Quand les heures font leur cinéma et quand les épinards s’en mêlent : c’est l’actualité novembriste des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Au poignet d’un des vainqueurs possibles de la prochaine Route du Rhum (Herbelin)…
Au poignet d’un des vainqueurs possibles de la prochaine Route du Rhum (Herbelin)…
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Atlantic-Tac

Mais aussi le charme désuet du néo-vintage, les lumières d’un chronographe féminin, le GPS d’un chronographe enrhumé, le titane des grandes profondeurs et les violons de l’automne horloger…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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FRANCK MULLER : Des épinards au menu…

La spécialité londonienne du sympathique George Bamford (Bamford Watch Department) reste le détournement malicieux et créatif d’icônes contemporaines au service des grandes marques. Il a longtemps sévi dans la Rolex, mais il s’est fait taper sur les doigts pour ce crime contre la « couronne » et il préfère désormais œuvrer en connivence avec les marques qui ont assez d’audace pour jongler avec leurs propres codes identitaires. Témoin cette Franck Muller Vanguard en titane (il existe une version plus opulente en or rose) revue et corrigée en mode Popeye – chacun sait que le fameux marin mangeur d’épinards porte bonheur ! Ici, il indique les heures et les minutes avec ses musculeux bras tatoués – c’est dire si c’est une bête de mode. L’aiguille des secondes est personnifiée par Swee’Pea, l’impossible fils de Popeye et d’Olive. Détail intéressant : cette montre porte une attention toute particulière aux détails qui racontent une véritable histoire de collaboration entre Bamford Watch Department et Franck Muller. L’écrin comprend une bande dessinée originale racontant les voyages de Popeye à Londres et à Genève, créé exclusivement pour célébrer la collaboration par le dessinateur Randy Millholland ! Comptez dans les 15 000 euros pour ce menu épinards en titane et dans les 25 000 euros pour la dégustation en or rose. Au passage, on aura noté que la maison Franck Muller semble s’arracher à l’engourdissement créatif qui était le sien auprès du grand public européen : le non-conformisme de collaborations aussi amusantes qu’inattendues donne une idée de l’immense potentiel esthétique d’une marque qui ne demande qu’à redevenir furieusement tendance…

RALPH LAUREN : Le charme désuet du vintage modernisé…

« Puisque ces mystères me dépassent, feignons d’en être les organisateurs » : comme pour paraphraser Jean Cocteau, la maison horlogère Ralph Lauren, qui n’a jamais été lancée qu’en 2008 et qui aurait du mal à se prévaloir d’une légitimité bien consistante dans le vintage, préfère prendre les devants et produire sa propre Polo Vintage 67, qui compile avec bonheur à peu près tous les codes des montres de l’âge d’or. À savoir : un boîtier rond dans une taille sans emphase inutile (40 mm) et sans épaisseur disgracieuse, une couronne de remontage arrondie qui évoque celles des « oignons » horlogers du XIXe siècle, un cadran argenté opalin et ivoiré pour ne pas faire trop neuf clinquant, une « petite seconde » à six heures dans un compteur délicatement nervuré, des aiguilles lancéolées et des chiffres arabes à l’ancienne dans une laque noire dont on regrettera que le brillant n’ait pas été atténué. Pour ceux qui auraient un doute sur la marque, le « Polo » du cadran est une affirmation identitaire tonitruante. Avec son mouvement automatique très contemporain par ses performances (90 heures de réserve de marche, soit presque quatre jours sans remonter la montre) et visible au fond du boîtier, on reste dans les meilleurs standards de ce qui se fait de mieux en Suisse, sans pour autant verser dans la propension suisse à surtarifer la moindre montre un peu désirable (comptez un peu moins de 2 500 euros dans les boutiques Ralph Lauren). Une montre élégante et facile à porter au quotidien, au bureau comme en week-end.

