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VivaTech : pénurie de candidats à recruter pour les start-up françaises (alors qu’il faut bien utiliser l’argent des fonds étrangers)
©Salon Vivatech

Innovation

Le salon Vivatech qui se tient actuellement jusqu'au 26 mai à Paris rassemble tous les acteurs du secteur. Avec plus de 10 000 start up dans le divertissement (games, vidéo, musique, etc.), le marketing et le cloud, leur valorisation dépasse désormais le milliard d’euros. Elle reste toutefois deux fois inférieure à celle de leurs homologues britanniques.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Le salon Vivatech qui se tient actuellement à Paris rassemble tous les acteurs du secteur. Quelle est la réalité économique du secteur de la tech français ? Que représente-t-il dans le PIB et en nombre d'emplois?  

Philippe Crevel : A l’échelle macroéconomique, la taille du secteur des Nouvelles Technologies reste faible. Les NTIC sont à l’origine de 4,3 % de la valeur ajoutée des entreprises françaises. Ce poids devrait atteindre 5 % d’ici 2020. Paris devient une place importante avec le digital même si pour le moment elle est distancée par Londres. Le nombre de start-up en région parisienne est en forte progression et s’élevait en 2017 à 4000 contre 6000 à Londres.L’investissement des entreprises dépendant des NTIC demeure en revanche trop faible, 0,5 % du PIB contre 1 % au Royaume-Uni et 1,5 % aux États-Unis. En revanche, les start up françaises exportent en réalisant plus de 54 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation.

Combien de structures compte ce secteur en France ? Et à quel niveau sont-elles valorisées? Combien sont-elles à être valorisées à plus d’un milliard d’euros ?

La France compte plus de 10 000 start up dont un grand nombre interviennent dans trois secteurs : le divertissement (games, vidéo, musique, etc.), le marketing et le cloud. La valorisation globale est difficile à apprécier car toutes start up ne sont pas cotées loin de là. Néanmoins, en prenant en compte les critères de chiffre d’affaires et de rentabilité, leur valorisation dépasse désormais le milliard d’euros. Il n’en demeure pas moins que la valorisation des start up françaises est deux fois inférieure à celle de leurs homologues britanniques.

Les start up attirent de plus en plus les fonds étrangers ce qui prouve leur potentiel de développement. En 2017, 52 levées de fonds concernant des start up ont abouti à une prise de participation par des fonds étrangers. Ce sont essentiellement des fonds britanniques et américains qui sont intervenus.

Vous avez relevé qu'en 2017, 2,56 milliards d’euros ont été levés dans l’Hexagone pour 605 opérations en capital-risque. Comment se situe la France par rapport aux pays tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni en matière de financements privés?

 Si la France est distancée pour la valeur ajoutée et les emplois dépendant du numérique, en revanche, elle arrive en deuxième position pour les levées de fonds. En 2017, 2,56 milliards d’euros ont été levés dans l'Hexagone pour 605 opérations en capital-risque. Avec 18 % des montants levés en Europe, la France se situe, selon le cabinet EY, derrière le Royaume-Uni (40 %) mais devant l'Allemagne (12 %). L’Île-de-France est la première région d’accueil de ces investissements (77 %) suivie par la Auvergne-Rhône-Alpes (4 %) et PACA (3,9 %). Dans 25 % des opérations de levée de fonds, des grands groupes ont pris des participations en jouant ainsi leur rôle d’incubateur.

Une trentaine de start-up françaises ont bénéficié de nominations dans les différents concours du CES 2018, et deux ont été primées. Dans quels domaines les  entreprises françaises sont les plus innovantes et les plus performantes?

Au CES (Consumer Electronics Show) de Las Vegas version 2018, 365 entreprises étaient présentes ce qui constitue un nouveau record. Un robot majordome, un radiateur intelligent avec batterie intégrée ou encore un mannequin connecté et modulable ont été primés au CES. Les start up françaises se distinguent dans de nombreux secteurs : santé, jeu, logiciel, objets connectés, agriculture énergie. Plus récemment, des fintechs (assurance, banque, finances) percent. Le bon niveau en mathématiques de nos ingénieurs et notre savoir-faire financier contribuent à cet essor. Le problème, ce n’est pas l’innovation mais sa diffusion. Les start up butent encore l’industrialisation de leur process. Par ailleurs, à la différence des Etats-Unis, le marché européen est segmenté, au niveau linguistique, au niveau financier, au niveau fiscal. 

Quels sont les principaux freins de la croissance du secteur en France ?

Les entreprises du digital sont freinées par leur petite taille. Les levées de fonds françaises peinent à dépasser les 100 millions d'euros, contrairement aux start up britanniques (qui ont réalisé 8 opérations comprises entre 100 et 500 millions en 2017). La France compte peu de jeunes entreprises valorisées à plus d’un milliard d’euros quand elles sont une quinzaine au Royaume-Uni et une dizaine en Allemagne. En outre, les entrepreneurs français sont plus adeptes de coup patrimonial que leurs homologues étrangers. Quand l’affaire commence à se valoriser, les propriétaires sont tentés de la vendre à une grande entreprise, souvent étrangère. La problématique des fonds propres et l’ex ISF contribuaient au rachat des start up. Ce n’est pas spécifique à la France car cette tendance se retrouve aussi en Allemagne. Ainsi, aucune start up européenne n’a pu se hisser au même rang que les GAFA.
Le secteur est également confronté à un problème de manques de fonds propres mais aussi de compétences. Les établissements ne forment pas en suffisamment grand nombre des experts du digital. Certes, certaines filières sont reconnues à l’échelle internationale et leurs ressortissants s’arrachent à prix d’or à l’étranger générant une émigration de cerveaux. Néanmoins, nous souffrons d’un déficit de compétences comme en témoignent nos mauvais résultats aux différentes enquêtes réalisées par l’OCDE. 

Source OCDE

La France arrive en 35e position pour les performances des enfants de CM1 en mathématique et en 34e position pour les performances des enfants de CM1 en compréhension écrite.

Cette mauvaise formation se ressent également sur le niveau de l’ensemble des actifs. Les contraintes administratives constituent également des freins au développement des start up.

Source OCDE

La France, pays essentiellement tertiaire et de TPE, est moins ouvert à la haute technologie que les Etats-Unis ou les Etats d’Europe du Nord. Le nombre d’entreprises recourant à des systèmes informatiques (robots, cloud, gestion connectée des stocks, gestion connectée des flux) y est plus faible en France qu’au sein de nombreux autres pays membres de l’OCDE.

Source OCDE

Pour le moment, le fourmillement de start-up ne modifie pas la situation macroéconomique de la France qui se caractérise toujours par une dégradation de sa balance commerciale et par un retard en matière d’intégration des nouvelles technologies. Les questions de financement et donc de croissance des start-up françaises peuvent également expliquer le léger décrochage de la France vis-à-vis des NTIC. En règle générale, les phénomènes de rattrapage s’effectuent par à-coups. Une possible mise à niveau est donc attendue même si la question de formation des actifs constitue un réel handicap.

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