Smart Reply : Google veut devenir votre secrétaire… et pourrait bien y parvenir rapidement <!-- --> | Atlantico.fr
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Google va devenir votre secrétaire grâce à Smart Reply.
Google va devenir votre secrétaire grâce à Smart Reply.
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Serguey, un café s’il vous plaît

Avec son dernier outil, proposé pour le moment uniquement en anglais, Google enrichit sa palette de services pour faciliter la vie sur le web. Smart Reply proposera des réponses aux mails simples, et la firme de Mountain View détient le potentiel pour développer d'autres tâches jusqu'ici réalisées par un assistant, comme l'organisation d'agenda.

Yvon Moysan

Yvon Moysan

Yvon Moysan est diplômé de Harvard et de l’ESSEC. Il est Lecturer de Digital Marketing et Directeur Académique du Master en Apprentissage Digital Marketing et Innovation à l’IESEG School of Management. Ses travaux de recherche académique s’articulent autour du Digital et notamment des objets connectés. Il est, dans ce cadre, membre de la chaire Digital Banking et Big Data du Crédit Agricole Nord de France. Il est par ailleurs Président fondateur de Saint Germain Consulting, cabinet de conseil en Digital Marketing spécialisé dans les secteurs Banque, Assurance et Retail. Il a occupé précédemment différents postes de management en Digital Marketing au sein de banques ou assurances internationales (Siège mondial AXA, HSBC France, BNP PARIBAS – Banque Directe). Il intervient régulièrement en France comme à l’étranger comme public speaker dans différentes conférences professionnelles ou académiques (In Banque, Mobile Shopping Europe, EFMA, CCM Benchmark etc.). Il publie également dans différentes revues professionnelles (Revue Banque, Banque et Stratégie). Ses publications sont accessibles ici.
 

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Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah est écrivain et journaliste, spécialisé dans les jeux vidéo, les nouvelles technologiques, la musique et la production musicale.

Il est l'auteur de nombreux best-sellers tels que La Saga des jeux vidéos, Les 4 vies de Steve Jobs, Rock Vibrations, Le Livre de la Bonne Humeur, Bill Gates et la saga de Microsoft, etc. Daniel Ichbiah a aussi écrit : Qui es-tu ChatGPT ?

Parmi les biographies musicales écrites par l’auteur figurent celles du groupe Téléphone, de Michael Jackson, des Beatles, d’Elvis Presley, de Madonna (il a également publié Les chansons de Madonna), des Rolling Stones, etc. 

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Google est l'entreprise qui développe le plus l'intelligence artificielle, en tout cas celle qui fait le plus de bruit. Elle a annoncé avoir mis au point une technologie qui répondrait à nos mails automatiquement. Cela est-il possible ? Comment cela fonctionnerait il ? Google pourrait-il répondre à absolument tous nos emails ?

Daniel Ichbiah : Oui, depuis quelques années, les efforts de Google portent sur une Intelligence Artificielle capable de comprendre à la fois les requêtes de l’utilisateur et les pages Web. Une importante mise à jour a eu lieu à partir de 2012 pour ce qui est du PageRank (l’indice des pages Web). Auparavant, c’était avant tout le nombre de liens vers une page qui importait. Aujourd’hui, la ‘qualité’ d’information de la page compte tout autant. Et pour cela, Google a recours à une IA très sophistiquée.

C’est cette recherche en IA qui est aujourd’hui appliquée à Gmail avec Smart Reply. Elle est limitée et le sera toujours.

En premier lieu, il s’agit d’un service que l’utilisateur doit activer lui-même, il n’est pas actif par défaut.

Deuxièmement, avec ce service (SmartReply) Gmail ne répond pas automatiquement à la place de l’utilisateur. Ce qu’il fait, sur certains messages assez simple, c’est de proposer des réponses types – l’utilisateur peut alors en choisir une. C’est donc avant tout une façon de gagner du temps.

La fonction de réponse automatique, soit dit en passant, elle existe depuis fort longtemps sur Gmail, essentiellement pour informer des correspondants que l’on a pas accès à sa messagerie. Elle ne relève pas de l’Intelligence Artificielle.

