Stéphane Guillon : nippon mais mauvais<!-- --> | Atlantico.fr
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Stéphane Guillon, clown blanc vêtu de noir.
Stéphane Guillon, clown blanc vêtu de noir.
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Rol TV

L'humoriste le plus controversé du PAF qui ironise sur le Japon : n'est pas Coluche qui veut...

Christian Rol

Christian Rol

Christian Rol est écrivain et journaliste.

Il tient pour Atlantico la rubrique "Rol TV" où il raconte l'actualité du petit écran.

Il est entre autres l'auteur du roman Les slips kangourou (Stéphane Million, mars 2011).

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J’attendais la chronique de Guillon chez Ardisson depuis une semaine ; depuis que le peuple japonais, digne et grand dans le malheur, est confronté à la conjonction des catastrophes. Je l’attendais parce que l’individu, s’il n’avait sacrifié à son registre « humoristique », m’aurait presque déçu.

Certes, depuis que la télévision s’est donnée pour mission de promouvoir tout ce que la France compte d’humoristes pas drôles, la logique voudrait qu’on se gondole d’une chaîne à l’autre, zappant un rire gras pour un humour marseillais, alternant la rigolade chti ou « communautaire » avec le dessous de la ceinture, l’absurde pour le terre-à-terre, etc. C’est le rôle du fusible « humour » destiné à alléger le flot de catastrophes, de guerres et de révolutions (que nul n’est obligé de s’infliger). Guillon, lui, a choisi le registre du rire abject.

Quand Guillon parle du Japon

Samedi 19 mars, vers 20h sur Banal +, Guillon était donc au rendez-vous. Juste après le zapping consacré presque entièrement au drame japonais. Il est arrivé sur le plateau, sourire en coin et œil malin, couvé par le regard protecteur de Thierry Ardisson, pousse-au-crime  amusé de la disgrâce programmée de son poulain. On se souviendra que « l’humoriste », dont le fond de commerce est de tirer sur les ambulances, sinon les corbillards, a, pendant des années, ironisé autour des vieillards morts lors de la canicule.

Dans un pays « normal », le mal élevé mal rasé aurait pris une bonne correction… Après les vieillards de la canicule et autres sujets du même acabit, Guillon ne pouvait pas ne pas se payer le Japon (en classe éco). Cela est fait depuis samedi 19 mars dernier où l’amuseur a débité toute la palette aigre des plaisanteries dégueulasses dont il est capable. Mais le cynisme, s’il s’appuyait encore sur une manière de finesse, ou le bonheur de formules, passerait-il peut-être. Manque de bol, Stéphane Guillon n’est pas Coluche. Pis, il voue à l’économie des moyens un culte qu’on lui reprochera d’autant plus qu’il avoue lui-même consacrer beaucoup de temps à « l’écriture ». Les rédacteurs de l’Almanach Vermot aussi…

La chronique du 19 mars de Stéphane Guillon dans Salut les Terriens !

Parmi les invités, une rescapée de Tchernobyl, Jean-Paul Gaultier, Olivier Poivre d’Arvor (l’homme au masque de frère) et une gonzesse promue potiche au CSA (NDLR : Christine Kelly).

On rit « jaune » (comme aurait pu dire Guillon) et, parfois aux éclats. Y compris la rescapée de Tchernobyl, tétanisée non pas par les radiations, mais par la dictature de la rigolade, du « second degré ». Le Poivre (à la fois suffisant et insuffisant), Gaultier et Miss Potiche CSA, disposés à lyncher, peu avant, un pédopsychiatre doutant de la pertinence de l’adoption d’enfants par les couples gays, sont soudain hilares devant le tombereau de provocations faciles, mal torchées, appuyées et surjouées par le pantin barbu aux velléités intellectuelles.

Du courage à être Stéphane Guillon

Ah ! Devant tant de mauvaise foi (la mienne, bien sûr), le bel esprit rétorquera « deuxième degré », « dénonciation par l’absurde », « sous-titres implicites ». Il pourra aussi répliquer « salles de spectacle pleines à craquer et gros chèque chez Ardisson contre scribouillard inconnu, aigri, jaloux ». Loi du marché et du plus grand nombre en quelque sorte. Néanmoins, pour nuancer cette charge, je dois admettre qu’il y a du courage à être Guillon (même si ce courage ne s’applique pas à la vraie subversion, consistant, par exemple, à dire que les méchants du film géostratégique hollywoodien ne sont ni Saddam Hussein, ni Milosevic, ni Kadhafi).

Son courage (qu’il a la franchise de ne pas revendiquer, au contraire !) est précisément de prêter le flanc à ce genre de critique, d’entretenir ce cynisme lourd, pesant, grimaçant (celui de notre époque), de passer pour une ordure bien payée et de s’enfoncer dans cette ornière comme dans un piège qu’il s’est lui-même tendu.

La complainte du clown blanc

Évidemment qu’on le sait que l’homme Guillon vaut mieux que l’homme public, grand cœur, plein d’enfants et femme aimante. Sa « méchanceté » est un rôle, etc. On connaît la complainte du clown blanc, du cynique aux grands principes qui souffre de la confusion entre son image et sa grande âme. Mais tant que la facilité présidera à sa « ligne éditoriale », Stéphane Guillon ne pourra pas décourager  les entreprises de démolition.

Et même si le respect qu’il inspire à son banquier lui importe davantage qu’une opinion isolée et « réac » sur le net, on ne doute pas qu’un tel écho saura trouver chez lui une résonance, fut-elle minime. Car, non mon pote, on ne peut pas rire de tout. Non, le pognon et la gloriole ne justifient pas tout…

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