœur de Paris. L'enjeu majeur à mes yeux est de réussir à répondre aux besoins les plus urgents et massifs des jeunes entrepreneurs prêts à prendre des risques en France à condition qu'on les finance et qu'on les accompagne. Le vrai succès de la BPI c'est d'empêcher la fuite des talents, de nos pépites de demain. C'est en proposant un financement adéquat à ces jeunes porteurs de projets que nous les empêcherons de quitter notre pays. C'est aussi ce rôle de bouclier que je tiens à saluer au sujet de la BPI.

Qu'attend un entrepreneur qui débute en termes d'accompagnements financiers ? Dans quelles mesures la BPI apporte-t-elle son aide réellement ?

Quand la BPI permet de surmonter un besoin de trésorerie temporaire, elle apporte une aide réelle et incontestable. La BPI a notamment permis d'assainir la trésorerie de nombreuses entreprises, or c'est un facteur clé pour améliorer sensiblement la compétitivité des entreprises françaises.

L'entrepreneuriat peut sauver l'emploi. Le problème en France, c'est que les aides à la création d'entreprise existent, mais leur complexité rend l'aventure entrepreneuriale particulièrement périlleuse.

Tous les dispositifs de soutien à l'entrepreneuriat constituent un véritable mille-feuille illisible qu'il faut simplifier. Cette illisibilité des aides est d'ailleurs aggravée par le manque criant de coordination entre les acteurs qui prétendent soutenir l'entrepreneuriat.

Les créateurs nous ont d'ailleurs dit qu'ils se s'étaient vus proposés des aides aussi nombreuses que diverses avec autant de dossier à remplir et d'interlocuteurs à rencontrer. Comme si en tant que créateur, ils avaient tellement de temps à perdre...

Je le dis clairement, il appartient à nos gouvernants de simplifier sans attendre le parcours de l'entrepreneur parce que simplifier la création d'entreprise c'est simplifier la création d'emploi, encourager l'innovation et notre croissance !

Favorise-t-elle réellement l'innovation ?

En la finançant oui clairement ! Le manque de financement de l'innovation, c'est la principale cause du manque d'innovation dans notre pays. Ce que je souhaite à la BPI surtout c'est qu'elle réussite à financer l'innovation made in France.

En tant qu'entrepreneur, je suis frappé par une réalité : malgré l'agitation de nos gouvernants mettant en place les pôles de compétitivité, le crédit d'impôt recherche, etc..., notre effort de R&D n'a pas progressé depuis dix ans ! Mais, il y a pire car... non seulement il n'a pas progressé ... mais celui de nos voisins à l'image de l'Allemagne a progressé pour rejoindre le niveau des pays les plus innovants. Cela doit nous interroger.

Le livre blanc des startups que nous venons de réaliser confirme que le financement des start-up est un problème chronique en France. Toutes les start-up interrogées nous ont dit qu'elles avaient en effet facilement accès à un premier financement, de l'ordre de quelques dizaines de milliers d'euros. Mais c'est lorsqu'elles grandissent et qu'elles souhaitent franchir un cap qu'elles sont confrontées à une véritable pénurie de financement. Certaines se trouvent aujourd'hui directement menacées et c'est particulièrement dommage parce qu'elles portent de beaux projets dont la France ne devrait pas avoir à se priver.

Il y a en France une vraie panne de l'innovation. Une vraie panne de soutien aux startups qui se plaignent de ne pas trouver de financement.

Ajoutez à cela, l'action étatique désordonnée, un mille-feuille d'interlocuteurs pour ces startups et vous obtenez un handicap majeur pour notre croissance.

Il manque 3 milliards d'euros par an pour financer l'innovation de nos startups. Résultat, la France est incapable de créer de nouveaux champions sur la base des génies porteurs de projets qui sont les siens contrairement aux États-Unis... Quand allons-nous enfin comprendre que l'innovation, l'entrepreneuriat et l'emploi sont étroitement interdépendants ?

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