PATEK PHILIPPE : Trois bracelets pour 102 pierres…

Tous les experts vous diront que la collection Aquanaut, que la manufacture Patek Philippe a dédié à l’hyper-sport chic, est une des plus spéculatives du moment. Réputation pas très chic, qui n’a cependant rien qui puisse émouvoir Patek Philippe, qui n’en poursuit pas moins la consolidation de son offre pour les femmes en créant, dans un boîtier Nautilus, le premier chronographe automatique de la marque en mode féminin. Pour cette Aquanaut Luce [en effet, avec les pierres dont elle est sertie, elle accroche bien la lumière !] qui va chercher dans de respectables 39,9 mm d’or rose, Patek Philippe n’a pas hésité à employer les grands moyens : 40 saphirs multicolores et 40 diamants baguette pour l’effet arc-en-ciel de la lunette en « serti invisible », 12 saphirs multicolores pour les index du cadran et 10 diamants pour le fermoir du bracelet, ce qui va chercher dans la grosse centaine de pierres (2,62 ct pour les saphirs et 2,41 ct pour les diamants). 9a, c’est pour le côté chic. Pour le code sportif, on se contentera du bracelet en composite : Patek Philippe vous en offre trois, en rouge, en blanc et en beige. Le mouvement chronographe avec « retour en vol » [flyback pour les initiés, c’est-à-dire retour à zéro instantané] est ce qu’il se fait de mieux chez Patek Philippe, qui réaffirme avec cette Aquanaut Luce particulièrement cossue son attachement à la grande horlogerie précieuse et technique. Le prix devrait se hisser au niveau des 200 000 euros, mais les experts dont nous parlions vous expliqueront que c’est une bonne affaire, parce que genre d’Aquanaut Luce, difficile à trouver en boutique, est très prisé sur le marché secondaire et se revend donc très bien avec une confortable plus-value…

HERBELIN : Poignet en jaune…

C’est au poignet d’Aurélien Ducroz (champion du monde de Class40) que la maison horlogère indépendante française Herbelin va prendre le départ de la prochaine Route du Rhum 2022, ce 6 novembre, à Saint-Malo. À la barre de son Class40, Aurélien Ducroz portera le nouveau chronographe automatique « poids plume » Newport Carbone Titane. Une montre sérieusement « musclée » (46,5 mm) en carbone forgé, étanche à 300 m, qui a été enrichi d’une fonction de compte à rebours spécialement adapté aux départs de régates, avec les trois zones des cinq minutes réglementaires avant le départ sur le compteur à midi. On note aussi le bracelet en élastomère FKM jaune (Pantone 809C), qui est la couleur très précise et très reconnaissable du bateau d’Aurélien Ducroz – on retrouve d’autres touches de ce jaune emblématique sur la montre. On remarque enfin, sur les compteurs du chronographe, les coordonnées GPS du point de départ à Saint-Malo (à midi) et de la ligne d’arrivée à Pointe-à-Pitre (à six heures). Entre les deux, 6 562 kilomètres de course et les 138 marins engagés pour cette douzième édition. Dommage qu’une montre aussi française dans son fier caractère « Automatique » se permette d’afficher non seulement le jour de la semaine en anglais (« Fri » pour Friday à gauche de la date), mais aussi une mention du « carbon » pour le matériau [le « e » n’aurait pas coûté bien cher !] et du « start » pour le départ, mais surtout un encore plus bizarre Regate Timer pour signaler les fonctions nautiques de cette Newport – en anglais, ça se dit regatta, et on l’écrit avec un accent aigu en français…

