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Italie : doutes et tensions
©FILIPPO MONTEFORTE / AFP

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La constitution d’un gouvernement de coalition en Italie génère des doutes et des tensions croissantes.

Alain Pitous

Alain Pitous

Alain Pitous, Directeur Général Adjoint Associé de Talence Gestion (@alainpitous).

Talence Gestion est une société de gestion de portefeuille indépendante spécialisée dans la gestion sous mandat pour les particuliers et la gestion de fonds commun de placement en actions.

Précédemment, il a été pendant 5 ans (2009-2014) Deputy CIO d’Amundi (850 Milliards d’Euro sous gestion) et gérant du fonds Amundi Patrimoine de 2012 à juillet 2014.

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La constitution d’un gouvernement de coalition en Italie génère des doutes et des tensions croissantes. Comme souvent dans les périodes de stress concernant un pays membre, le problème provient des conséquences financières en cascade suite à une décision politique concernant la dette. C’est exactement ce qui se passe en Italie. 

Depuis plusieurs semaines les investisseurs s’interrogent sur la politique italienne suite aux élections de mars. Les choses se sont accélérées depuis quelques jours suite à l’accord pour constituer un gouvernement de coalition entre les deux partis ayant réalisé les meilleurs scores aux élections. 

Le problème pour les investisseurs est que le programme n’est pas encore bien défini : une sortie de l’Euro semble exclue à ce stade mais l’idée que le nouveau gouvernement indique vouloir obtenir un allègement de sa dette a mis le feu aux poudres.  La coalition aurait inscrit dans son programme une demande indiquant que la BCE devrait annuler 250 Milliards d’Euros de dette italienne qu’elle détient dans son bilan. Couplée à un volet dépense publique supplémentaire estimée entre 20 à 50 Milliards d’Euros, l’ensemble des coûts liés au programme du nouveau gouvernement a inquiété les marchés : les taux ont progressé…les valeurs bancaires ont plongé et globalement les indices actions ont nettement reculé. 

Pour le moment, les autres marchés Européens ont connu des réactions mesurées. En effet, la seule réelle conséquence pour les membres de la Zone Euro est la baisse de la devise européenne ce qui a été favorable à toutes les valeurs exportatrices du vieux continent. Passé le premier moment de stupeur à l’annonce des mesures envisagées par la nouvelle coalition beaucoup ont indiqué finalement ne pas être (trop) inquiets…

Pour le moment, la situation n’est pas encore explosive mais chacun a bien en tête que le problème de la dette italienne est déterminant…et ce d’ailleurs quel soit le gouvernement en place. Les achats d’obligations d’Etat par la BCE depuis 2012 ont permis de colmater les brèches dans les circuits de financement et de baisser les taux pour dynamiser la croissance mais cela n’exonère pas les gouvernements de prendre des mesures concernant la gestion de leur comptes publics. Objectivement l’Italie a fait d’énormes efforts ces 5-6 dernières années. Elle est même parvenue à générer progressivement un excédent primaire de ses comptes publics équivalents à 2.5% de son Produit Intérieur Brut (PIB). 

Hélas l’Italie traîne aussi depuis des années le poids d’une dette trop importante : le pays parvient à peine, malgré tous ses efforts à stabiliser sa dette globale à 130% du PIB depuis 2015. L’investissement public est particulièrement faible avec moins de 600€ par habitant soit 50% de moins qu’en France. La spirale de problème posée par cette dette est aggravée par le vieillissement de la population : le surendettement Italien pèse sur un nombre d’actifs de plus en plus faible. 

On comprend donc parfaitement le souhait de la coalition de vouloir s’attaquer prioritairement au stock de la dette. Il est aussi évident que les autres pays Européens ne peuvent être d’accords pour que la BCE annule purement et simplement 250 Milliards d’Euros. Les investisseurs redoutent que la situation se tendent entre l’Europe et le nouveau gouvernement Italien : la conséquence est instantanément une tension sur les taux 10 ans Italiens. Ils sont passés largement au-dessus de 2% et sont désormais supérieurs à la plupart des taux du Sud de l’Europe…et l’écart de rendement avec les taux Allemands s’accroit lui aussi depuis une dizaine de jours, ce qui est une preuve de la méfiance des investisseurs. Avec un stock de dettes de 2300 Milliards d’Euros, une tension prolongée des taux longs serait un problème majeur pour l’Etat Italien et annulerait toute marge de manœuvre du nouveau gouvernement à l’image de ce qui s’était passé en Grèce au pic de la crise il y a 5-6 ans ! 

Deuxième conséquence que les marchés ont bien à l’esprit : près de 67% du stock de dettes est porté par des investisseurs Italiens (Banques et Particuliers). Un doute sur la dette ou une restructuration partielle aurait un effet dévastateur sur les comptes des banques et la capacité de consommation des ménages. Les cours des banques ont donc été lourdement sanctionnées depuis 15 jours et globalement la bourse Italienne a reculé. 

Lors de la crise grecque la contagion avait touché les banques européennes et l’ensemble des bourses de la Zone Euro. Cette fois-ci pour le moment les effets sont relativement faibles sur les banques et quasiment nul sur les bourses du continent. En effet, l’Euro ayant faibli par rapport au Dollar, l’effet change positif pour les actions européennes a pleinement joué et la bourse Française a ainsi pu atteindre un niveau record datant de plus de 10 ans. 

Pour le moment, l’Italie est selon nous plus un point d’attention que d’inquiétude réelle mais reste bien sûr à surveiller de près : les phénomènes de contamination sont potentiellement problématiques. A court-terme, la faiblesse de l’Euro porte plus d’avantages pour les entreprises européennes exportatrices.

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