Yvon Moysan : InBox, la messagerie de Gmaildédiée aux internautes qui n’ont que peu de temps, utilise en effetdésormais l’intelligence artificielle et plus précisément le Machinelearning. Concrètement, alors qu’elle était déjà capable de regrouper les messages similaires (factures) oude compléter des mémos rédigés trop rapidement, InBoxva maintenant pouvoir répondre à votre place, mais avec votre accord, via un dispositif de suggestion de réponses appelé Smart Replyqui analyse les emails reçus et propose, selon le contenu, trois réponses possibles. Pour l'utilisateur, il suffira alors d’en valider une pour répondre en une seconde.A ce stade, l’outil se contente de suggérer des réponses courtes, comme "j'y travaille", "je serai là" ou encore "je vous l'envoie". Mais, à mesure qu'il sera utilisé,il va progresser tant par l'analyse des réponses choisies que par celle des réponses laissées de côté.

Pour ce qui concerne les prochaines étapes, on peut légitimement penser qu’il pourra rapidement proposer des réponses plus complexes que l’utilisateur pourra compléter si besoin. A terme, on pourrait même imaginer une réponse automatique, sans action humaine donc, lorsque le mail de l’expéditeur s’y prêtera. A titre d’exemple, à la question « où es-tu ? » ou « dans combien de temps arrives-tu ? », une réponse automatique pourrait être envoyée prenant en considération la géolocalisation de l’utilisateur.

On pourrait également imaginer que Smart Reply aille plus loin dans l’analyse du contenu et agisse en conséquencecomme un assistant physique le ferait. Exemple concret, il pourrait déduire d’un e-mail que la planification d’une réunion vient d’être acceptée et en conséquence l’ajouter automatiquement à votre calendrier. Si cette réunion est à l’heure du déjeuner, il pourrait également réserver un restaurant en tenant compte de vos préférences et des commentaires des précédents clientsou si cette réunion nécessite un déplacement vous programmer un taxi voir commander un billet de train ou d’avion le tout au meilleur tarif ! Mais nous n’en sommes pas encore là… à ce stade.

L'intelligence artificielle peut-elle réellement nous faciliter la vie ? Quel est l'intérêt véritable d'une telle technologie ? Est-ce simplement de la com ? Quel est le public visé ?

Tout ce qui peut faire gagner du temps est bon à prendre. Or, pour certains types de messages, on peut ne pas avoir envie de rédiger un long texte. Je prends un exemple. Le magazine dont je suis rédacteur en chef (Comment ça marche) reçoit énormément de demandes de stages. Je verrais d’un bon œil d’avoir une réponse du type ‘Désolé, nous n’avons pas de stage disponible aux dates indiquées’ et d’avoir juste à cliquer sur Envoi. Ou encore, il y a des gens qui demandent comment récupérer un ancien numéro. Si Gmail peut analyser ce type de message et répondre : ‘voici l’adresse du service abonnements’, là encore, je gagnerais beaucoup de temps. Pour certains communiqués de presse, je serais ravi d’avoir une réponse proposée par Google indiquant : ‘désolé, ce sujet n’est pas couvert par le magazine. Merci de me désabonner’. Chacun pourra penser à des exemples propres à sa propre activité. Donc, autant le dire, c’est extrêmement utile, car je suis sûr que nous sommes très nombreux à perdre 5 à 10 minutes à traiter ce type de messages. Hélas, pour l’instant, le service SmartReply n’est disponible que dans les pays anglo-saxons.

Yvon Moysan : Selon le Machine Intelligence Research Institute, près de 10% de la recherche en informatique est désormais investi dans l’intelligence artificielle et Google est l’une des entreprises qui investit massivement sur le sujet tant en terme de technologie que de compétences humaines. Même si Google reste discret sur les montants globaux investis, on peut citer en terme de compétences humainesle cas de Google Allemagne qui a suffisamment investi en 2015pour pouvoir disposer d’un siège au Conseil d’administration du Centre de Recherche Allemand pour l’Intelligence Artificielle (DFKI)qui regroupe 450 scientifiques etdispose d’un budget de 46 millions de dollars.En terme d’investissements technologiques cette fois, on peut citer l’acquisition ou l’investissement dans des startups spécialisées dans l’Intelligence Artificielle comme DeepMindau Royaume Uni en 2014 pour plus de 500 millions de dollars ou plus récemment Mobvoi à Pékin pour 300 millions de dollars.

Pour Google, avec Gmail, Youtube ou encore Google Now, cela se justifie car les champs de recherche et d’applications sont en effetimmenses !

Quels sont les dangers liés à la mise au point d'une telle intelligence artificielle ? Quelles peuvent être les dérives ? Google risque-t-il de répondre à spam qui pourrait être nuisible ?

Il n’y a pas de danger dans la mesure où l’accès à ce service est librement choisi. Et les ingénieurs de Google sont des gens brillants donc on peut s’attendre à un service de qualité. Enfin, je le rappelle, Google propose des réponses mais il ne les envoie pas automatiquement. C’est l’utilisateur qui doit valider l’envoi. Le seul danger surviendrait dans le cas où l’on est très pressé, et on envoie une réponse inadéquate.

Les données personnelles représentent un enjeu de plus en plus important. La collecte de celles-ci peut nous faciliter certaines choses mais également représenter une menace. D'autres géants tels que Facebook ou Apple entendent ils en tirer profit de la même façon que Google pour développer de nouvelles formes d'intelligence artificielle ?

La nouvelle donne pour le Web, c’est l’Intelligence Artificielle. Tenter de comprendre au  mieux le besoin d’un utilisateur. L’internaute, par essence, peut être enclin  à changer de service s’il trouve mieux ailleurs puisque la plupart des services du Web sont gratuits. Les grands noms comme Google, Facebook, Amazon et autres sont donc condamnés à innover en permanence. Utiliser l’Intellighence Artificielle pour servir au mieux l’utilisateur fait partie de leur arsenal.

Pour ce qui est des données personnelles, c’est un autre débat, un débat qui a pris toute sa teneur en juin 2013 avec les révélations d’Edward Snowden comme quoi les géants du Web ménageaient alors une ouverture de leurs données vers les agences de renseignement des USA. A priori, ces géants du Web auraient pris des mesures pour fortement limiter cet accès, mais comment pouvons-nous en être sûr.

L’anomalie, c’est que, dans les premiers temps de l’informatique, on craignait que les gouvernements ne stockent trop de données sur les citoyens et donc, un grand nombre de lois ont été votées pour nous protéger des fichiers gouvernementaux. Personne n’avait imaginé que des sociétés privées comme Google pourraient un jour détenir autant de données sur un individu.

A l’heure actuelle, n’importe qui peut contacter l’Etat français et demander à connaître les informations qu’ils détiennent à notre sujet et demander pour certaines à ce qu’on les corrige. Ce n’est généralement pas possible a priori avec les géants du Web du fait qu’ils sont basés aux USA – en réalité, c’est possible dans une certaine mesure du fait de certaines lois européennes, mais jusqu’en 2013 seul un spécialiste des lois avait les connaissances suffisantes pour entamer une telle procédure. Depuis avril 2014, c’est un peu mieux, la Commission Européenne a posé la règle du droit à l’oubli et un grand nombre de pages préjudiciables à certaines personnes ont pu être retirées.

Cette évolution du droit européen est bénéfique, car il y a deux ans nous avions fait un essai avec Yahoo ! (mon magazine menait une enquête sur le sujet des données personnelles), et la réponse obtenue avait été un modèle de réponse anonyme et méprisante indiquant que non, ils ne feraient rien. J’ignore si les choses ont changé chez Yahoo ! mais en tout cas, ils sont maintenant basés en Irlande ce qui ne doit pas forcément faciliter les choses.

En tout cas, il faudrait idéalement que des lois soient votées au niveau national pour exiger que les géants du Web soient obligés de se soumettre à la volonté des internautes du pays où le service est fourni. Mais nous en sommes loin.

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