Quand le verre se teinte de rouge et quand le vert ne rougit plus de ses clous : c’est l’actualité ante-automnale des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Une Pelagos 39 qui a tout juste en cochant toutes les bonnes cases (Tudor)…
Une Pelagos 39 qui a tout juste en cochant toutes les bonnes cases (Tudor)…
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Atlantic-Tac

Mais aussi la finesse intelligente d’une proposition en titane, le costume très sérieux d’une manufacture francilienne, la maturité d’une icône précisément vintage, quelques nuages à l’horizon et l’ultra-radicalité d’une montre connectée…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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B.R.M : Un costume de respectabilité…

La manufacture francilienne B.R.M (Bernard Richard Manufacture) n’a jamais eu la main légère dans le maniement des couleurs : jusqu’ici, les collections ont toujours témoigné d’un goût très vif pour l’utilisation intensive d’une palette effectivement très vive ! Voici cependant qu’on quitte le style Jackson Pollock (le père du dripping) pour une tenue plus austère, monochrome dans le goût noir total, à la limite du calvinisme horloger. La lunette, le boîtier (en forme de disque de frein), les cornes, le bracelet, la boucle et la plupart des composants visibles du cadran ou du mouvement sont intensément noircis, qu’ils soient en acier ou en inox, l’alcantara noir à coutures noires du bracelet n’étant pas une des moindres séductions de cette montre automatique DDF6-46-N-SQ-An [quel concept facilement mémorisable !] qui, comme son nom l’indique, fait tout de même 46 mm de diamètre, avec une étanchéité à 100 m. Le grand chic tout noir pour cette B.R.M qui semble avoir enfilé un costume de respectabilité, c’est aussi son prix (dans les 6 000 euros), parfaitement justifié pour la qualité générale de cette proposition janséniste et pour une montre à peu près totalement « manufacture ». Noir, c’est noir ? Peut-être, mais B.R.M (entreprise du matrimoine vivant) nous démontre qu’on peut choisir le noir pour mieux dynamiser son poignet…

TUDOR : Titane mat et céramique satinée…

Le récent parcours horloger de la maison Tudor (groupe Rolex) a de quoi impressionner par la pertinence des choix de la marque et par la réussite sans fautes des montres qu’elle met à la disposition d’une communauté grandissante d’amateurs. Le rapport qualité-prix de Tudor est incomparable, avec cet atout supplémentaire de pouvoir disposer de références relativement disponibles en boutique, en tout cas plus rapidement que pour bien des icônes du marché. Témoin de cette embellie, la nouvelle Pelagos 39, qui réussit l’exploit d’être à la fois une montre de plongée parfaitement opérationnelle et une montre à porter en ville pour une indéniable touche « sport chic ». On remarque tout de suite que la taille a été revue à la baisse (39 mm, c’est portable par les garçons comme par les filles) et que la montre et son bracelet sont en titane, donc que l’ensemble est plus léger qu’une « plongeuse » classique en acier qui serait également étanche à 200 m. Atouts supplémentaires de cette Pelagos 39 : une lunette en céramique noire satinée su laquelle le composé luminescent des repères se détache très lisiblement, un cadran noir mat dont la luminescence est renforcée dans la pénombre [on y remarque le « Pelagos » écrit en rouge, comme sur le cadran de certaines des Rolex Submariner les plus recherchées], la mise à disposition de deux bracelets (un très confortable bracelet à maillons de titane, avec le renfort supplémentaire d’un bracelet en caoutchouc) et un mouvement « manufacture » doté de 70 heures de réserve de marche. Le tout pour un peu plus de 4 000 euros, ce qui tient presque de la philanthropie pour une montre de cette classe, à peu près sans défaut [tout au plus peut-on se demander pourquoi du titane grade 2, et pas d’un grade supérieur], qui semble déjà attiser toutes les convoitises. En ce moment, c’est sur Tudor qu’il faut investir : un bon conseil à nos lecteurs, courez vite réserver votre Pelagos 39 avant qu’elle ne soit plus disponible qu’au prix de longues listes d’attente !

LOUIS VUITTON : La maturité d’une icône post-moderne…

Chez Louis Vuitton, la collection Tambour, lancée en 2002, est une icône secrète du XXIe siècle horloger : quoiqu’elle ne soit pas reconnue à la juste valeur de ses mérites, on la reconnaît visuellement bien plus qu’on ne la connaît vraiment, mais cette Tambour, dans ses différentes déclinaisons, a su se tailler une place à part dans le paysage horloger. La Tambour, ainsi nommée à cause de son boîtier en « chaudron », souffle cette année ses vingt bougies : le miracle, c’est qu’elle n’a pas vieilli [ce qui prouve la force intérieure de son concept graphique, dû à l’excellence des designers français Ludovic Blanquer et Michel Berra] et qu’elle a su rester très avant-gardiste. Très étonnant aussi, le fait qu’elle n’ait guère été copiée ou, du moins, qu’elle n’ait pas « inspiré » d’autres marques horlogères – qui n’ont sans doute pas vu venir Louis Vuitton comme un sérieux concurrent dans la montre ou qui n’ont pas compris la puissance de ce design. La Tambour s’offre pour son vingtième anniversaire une édition qu’on pourrait qualifier de « récapitulative » tellement cette Tambour Twenty semble compiler tous les marqueurs identitaires de la collection, à commencer par le boîtier en « cuvette » galbée [on reste dans un 41,5 mm très raisonnable] qui est gravé des douze lettres du nom « Louis Vuitton » et dont les « cornes » sont rapportées, avec les couleurs emblématiques et presque génétiques de la marque (le brun soleillé et le jaune : notez le « twenty » jaune sur le compteur des heures du chronographe, à six heures). Pas de monogramme, pas de logo, un sobriété chic et un mouvement mécanique de haute lignée, celui du chronographe Zenith El Primero, précis au dixième de seconde. Un seul regret pour les amateurs : cette Twenty qui condense en mode post-moderne vingt années d’horlogerie chez Louis Vuitton n’est éditée qu’à 200 exemplaires, qui seront facturé 14 000 euros – comme il y a sur cette planète près de 500 boutiques Louis Vuitton dans à peu près 80 pays, on imagine la frustration de bon nombre d’amateurs ! Parce que c’est là que se joue désormais la partie : Louis Vuitton a tenu à rappeler, avec cette Twenty de son vingtième anniversaire, qu’il faut désormais compter la marque parmi les grands noms de l’horlogerie contemporaine – icône oblige !

ARTYA : Une biomécanique récréative…

Cette chronique Atlantic-Tac vous parle souvent d’Yvan Arpa, un des plus éruptifs des créatifs de la jeune horlogerie suisse, dans un registre mécanique comme dans des gammes plus artistiques : ArtyA, c’est « Art YA » (ses initiales). Ce créatif a même réussi ce que les plus grandes marques n’ont pas su mettre au point : la mise en couleur de ce « verre saphir » (synthétique) dont les horlogers branchés n’ont plus qu’une seule idée – y tailler des boîtiers. Yvan Arpa utilise des « oxydes » métalliques naturels comparables à ceux qui colorent les pierres précieuses pour donner à ses boîtiers des irisations qui les font changer de couleur selon les jeux de lumière. C’est sensationnel [ça donne des sensations fortes !], tout comme demeurent visuellement très spectaculaires ses lunettes en verre saphir synthétique colorisé : sur une plongeuse« récréative » au boîtier « vitré » et au cadran aventuriné comme sa Diver Crystal, l’effet est saisissant ! La lumière qui s’infiltre partout donne à cette montre automatique un nouveau relief au poignet, et presque un faux air de méduse biomécanique : ce n’est plus tout-à-fait une montre de plongée (quoiqu’elle soit étanche à 100 m et que cette lunette tournante soit parfaitement fonctionnelle), c’est bien plus une œuvre d’art photochromatique de nouvelle génération. Cet avant-gardisme néo-classique se paie au prix fort [comptez dans les 35 000 euros pour cette ArtyA Diver Crystal : c’est nettement moins « récréatif » !], mais quelle « gueule » au poignet et que de commentaires de la part de ceux qui découvrent cette lunette rouge et ce verre saphir où joue la lumière…

