Quand Blake donne l’heure à Mortimer et quand la tortue part à l’aventure : c’est l’actualité pré-automnale des montres<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
Il n’est jamais que midi et quart plus quarante secondes au cadran de cette Trilobe…
Il n’est jamais que midi et quart plus quarante secondes au cadran de cette Trilobe…
©

Atlantic Tac

Mais aussi les heures grainées qu’on déconstruit, le basculement d’une montre, les douze mascottes qui tambourinent, les bracelets du recyclage et le mauve évadé de Yakoutie…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

Voir la bio »

BRISTON : L’aventure est au bout du poignet…

La marque française indépendante Briston passe aux choses sérieuses ! Après la dolce vita à la française, celle des sables du Cap-Ferret, des lumières de la côte atlantique et des virées salées en Bretagne, voici le temps de l’aventure avec une montre qui ne craint pas les émotions fortes. On reste dans les codes Briston, avec un boîtier « coussin » (carré bien cambré) en acétate de cellulose façon écaille de tortue, mais la Streamliner Adventure propose différentes fonctions électroniques que les baroudeurs apprécieront (chronométrage au centième de seconde, réveil, calendrier, rétroéclairage, etc.), le tout étanche à 100 m avec une réserve de marche évaluée à deux ans. Deux ans de sensations fortes en plein air, avec un appréciable style de baroudeur urbain qui n’ira jamais chercher que dans les 330 euros pour vous aider à vivre plus intensément (joli choix de bracelets assortis aux boîtiers en gris, vert militaire et bronze).

TRILOBE : Une savoureuse reconstruction du temps…

D’où vient cette étrange impression d’avoir affaire à un nouveau classique des beaux-arts de la montre mécanique quand on découvre une montre Trilobe ? Cette jeune marque indépendante française est en train de s’imposer au meilleur niveau, avec un premier parcours sans faute et, déjà, des preuves de maturité comme cette nouvelle Nuit fantastique (40,5 mm) qui renouvelle avec distinction la traditionnelle lecture des heures. Pas la moindre aiguille ! Le noir grainé du cadran concentre le regard sur les rares indicateurs qui y figurent. À douze heures, un motif architectural trilobé : ce sera l’indicateur des heures qui circulent sur un anneau tout autour du cadran. Entre dix et onze heures, en retrait vers le centre de la montre, un guichet dont une nervure pointe vers le chiffre des minutes. À huit heures, un disque des secondes animé d’un discret guillochage, scande chaque instant du temps qui passe. C’est tout ! A vrai dire, que demander de plus à une montre automatique, qui a la politesse de n’exiger que cinq chiffres (autour des 9 000 euros) pour vous réapprendre la magie d’un temps dont la lecture ne tient plus du réflexe, mais d’une savoureuse reconstruction mentale. Ce nouveau rapport au temps est très contemporain. Trilobe est une preuve du nouveau génie de la nouvelle horlogerie française…

VACHERON CONSTANTIN : Une bousculade impertinente…

Quand certaines montres choisissent de nous tourner le dos (comme la Reverso de Jaeger-LeCoultre) pour nous isoler du temps qui passe, d’autres choisissent de bousculer notre perception de ce temps en faisant « basculer » les heures. C’est le cas de cette American 1921 proposée par la manufacture Vacheron Constantin. 1921 pour la date de création de cette montre pleine d’audace : au sortir de la Première Guerre Mondiale, dans la fièvre des Années folles qui s’ouvraient, il fallait effectivement un léger grain de folie pour oser faire « basculer » au poignet le boîtier et le cadran d’une montre, avec une couronne de remontage passée entre une et deux heures. Le style de cette American 1921 est typique de l’époque, avec ses chiffres néo-classiques eux aussi bousculés, ses aiguilles « pomme » dans le goût du XVIIIe siècle, sa petite seconde décalée vers quatre heures et son « chemin de fer » des minutes façon montre de poche. La taille du boîtier « coussin » en or blanc de cette montre à remontage manuel est également respectueuse de l’esprit des Années folles : guère plus de 36,5 mm – c’est délicieusement rétro. Si le prix est hélas plus contemporain (comptez dans les 30 000 euros, l’esprit l’est encore plus : c’est une sorte de pied-de-nez aux icônes compassées d’un passé horloger maintenant dépassé…

