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Valse des soutiens Fillon / Copé : l’UMP dans le jeu des alliances
à contre-pied
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Art politique et vestes retournées

Valérie Pécresse a déclaré ce mardi se montrer favorable à "un ticket d'union" à la tête de l'UMP, avec Copé secrétaire général et Fillon président du parti. Dans le même temps, les soutiens aux deux chefs de file s'avèrent étonnants, ou quand les plus droitisants soutiennent François Fillon, et la droite humaniste Jean-François Copé...

Philippe Braud

Philippe Braud

Philippe Braud est un politologue français, spécialiste de sociologie politique. Il est Visiting Professor à l'Université de Princeton et professeur émérite à Sciences-Po Paris.

Il est notamment l'auteur de Petit traité des émotions, sentiments et passions politiques, (Armand Colin, 2007) et du Dictionnaire de de Gaulle (Le grand livre du mois, 2006).

 

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Dans un parti politique décapité par la défaite de son leader naturel, les luttes de pouvoir autour de la succession sont nécessairement d’une grande âpreté ; à la hauteur de l’enjeu : le contrôle du parti et le positionnement pour la présidentielle de 2017. Le scénario qui voit deux prétendants nettement détachés de tous les autres, par leurs titres ou leurs responsabilités, crée les conditions d’un choc frontal qui aggrave encore les tensions. Et comme toujours l’arrivée d’un tiers qui se présente comme un candidat d’union contribue, au moins à court terme, à aggraver les divisions.

Pour l’heure, à l’UMP, les uns et les autres sont tenus, sinon sommés, de choisir leur camp ; les plus circonspects traînant les pieds le plus longtemps possible, de façon à pouvoir voler au secours de la victoire. Les plus habiles prônent des formules de compromis apparent, à la manière de Valérie Pécresse suggérant un ticket François Fillon (Président), et Jean-François Copé (Secrétaire général). Puisqu’il existe une amorce de débat sur l’existence de deux lignes, l’une réputée plus « droitière », l’autre plus « humaniste », on pourrait croire que les ralliements à l’un ou l’autre des candidats vont s’effectuer sur la seule base des affinités d’opinion. C’est peut-être se faire quelques illusions sur le rôle des « convictions » dans la vie politique. Certes, les sensibilités sont différentes au sein du parti sur des questions comme les rapports avec l’électorat FN, le contrôle de l’immigration, les questions de sécurité, mais aussi sur la construction européenne ou le rôle de l’Etat dans la vie économique. Et il n’est pas déraisonnable de mettre en avant ces différences de lignes politiques pour justifier des ambitions personnelles. Notre culture politique n’aime pas trop les grands fauves aux dents longues.

Pourtant l’essentiel, dans une carrière politique, est de se retrouver un jour du côté des gagnants. Peut-être pas à tout prix pour certains. Mais il s’agit certainement d’un paramètre pour beaucoup, surtout ceux dont le destin est loin d’être accompli en raison de leur appartenance générationnelle. Qui choisir ? Lorsque l’issue de la lutte demeure indécise, les promesses de l’un ou l’autre des candidats ont leur prix : un ministère en filigrane ? Un rôle de premier plan dans le cercle intérieur ? Mais ces promesses ont une crédibilité relative : elle dépend de l’existence de rivaux mieux placés dans l’esprit du patron, d’expériences antérieures, de désillusions ou, au contraire, de relations de confiance avec lui. Ce qui atténue l’importance des « deux lignes », c’est le fait que François Fillon aussi bien que Jean-François Copé ont besoin de se montrer en candidats de « rassemblement », ce qui autorise, et même exige, la quête de soutiens dans toutes les sensibilités.

Dès lors, il ne faut pas s’étonner de ralliements apparemment illogiques : Nathalie Kociusko-Morizet semblant pencher pour Jean-François Copé, Laurent Wauquiez et des élus de la Droite populaire pour François Fillon. Des responsables promus dans l’appareil par l’actuel secrétaire général peuvent néanmoins se poser des questions. Et si, en 2017, leur patron avait nettement moins de chance de l’emporter que l’ancien Premier ministre, du fait de la popularité actuelle de ce dernier dans l’opinion publique ? A l’inverse, puisque ce sont les militants qui vont faire le choix, et que Jean-François Copé tient bien en main le parti, la plus grande probabilité de sa désignation comme patron de l’UMP ne risque-t-elle pas de marginaliser les admirateurs des qualités d’homme d’Etat de l’ancien Premier ministre ? Choix cornélien, à opérer dans une situation politique éminemment fluide. Et si François Fillon voyait sa côte de popularité dans l’opinion s’effriter avec le temps ? Et si Jean-François Copé ne décollait pas dans les sondages comme celui qui incarne le mieux l’opposition à un gouvernement socialiste condamné pourtant à décevoir son camp ?

La politique, on l’oublie souvent, est moins l’art de formuler des objectifs mobilisateurs que l’art de construire les outils de la victoire électorale. Ou plutôt, le premier niveau est nettement subordonné au second. Mais cela ne se dit pas, n’est pas politiquement correct. 

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