Variant Delta : la 4ème… vaguelette ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Un membre du personnel soignant auprès d'un patient touché par la Covid-19 dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital Georges Pompidou, à Paris, le 6 avril 2021.
Un membre du personnel soignant auprès d'un patient touché par la Covid-19 dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital Georges Pompidou, à Paris, le 6 avril 2021.
©Anne-Christine POUJOULAT / AFP

Tout passe pour ça ?

La France peut-elle s’attendre à la même chute très rapide du nombre de cas que celle constatée aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni ainsi qu’à un faible nombre d’hospitalisations et de morts ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

Voir la bio »

Atlantico : Après un été 2020 un peu particulier suite au premier confinement et la découverte de la pandémie, l’été 2021 est lui celui de l’apparition du variant Delta. Apparu en Europe il y a quelques mois, ce variant représente plus de 90 % des nouveaux cas en France. Alors que les contaminations ont été plus importantes aux Royaume-Uni ou en Hollande, y-a-t-il eu une augmentation significative du nombre de morts et d’hospitalisations dans ces deux pays avec la flambée des cas ? 

Antoine Flahault : Il est en effet pertinent d’analyser ces deux pays ensemble car ils ont connu au même moment leur pic de contaminations lors de cette nouvelle vague, pic qui semble avoir été atteint autour de la mi-juillet. Le Royaume-Uni a connu un afflux dans ses hôpitaux et ses réanimations et une augmentation des décès qui n’est peut-être pas terminée, avec 70 à 80 décès par jour actuellement, sans commune mesure cependant avec le pic d’hospitalisations et de mortalité par Covid en janvier 2021 où le pays rapportait 1200 décès par jour (pour un pays de la taille de la France en termes de population, avec près de 67 millions d’habitants). Les Pays-Bas ont eux aussi connu une importante vague de contaminations mais qui ne s’est pas accompagnée à ce jour à une augmentation très significative des hospitalisations et des décès, avec moins de 5 décès par jour (pour un pays de 17 millions d’habitants).

Depuis six jours, les contaminations sont en baisse au Royaume-Uni, malgré la levée de nombreuses restrictions sanitaires. Est-ce enfin le résultat de la vaccination ? Cette nouvelle vague commence-t-elle déjà à s’essouffler ? 

Cette question soulève de nombreux débats auprès des experts en Grande-Bretagne. Les mathématiciens épidémiologistes de l’Imperial College avaient prédit une évolution catastrophique, avec plus de 100 000 voire 200 000 cas dès la mi-août, or le nombre de nouveaux cas semble redescendre de 50 000 par jour au moment du pic à un peu plus de 20 000 cas ces derniers jours. Il se peut donc vraiment que l’on ait atteint un pic et que le pays soit désormais en décrue épidémique. La première leçon à tirer est que l’on ne sait pas prédire cette pandémie, même à moyen terme, et je m’abstiendrai donc de prédire son évolution au-delà de 7 jours. Il est peu probable que la couverture vaccinale élevée dans la population adulte britannique explique cette décrue soudaine des contaminations car elle touche aussi les plus jeunes qui ne sont pas du tout vaccinés. Cette décrue concerne par ailleurs toutes les régions du pays alors que les vagues précédentes les avaient atteintes de manière hétérogène comme en France d’ailleurs. Donc ce ne peut pas être non plus l’immunité collective qui aurait été atteinte au Royaume-Uni, même s’il faut encore attendre les résultats des études de séroprévalence dont nous devrions disposer prochainement (peut-être en fin de semaine). Il est possible que les vacances scolaires qui sont arrivées tardivement au Royaume-Uni (le 23 juillet seulement) soit un facteur déterminant important de la décrue car les contaminations touchaient beaucoup les enfants ces dernières semaines. Le frein estival a pu jouer aussi un rôle important ces derniers jours (de chaleur et de beau temps) sur les îles britanniques, permettant aux interactions sociales de se dérouler davantage en milieu extérieur, et permis d’ouvrir portes et fenêtres afin de limiter les contaminations par aérosols en milieu clos, bondés et mal ventilés.

À Lire Aussi

Variant Delta : ce que nous apprend la reprise épidémique dans une maison de retraite belge où résidents et personnels étaient largement vaccinés Pfizer

La France peut-elle s’attendre à la même chute très rapide du nombre de cas que celle constatée aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni ainsi qu’à un faible nombre d’hospitalisations et de morts ? La situation entre ces deux pays et la France est-elle similaire ? 

La France est en croissance exponentielle de son épidémie, avec un peu de retard sur le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Cette croissance est soutenue et l’incidence dépasse désormais les 20 000 cas par jour. Les hospitalisations remontent un peu, source de préoccupation des autorités sanitaires, mais les décès restent à un niveau faible, de moins de 20 par jour, loin des 600 décès quotidiens de novembre ou des 300-350 décès quotidiens du long plateau de l’hiver dernier. Le Royaume-Uni (70% de la population totale ayant reçu au moins une dose) et les Pays-Bas (68%) bénéficient d’une meilleure couverture vaccinale que celle des Français (près de 60%), mais on peut dire en tenant compte du décalage de l’apparition des vagues entre ces pays que la France aborde cette quatrième vague dans une situation un peu similaire à celle du Royaume-Uni vis-à-vis de sa couverture vaccinale. Par ailleurs, la France a pris les devant en imposant en plus l’extension du passe sanitaire dans tous les lieux clos, bondés et mal ventilés, ce qui correspond à une forme de confinement des non vaccinés et, en le combinant au frein estival et à la fermeture des écoles et des universités pendant les vacances, tout cela devrait agir favorablement contre les conséquences sanitaires de cette vague épidémique.

Au début de la quatrième vague, on a vu les services hospitaliers indiens débordés, cela aurait-il été notre cas sans couverture vaccinale ? Comment les autres pays affrontent-ils le variant Delta ? 

À Lire Aussi

Covid-19 : Le gouvernement s’inquiète du variant Delta mais ne fait rien de ce qui pourrait en protéger les Français

On pourra faire le bilan une fois cette pandémie terminée mais il est sûr que la forte couverture vaccinale des personnes âgées et vulnérables en Europe les protège considérablement vis-à-vis des complications et des décès qu’ils auraient connu sinon. Il suffit de voir la Russie qui a une couverture vaccinale inférieure à 25% et se débat dans une vague due au variant Delta qui a des conséquences tragiques en matière d’hospitalisations et de décès, avec près de 800 décès par jour rapportés par les autorités, sachant que ces statistiques officielles sont probablement sous-estimées. La Tunisie aussi voit ses services de santé saturés et rapporte environ 200 décès par jour pour un pays de 11 millions d’habitants, ce qui correspondrait à l’équivalent de 1200 décès par jour pour un pays comme la France ou le Royaume-Uni. On peut redouter désormais les conséquences de ce variant en Afrique cet été et dans tous les pays qui ne bénéficient pas d’une protection quasi-totale de leurs personnes âgées et vulnérables et de leurs personnels de santé.

À Lire Aussi

Variant Delta : ce sombre scénario que personne ne veut vraiment regarder en face

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !