Perdus pour la France ? L'étude choc qui montre que les chômeurs de longue durée causés par la crise seront extrêmement difficiles à réinsérer<!-- --> | Atlantico.fr
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Photo d'illustration / Un bleu de travail d'un ouvrier au chômage en train de sécher.
Photo d'illustration / Un bleu de travail d'un ouvrier au chômage en train de sécher.
©Reuters

Dommages collatéraux

Selon le think tank Brookings Institute, 64 % des chômeurs américains "de longue durée" sont encore sans emploi 15 mois après être tombés dans cette catégorie. Et pourtant, la situation de l’emploi aux Etats-Unis est bien plus porteuse qu’en Europe.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Il y a des sujets d’étude dont on pourrait se passer. Ce que la « grande récession » apporte aux économistes en termes de records sur le front du chômage devient en effet une nouvelle source de données, utilisée ici par le Brookings Institute, think tank classé comme étant le plus influent au monde, afin d’analyser le chômage de longue durée. Et les résultats sont sans appel.

Les économistes Alan Krueger, Judd Cramer et David Cho, de l’Université de Princeton viennent de publier leurs travaux auprès du Brookings Institute : « Les chômeurs de longue durée sont-ils à la marge du marché de l’emploi ?». Les conclusions sont claires, la réponse est dans la question : Oui.

Les recherches menées par les auteurs permettent de dresser un tableau de la situation des chômeurs de plus de 6 mois. 15 mois après être « tombés » dans cette catégorie, 30% sont encore sans emploi mais cherchent toujours, 34% sont sans emploi mais ne cherchent plus et seuls 36% en ont trouvé un. Et pourtant, la situation de l’emploi aux Etats Unis est bien plus porteuse qu’en Europe. Il s’agit bien de rappeler que le taux de chômage actuel s’affiche un taux de 6.7%, contre 11.9% en Europe.

Le problème ne s’arrête pas là. En effet, parmi les 36% qui ont retrouvé un emploi, la situation ne s’améliore que relativement. Seuls 30% d’entre eux parviennent à retrouver un emploi à plein temps qui dure depuis au moins 4 mois. 39% d’entre eux sont dans cette même situation mais ont travaillé au moins 1 mois à temps partiel, et 30% n’ont été employés que pour une partie des 3 derniers mois.

Source Brookings Institute. (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)

« Même si les chômeurs de longue durée ont à peu près une chance sur dix de retrouver un emploi, lorsqu’ils retrouvent effectivement un emploi, celui-ci est souvent transitoire. Après 15 mois, les chômeurs de longue durée ont deux fois plus de chance de ne plus être comptabilisés dans la population active que d’être dans une situation d’emploi stable et à temps complet. »

Et lorsque la situation économique s’améliore « les chômeurs de longue durée sont souvent à la marge du marché de l’emploi, avec des perspectives moindres d’être employés et des taux relativement hauts de sortie de la population active. »

Voilà pourquoi la durée est si importante. Plus le chômage dure, plus la personne concernée perd de son « employabilité », chaque jour qui passe devient une perte. Avec le temps, les chômeurs de longue durée sortent des statistiques et viennent grossir les rangs de la population « inactive », sans que cela ne soit un choix. Pour ceux d’entre eux qui « persistent » à chercher un emploi, c’est l’ironie. En effet, les chômeurs de longue durée vont entrer dans la catégorie du « chômage structurel », c’est-à-dire qu’ils vont être traités comme étant inemployables. Et les efforts de politiques publiques ne seront faits que pour permettre de réduire le taux de chômage conjoncturel alors que pour le chômage structurel, la réponse donnée est « de toute façon, on ne peut plus rien faire ».

Les auteurs concluent en indiquant que le taux de chômage de longue durée ne répond simplement pas aux mêmes mécanismes que le taux de chômage de moins de 6 mois. Ce qui devrait se traduire par une prise en compte différenciée de ces deux groupes, et la mise en place de politiques spécifiques pour chaque segment concerné.

La situation en France

Si le marché de l’emploi américain a repris de la force depuis maintenant 3 ans, il en va tout autrement pour la situation de la France. En prenant en compte les statistiques fournies par la DARES, le nombre de chômeurs de longue durée (supérieure à six mois, dans le sens de l’étude du Brookings Institute) des catégories ABC atteint plus de trois millions de personnes, soit une progression de plus de 93% depuis juin 2008.

Chômeurs de plus de 6 mois des catégories ABC, en milliers en France. Source Dares (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)

Au-delà d’être incapable de trouver une solution au chômage conjoncturel, le gouvernement français va devoir faire face à ce nouveau défi. Car si les solutions sont connues pour résorber le chômage court (si le gouvernement prenait la peine de regarder ce qui passe en dehors des frontières européennes), les remèdes efficaces contre le chômage de longue durée sont bien plus incertains.

Pour lire le Hors-Série Atlantico, c'est ici : "France, encéphalogramme plat : Chronique d'une débâcle économique et politique"



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