GIRARD-PERREGAUX : L’an vert du décor…

On l’a dit et redit : sur les cadrans de nos montres, le vert est, cette année, le nouveau bleu, qui était lui-même le nouveau noir des années précédentes. Les vagues chromatiques déferlent inlassablement comme les rouleaux sur les plages de l’Atlantique : les houles horlogères sont puissantes et désormais aussi saisonnières que la canicule. La superbe Laureato de Girard-Perregaux, qu’on a déjà connu en bleu, en argent ou en blanc, et même en vert, dans une version soleillée, méritait bien cet hommage post-estival, qui nous aidera à oublier que les feuilles desséchées des grands arbres volent désormais dans les vents de l’automne. Forte de ses 42 mm qui respectent inégralement les codes du « sport chic » contemporain (boîtier en acier et bracelet métallique intégré, géométrie subtile à tendance polygonale, cadran à « tapisserie » aux « clous de Paris » colorisés, lisibilité tout-terrain, etc.), la montre est automatique, mais l’allure est intacte et la substance horlogère de la montre très porteuse de sens : on se sent un peu différent avec cette « fée verte » au poignet (comptez tout de même dans les 14 000 euros pour déguster ce plaisir existentiel)… Ah, que serait Girard-Perregaux sans la Laureato, en vert et contre tout ?

EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE LIBERTÉ : ce qu’il faut retenir…

•••• APPLE WATCH ULTRA : les ultras de la montre s’insurgeront qu’on puisse parler de montre à propos de la Apple Watch Ultra, mais autant regarder le réel en face. Non seulement cette nouvelle Ultra est une montre connectée qu’on accroche à son poignet [c’est en cela qu’elle concurrence n’importe quelle marque suisse, dont elle prend la place], mais c’est aussi un clou supplémentaire dans le cercueil de l’horlogerie suisse accessible, puisque cette montre de sport ultime (ci-dessous) se révèle être la réponse connectée aux montres « sport chic » qui assurent la croissance de l’horlogerie traditionnelle. On peut tout faire, ou presque (sur terre comme sous les mers), avec cette Apple Watch Ultra en titane, qui est la plus endurante, mais aussi la plus fonctionnelle et polyvalente de toutes les montres connectées d’Apple, qui nous promet même une autonomie [les horlogers diraient réserve de marche] de 60 heures, soit bien plus que la plupart des montres mécaniques ! La boussole est remarquable. Les applications de santé sont très avancées, les premières commandes aussi (comptez dans les 850 euros). La concurrence connectée se fait impitoyable pour les montres classiques… •••• GENEVA WATCH DAYS : on a éteint les projecteurs et les palaces du bord du lac de Genève ont retrouvé leur bourgeoise quiétude. Les Geneva Watch Days, qui sonnent désormais la rentrée des classes pour l’horlogerie, viennent de se terminer sur une fantastique note d’optimisme. Tout s’est très bien vendu, avec des carnets de commande pleins jusqu’à l’année prochaine pour les montres les plus attrayantes – et elles l’étaient quasiment toutes, la cinquantaine de marques mobilisées autour de cet événement ayant visiblement fait des efforts pour se mettre à l’écoute des amateurs t des collectionneurs. On reparlera de toutes ces nouveautés dans nos prochaines chroniques Atlantic-Tic, mais il faut noter un grand absent lors de ces Geneva Watch Days : la visibilité managériale, économique et stratégique de ces six prochains mois et l’impact d’un hiver qui s’annonce, pour les Européens, d’une rudesse particulière sur le plan énergétique et géopolitique. D’où l’impression de danser sur un volcan, en murmurant : « Encore un instant de bonheur, Monsieur le bourreau ». Pas sûr que Vladimir Vladimirovitch Poutine ait l’oreille assez fine pour entendre les horlogers suisses…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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