JACOB & CO : Mi-la-do-si-la-do-la-si…

Tenez-vous bien : c’est une montre qui donne l’heure, qui sonne aussi l’heure d’une sacrée séance de cinéma et de commémoration mémorielle. C’est même, à vrai dire, une montre qui ne ressemble à aucune autre montre – tout simplement parce qu’il fallait s’appeler Jacob & Co pour oser mettre en scène un tel grand spectacle horloger. On ne va pas revenir sur la saga de Jacob & Co, la marque de joaillerie new-yorkaise qui a inventé le bling-bling à la fin du XXe siècle et à laquelle Jacob Arabo, son fondateur, a su donner de surprenantes lettres de noblesse horlogère. Une des constantes de Jacob & Co a toujours été la fidélité aux messages « culturels » de l’Amérique profonde, dans ses rêves les plus fous comme dans ses obsessions esthétiques. Au premier rang de ces mythes, le film Le Parrain de Francis Ford Coppola, sorti en salle il y a exactement cinquante ans cette année. La montre Opera Godfather 50e anniversaire est un hommage très sérieusement extravagant à cette légende d’Hollywood qui a impressionné le monde entier. Qu’on se souvienne ici des premiers mots de la bande-son, avec la voix rauque de Marlon Brando, alors que l’écran est resté noir : « Je crois en l’Amérique » – Credo in unum Americam ! Tout autour du boîtier en or blanc de 49 mm [20 mm d’épaisseur : poignets de poulet, s’abstenir !], gravées au femtolaser par un procédé magique que toutes les marques vont s’empresser de copier, treize des principales scènes du Parrain. Sur le cadran (si tant est qu’on puisse parler ainsi de ce qui se trouve sous le dôme en verre saphir de la montre), on trouve également les répliques « culte » du film. Au centre, l’emblématique rose rouge du Parrain, entre deux barillets musicaux en or qui jouent la ritournelle que tout le monde a en tête [mi-la-do-si-la-do-la-si] et quelques autres thèmes, le tout sur deux précieux « pianos » – en tout, 256 notes s’égrènent dans une des montres les plus musicalement sonores de toute l’horlogerie contemporaine (poussoir de déclenchement à dix heures). Ah oui, au fait, cette montre donne également l’heure, avec une précision enforcée par le « tourbillon » qui tourne sur trois axes à trois rythmes différents et dont les 97 composants ne pèsent que 1,79 g ! Le mouvement, qui compte 658 composants, se remonte grâce à la manivelle en forme de violon logée sur le côté de la montre. Si le cœur vous en dit, il n’y aura que cinquante montres pour célébrer avec cette débauche de symboles le cinquantième anniversaire du Parrain et cela vous coûtera à peu près 500 000 euros, malheureusement hors taxes. Les grands mythes hollywoodiens sont hors de prix cette année…

EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE LIBERTÉ : c’est toujours bon à savoir…

•••• AUTOMNE 2022 : le village des montres et de la joaillerie entre en ébullition cette semaine. Au programme : l’ouverture de plusieurs salons, notamment Re-Luxury à Genève (salon consacré au marché « secondaire » et à la « re-attitude » qui rend le luxe particulièrement « circulaire ») ; la proclamation à Paris des « montres de l’année » à Paris, désignées par les internautes dans un concours organisé par le site MyWatch ; l’annonce très attendue du palmarès 2022 du Grand Prix d’horlogerie de Genève (les « Oscars de la montre », attribués le 10 novembre à Genève par le jury du GPHG) – 90 montres sont en compétition pour la finale ; les sessions genevoises de ventes aux enchères pour les montres de collection, avec l’annonce prévisible de nombreux records du monde d’adjudication ; on peut même compter dans cette mise en tension le départ d’une Route du Rhum très horlogère (6 novembre : voir ci-dessus). Bref, un cœur d’automne très chargé pour les amateurs de belles mécaniques – ceci alors que de multiples craquements se font entendre sur les marchés les plus porteurs pour les montres neuves… •••• ROLEX : le lancement d’une nouvelle montre en fin d’année par la maison Rolex relève de l’exceptionnel, même si cette montre n’est pas tout-à-fait un nouveau modèle. En fait, la nouvelle Deepsea Challenge est inspirée par la montre expérimentale qui avait accompagné le réalisateur James Cameron dans sa descente historique du 26 mars 2012 à – 10 908 mètres dans la fosse des Mariannes de l’océan Pacifique. La nouvelle Deepsea Challenge de série est étanche à 11 000 m, mais, surtout, elle est en titane : c’est la première montre en titane mise en production courante par Rolex. Dotée d’un mouvement automatique (70 heures de réserve de marche) et d’une valve à hélium, c’est un « instrument » très professionnel testé en caisson à l’équivalent en pression de 13 750 m de profondeur : on peut considérer cette Oyster Perpetual Deepsea Challenge comme la montre mécanique la plus étanche jamais imaginée par une marque d’horlogerie (ci-dessous). Un seul chiffre pour illustrer cette résistance : la seule glace de la Deepsea Challenge encaisse aux profondeurs testées une pression de l’ordre de quinze à dix-sept tonnes ! Attention, son épaisseur batyscaphesque la réserve à un usage beaucoup plus « professionnel » que récréatif en milieu urbain…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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