Quand le delta ne veut pas tourner rond et quand le zèbre pointe l’oreille : c’est l’actualité des montres en mode ventôse<!-- --> | Atlantico.fr
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Le vert des grandes prairies sous-marines de la Méditerranée (Jacques Bianchi).
Le vert des grandes prairies sous-marines de la Méditerranée (Jacques Bianchi).
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Atlantic-Tac

Mais aussi une preuve de la créativité indépendante française, un Grand prix au bon prix, une imparable recette italienne, une plongeuse très urbaine et un salon à ne pas manquer…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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VULCAIN : Néo-vintagement vôtre…

C’est l’histoire d’une montre classique qui rend hommage à une montre classique qui rendait elle-même hommage, etc. Traduction : la nouvelle Grand Prix (re)lancée par Vulcain est une réédition fidèle de la montre Grand Prix lancée par Vulcain dans les années 1960 en hommage au Grand prix décerné à la maison Vulcain en 1929 à l’exposition internationale de Barcelone. À la manœuvre pour cette exhumation au carré [quoique la montre soit ronde], toujours le même « thanatopracteur » Guillaume Laidet, un jeune horloger français qui s’est fait une spécialité de faire revivre les Belles au bois dormant de la légende horlogère (ici, Vulcain, mais ailleurs Nivada Grenchen ou Excelsior Park – ce qui ne l’a pas empêché de lancer, dans un style rétrofuturiste, les épatantes montres Spaceone). Autant dire que la nouvelle Grand Prix cumule les marqueurs de cette vague néo-vintage qui semble devoir tout emporter : la taille (39 mm), la sobriété stylistique (boîtier rond, mouvement automatique suisse Landeron que les nostalgiques applaudiront, trois aiguilles, index minimalistes, cadran « vidé » de toute mention inutile proposé en trois couleurs (crème, gris, noir) sans affèteries, verre saphir bombé comme il se doit et prix on ne peut plus sympathique par les temps inflationnistes qui courent (autour des 1 500 euros). Un grand bain rétronostalgique, cette montre Grand Prix à petit prix…

BALTIC : Lumineusement vôtre…

Une nouvelle collection pour la jeune marque indépendante française Baltic, qui creuse son sillon dans ce souci d’élégance néo-rétro-classico-vintage qui n’en finit plus de recomposer les catalogues horlogers. Les nouvelles Prismic osent le retour aux boîtiers de 36 mm en acier et titane [ceux d’il y a vingt ou vingt-cinq ans] sous verre saphir double dôme, avec des cadrans aux couleurs plus actuelles, mais des détails de finition (guillochage, petite seconde, index géométriques, alternance de brossage, de grainage et de satinage jusque sur les aiguilles, bracelet « mesh » maillé tressé, etc.) travaillés avec un souci très contemporain de jouer au mieux avec les reflets de la lumière. Le mouvement est évidemment suisse (un excellent Peseux 7001 à remontage manuel, histoire de conserver au boîtier une élégante sveltesse : 9,2 mm). De la belle ouvrage, qui permet de comprendre les fantastiques progrès réalisés par l’horlogerie indépendante française depuis une quinzaine d’années : pour un peu moins de 1 000 euros, c’est une tentation permanente (quatre couleurs de cadran disponibles : gris bleu, violet, saumon, vert). Ces Prismic posent clairement le cadre de cette nouvelle horlogerie (créative, « signifiante » et accessible) que les marques suisses n’ont pas voulu voir venir tellement elles sont abimées dans la splendide arrogance de leurs prétentions statutaires…

BVLGARI : Élégamment vôtre…

La collection Lucea (Lvcea pour les puristes) est une des meilleures nouvelles qui soient arrivées à l’horlogerie féminine depuis l’aube du XXIe siècle. Idéalement placées au carrefour de l’horlogerie et de la joaillerie, les montres Lucea fêtent cette année leurs dix ans de pétillante créativité, dans un festival permanent de jeux de lumière et de joie de vivre à l’italienne, que cette féminité extrême s’exprime dans l’or ou dans l’acier, dans les pierres précieuses ou dans le savoir-faire lapidaire, dans les hautes mécaniques ou dans l’ultra-joaillerie. Les nouveaux bracelets métalliques (maillons en V légèrement arrondis et adoucis) témoignent de l’élégance foncière de cette collection, qui se distingue cette année par des cadrans exécutés en marqueterie de nacre ou de malachite : il y a un hommage au soleil dans le charme radiant de ces nouveaux modèles, parfaits en 33 mm, mais tout aussi attirants en 28 mm. L’année commence en beauté, chez Bvlgari…

BA111OD : Deltoïdalement vôtre…

Pour être d’un abord déroutant, cette montre n’en est pas moins fascinante. Le nom de cette jeune marque indépendante suisse – Ba111od – est en soi imprononçable, sauf si on le rapporte au patronyme de son fondateur, Thomas Baillod. Le nom de la montre elle-même est tout aussi ésotérique : CHPTR_Δ AGIL, mais il suffit de le prononcer « Chapitre Delta Agil », en toute simplicité [le Agil étant une dédicace secrète « à Gil »]. Le reste est presque moins compliqué à comprendre/ On repère tout de suite une aiguille à peu près normale : ce sont les minutes, avec leur échelle graduée circulaire. Il faut chercher la demi-sphère qui indique les heures sur les bords intérieurs du triangle galbé au centre du cadran : le déplacement de cette « heure » n’est pas linéaire, mais hypocycloïdal – il suit les bords du triangle, qui compte douze « index » comme tout cadran circulaire qui se respecte. Sur le cadran ci-dessous, il est donc 10 :10, ou 22 :10 si le soleil est couché ! Précision parfaite sur douze heures en dépit de cette avance légèrement virevoltante de l’heure triangulaire et exactitude tout aussi suisse de cette mécanique horlogère deltoïde [normal : la montre est Swiss Made, avec un mouvement automatique suisse de chez Soprod, qui a été retravaillé par Olivier Mory, la star montante de la nouvelle horlogerie suisse, pour parvenir à cet affichage inaccoutumé du temps qui passe]. La bonne surprise, c’est le prix ultra-accessible de ce chef-d’œuvre de haute mécanique qui sera facturé dans les 3 000 euros, alors qu’on en exigerait dix, vingt ou trente fois plus avec le nom d’une « grande marque » sur le cadran : Thomas Baillod s’est mis en tête de démocratiser la haute horlogerie – on lui doit, entre autres, un tourbillon Swiss Made à moins de 3 500 euros ! La mauvaise nouvelle, c’est qu’il n’y aura que 111 de ces montres CHPTR_Δ AGIL et que la moitié de ce contingent était déjà pré-vendue dans les heures qui ont suivi l’annonce de leur mise sur le marché [ce matin, il en restait moins de trente !]. Ce n’est pas tous les jours qu’on vous propose une première mondiale hypocycloïdale et deltoïde, capable de vous prouver que quelque chose ne tourne pas rond dans le temps qui passe…

JACQUES BIANCHI : Subaquatiquement vôtre…

Les « forêts » de posidonies sont, sur les hauts fonds de la Méditerranée, des herbages naturels qu’il faut à tout prix préserver pour l’équilibre du milieu marin – ce que n’ont pas l’air de comprendre les crétins qui les arrachent et qui les détruisent en y plantant l’ancre de leurs yachts [ce qui constitue maintenant un délit !]. C’est au trésor naturel que constituent ces « prairies » méditerranéennes que la jeune marque indépendante marseillaise Jacques Bianchi (du nom de la dernière légende vivante de la plongée française, toujours sur le pont à Marseille) a voulu dédier sa nouvelle plongeuse, la JB2000 Posidonie, remarquable à plus d’un titre. On appréciera la lunette tournante verte et le cadran vert « fumé », sans la moindre allusion à la plongée (poulpe ou autre) tout en affichant les codes traditionnels des « plongeuses » contemporaines – notamment le mouvement automatique suisse et l’étanchéité à 200 m [de profondeur, pas 200 m du parasol de plage !]. On appréciera aussi le bracelet de style « Tropic » en caoutchouc vert. On appréciera surtout le prix, parfaitement en phase avec les attentes du marché : à peine plus de 1 000 euros pour cette « Posidonie » au grand cœur, très urbaine dans son boîtier de 42 mm et même coquette avec sa couronne de remontage à gauche du boîtier. Serait-ce la « plongeuse » de l’année, alors que ce rapport qualité-prix s’annonce comme quasiment imbattable ?

BON À SAVOIR : En bref, en vrac et en toute liberté

•••• SALONS HORLOGERS : à Munich, le rendez-vous Inhorgenta entame les festivités horlogères de l’année, avec une surface triplée pour les marques horlogères qui ont déserté Baselworld sans retrouver une place à Genève pendant Watches & Wonders. Inhorgenta a ainsi récupéré la plupart des marques d’entrée de gamme qui exposaient à Bâle, mais aussi des milliers de visiteurs professionnels qui n’ont plus de raisons de se rendre à Genève, où les marques exposantes mettent en place des distributions de plus en plus exclusives et verticalisées, qui drainent donc vers Watches & Wonders de moins en moins de visiteurs professionnels. C’est ce qu’on peut appeler, pour les Suisses, se tirer une balle dans le pied… •••• KONSTANTIN CHAYKIN : c’est un peu cruel de vous parler d’une pièce unique, mais cette montre Zebra signée Konstantin Chaykin [le plus génial des jeunes maîtres-horlogers russes] est un signal fort pour confirmer la maturité de la Russie horlogère. Il s’agit du premier mouvement automatique à micro-rotor (calibre K. 33.3) entièrement conçu et réalisé localement – un indice du déclin de la prestigieuse horlogerie suisse, dont les mouvements alimentaient jusqu’ici les productions de Konstantin Chaykin ? On sait que la maîtrise du micro-rotor est un des exercices les plus « pointues » des beaux-arts de la mécanique horlogère, mais la mission n’a pas rebuté Konstantin Chaykin, qui nous fait un pied-de-nez avec son zèbre russe (!) : les heures dans l’œil à gauche du cadran, les minutes dans l’œil droit et, dans les narines, les jours de la semaine (en russe !). Admirez au passage les cornes de la montre : ce sont les oreilles du zèbre. La couronne de remontage et de mise à l’heure située à six heures en en soi une fonction : quand on la tire, le « sourire » du zèbre passe du blanc au rouge. On vous laisse réfléchir sur le bracelet, qui nous renvoie à une interrogation hautement métaphysique : le zèbre est-il rayé blanc sur fond noir, ou rayé noir sur fond blanc ? Bravo, M. Chaykin : continuez à nous étonner !

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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