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Politesse et courtoisie : le "Bonjour !" de la discorde
©MICHEL GANGNE / AFP

Mot magique

Les Français se sont débrouillés pour transformer une formule de politesse en déclaration de guerre passive-agressive. C'est très Gilet jaune.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Il y a un petit truc très français qui me gonfle depuis un moment (pas autant que les Gilets jaunes bien sûr, mais pas loin) et je me demandais si c’était juste moi. Je découvre par le biais d’un mini-sondage réalisé de manière totalement non-scientifique sur les réseaux sociaux que ça n’est pas le cas. Que nous sommes en réalité très nombreux à en être agacés…

Mais il est grand temps de crever l’abcès. De rompre ce terrible silence.

Je vous mets en situation : vous posez une question anodine à un vendeur, à un flic, à un contrôleur SNCF, etc. Comme vous êtes une personne bien élevée, vous le faites avec un grand sourire, en introduisant systématiquement votre requête par un « Excusez-moi, bla bla bla » (« Excusez-moi, mais avez-vous ce modèle en 46 fillette ? », «  Excusez-moi, mais est-ce le bon quai pour la Garenne-Colombes ? »)...

Là, le gars (ou la nana, ça n’est pas un phénomène genré) vous coupe la parole en aboyant littéralement un « Bonjour ! » sec signifiant manifestement : « Comment oses-tu m’adresser la parole, espèce de connard, sans m’avoir préalablement souhaité de passer une bonne journée ? ».

Sauf s’il est complètement crétin, le vendeur, le flic ou le contrôleur est pourtant parfaitement capable de déduire du contexte qu’il vient d’être abordé avec courtoisie, que la question lui a été posée parfaitement poliment, et surtout que son rappel à l’ordre brutal est tout sauf une incitation à poursuivre le dialogue de manière civilisée. Au contraire, même :

—Excusez-moi, où se trouve le guichet pour les déclarations de décès ? Je viens de perdre ma…
Bonjour !

A ce stade, vous n’avez pas plutôt envie de lui mettre votre poing sur la gueule, à ce préposé que vous abordiez pourtant avec un sourire ? D’autant plus que votre « Excusez-moi » est bien plus pertinent, rationnel et fluide, en l’espèce, qu’un bonjour vide de sens : « Excusez-moi [de vous déranger], bla bla bla... ».

Et j’ajoute que je dis systématiquement bonjour au chauffeur du bus dans lequel je monte, justement parce que je n’ai rien à lui demander et que c’est un peu comme si j’entrais chez lui. En revanche, je ne m’attends pas à ce qu’un quidam qui me demanderait l’heure dans la rue introduise sa requête par un « Bonjour ».

—Excusez-moi, est-ce que vous avez l’heure ?
—Bien sûr. 5 h 20.
—Merci.
—De rien.

Échange parfait. Propre. Civil. Efficace. En tout cas plus plaisant que :

—Excusez-moi, est-ce que vous avez l’heure ?
Bonjour !

Mais bon, c’est juste un inconvénient mineur après tout. Moins perturbant que les casseurs jaunes et/ou noirs du samedi.

Ah, et au revoir, hein...

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