LOUIS VUITTON : Douze mascottes pour douze lettres…

Dès le premier regard, cette montre étonne et dérange. Pour de nombreuses raisons. C’est manifestement une montre féminine, ne serait-ce qu’à cause des diamants, mais la taille est imposante pour un poignet de dame : 42,5 mm pour ce boîtier en or. Les amateurs y reconnaissent une Tambour de Louis Vuitton, mais l’absence d’aiguilles surprend – sauf que, en regardant plus près, on remarque une aiguille sur le cadran central bordé par les douze lettres du mot Louis Vuitton [cette petite aiguille positionnée sur la lettre S indique ci-dessous dix minutes]. Les vraies fashionistas repèrent vite les fleurs du monogramme de la marque, rondes et pointues, en or rose serti neige ou en rouge rubis. Les initiées ultimes auront identifié « Vivienne », une des mascottes de la marque, représentée ici par une douzaine de figurines qui sont autant d’indicateurs des heures, positionnées elles aussi face aux douze lettres du mot Louis Vuitton : pendant les soixante minutes de l’heure en cours, « Vivienne » se tourne pour indiquer cette heure [ci-dessous, il est dix heures, donc 10:00 avec les minutes]. Dotée d’un mouvement automatique, cette Tambour Spin Time Air Vivienne est une montre automatique dont le prix reste assez suisse (comptez dans les 85 000 euros), mais elle témoigne d’une élégante désinvolture vis-à-vis du temps et d’un indéniable génie poétique français…

RESERVOIR : À l’heure du capitaine Blake…

« By Jove ! » : vous avez forcément reconnu l’expression favorite du capitaine Francis Blake, le contre-espion britannique héros de la série Blake et Mortimer du regretté Edgar P. Jacobs, un des meilleurs compagnons de route d’Hergé et un des piliers de cette « ligne claire » qui a révolutionné la bande dessinée européenne au XXe siècle. La marque indépendante française Reservoir célèbrera dans quelques jours le 75e anniversaire de la « naissance » de Blake et Mortimer, qui ont fait leur apparition le 26 septembre 1946 dans le premier numéro du nouvel hebdomadaire Tintin. On retrouvera donc Francis Blake et le professeur Philip Mortimer sur le cadran d’une montre Reservoir : le bras de Blake – qui crie « By Jove !!! » dans une bulle – se déplace pour indiquer les minutes, les chiffres des heures et de ses minutes reprenant la graphie de l’écriture des albums. Le fond de la boîte est un clin d’œil à la série, avec un rappel du futuriste Espadon et une gravure « So British depuis 1946 ». Ce n’est pas un hasard : cette montre automatique, proposée pile sous les 3 000 euros, sera livrée à la mi-novembre, lors de la parution du dernier opus de la série, Le dernier Espadon. C’est la première apparition de Blake et Mortimer dans l’horlogerie de prestige…

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• SALONS HORLOGERS DE RENTRÉE : le principal enseignement de cette rentrée horlogère, c’est probablement le grand retour de la couleur, sur les cadrans comme sur les bracelets de nos montres. C’est aussi le choix de matériaux plus « soutenables » et moins destructeurs de l’environnement, qu’on parle d’un or plus éthique, d’acier recyclé dans des fours solaires, de traitements de surface qui savent  jouer avec le spectre de la lumière [c’est le triomphe de l’arc-en-ciel pour iriser les composant métalliques], des pigments luminescents de toutes les teintes ou des bracelets pour lesquels on ne massacre plus d’alligators : on préfère désormais re-texturer des cactus, des bambous, des grains de raisins, de fenouil (!) ou des noix de coco – la planète ne s’en porte que mieux et ces bracelets sont magnifiques… •••• PIERRES MAGIQUES : même tendance à exploiter de nouvelles couleurs dans le retour en force des cadrans de pierre naturelle, avec des variétés et des couleurs encore jamais utilisées par l’industrie horlogère. C’est la grande démocratisation de l’onyx (noir), du lapis-lazuli (bleu) ou de la malachite (verte), mais on voit apparaître des couleurs incroyables, comme la charoïte [prononcez « tcharoïte »], une pierre rarissime rapportée de la lointaine Yakoutie sibérienne par l’équipe suisse d’Allez Hopp Watch, avec des teintes dans la gamme des mauves et des violets qui nous promettent de somptueux cadrans (ci-dessous). Comme on n’en extrayait qu’une cinquantaine de tonnes par an, que les mines sont désormais fermées et que seule une infirme partie de cette production était d’une qualité chromatique satisfaisante, on imagine la rareté du petit quintal que cette équipe a pu faire venir des rives de la Chara. Le mauve, c’est la prochaine exclusivité sur les cadrans horlogers… •••• ENCHÈRES : vous n’aurez sans doute pas les moyens de suivre tellement on va battre des records d’adjudication, mais, ne serait-ce que pour le plaisir des yeux et pour votre culture générale de la montre, ne manquez pas les prochaines sessions d’enchères horlogères ! Dans deux mois, pendant la première quinzaine de novembre, ce sera un festival de raretés absolues et de montres jamais passées sous le marteau, avec une pluie de millions qui signale qu’il y a énormément d’argent prêt à s’investir dans la montre et que la « bulle » horlogère est loin d’être dégonflée – du moins celle des montres de collection et du marché de la seconde main…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !