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"Une vie" : une pièce très convaincante et extrêmement mobile
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La vie d’une femme trahie De : Guy de Maupassant Durée : 1h30 Mise en scène : Arnaud Denis Avec : Clémentine Célarié

Jean Ruhlmann pour Culture-Tops

Jean Ruhlmann pour Culture-Tops

Jean Ruhlmann d’abord professeur d’histoire en collège, est actuellement enseignant-chercheur en histoire contemporaine à l’université de Lille – Charles de Gaulle. Le théâtre est une passion qui remonte à sa découverte du Festival d’Avignon ; il s’intéresse également aux séries télévisées. Il est, avec Charles Edouard Aubry, co-animateur de la rubrique théâtre et membre du Comité Editorial de Culture-Tops.

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THÈME

Au soir de sa vie, Jeanne Le Perthuis des Vauds entreprend de la raconter, peu après avoir dû vendre son cher château familial des « Peuples » (au sens ici de « Peupliers »).

Issue d’une famille de riche noblesse rouennaise, Jeanne pensait, du haut de ses 17 ans, que « les étoiles m’offraient leur mystère, et l’espoir d’un avenir lumineux »….

Si désireuse donc de « s’ouvrir auxpromesses de la vie », la jeune femme va vite déchanter, car à suivre les préceptes de son milieu (« Prends sur toi », « On ne veut pas faire d’histoire »), le risque est grand d’enchaîner les déconvenues...

POINTS FORTS

L’extraordinaire précision de l’écriture de Maupassant et le bien-fondé des extraits choisis par le metteur en scène.

La pièce est servie par une Clémentine Célarié très convaincante, extrêmement mobile, juste dans ses gestes, ses changements d’intonation et de ton, d’expression et de regards, tour à tour exaltée, résignée ou accablée, déclinant pratiquement toute la gamme des attitudes au fil des désillusions.

La comédienne se montre particulièrement juste dans des “scènes-charnière“, ces morceaux de bravoure que sont la ballade en mer sur Etretat et la rencontre avec Julien, vicomte de Lamarre, ou encore le récit des circonstances épiques du décès de son mari.

Les créations lumière (Denis Koransky) donnent vie à des personnages et des atmosphères sans qu’il soit besoin de les rendre plus réels. La pièce donne à voir un arrière-plan de falaises normandes devant lequel se tient le rebord de l’une d’entre elles.

QUELQUES RÉSERVES

Parfois un peu trop lacrymal, même si le sujet s’y prête ...

ENCORE UN MOT...

Quoiqu’ancré dans la noblesse normande, Une vie - et c’est ce qui explique pour partie son succès – met en scène les pires craintes de la bonne société au XIXe siècle : la mésalliance, qui met en péril le fruit de générations de travail, d’épargne et de richesse, tout-à-coup englouti par un mari volage et oisif (le vicomte Julien de Lamarre) puis par Paul, un fils autant aimé qu’il se montre indifférent et dispendieux... à cette crainte du déclassement s’ajoutent l’appréhension de la réputation salie, et de l’honneur perdu. 

Une Vie évoque aussi le temps - pas si lointain - où prévalaient le pardon à sens unique, les bonnes paroles faussement réconfortantes de “monsieur le curé“, où la parole des femmes comptait pour peu face à toutes sortes “d’abus de position dominante“ des hommes en général, et des maris en particulier.

UNE PHRASE

«  L’on pleure parfois les illusions avec autant de tristesse que les morts. » 

«  Il me semblait que je jetais un peu de mon cœur à chaque pli de ce vallon. » (Jeanne)

« Madame Jeanne, une vie, ça n’est jamais si bon ni si mauvais qu’on croit ! »

(Rosalie, la sœur de lait de Jeanne)

L'AUTEUR

Est-il encore besoin de présenter Guy de Maupassant (1850-1893), l’un des plus fameux écrivains de la littérature française, et sans doute le novelliste le plus doué de sa génération (Boule-de-suif, Le Horla, Les contes de la bécasse) ?

Une vie est son premier roman, paru en 1883. Ce récit, qui entreprend de raconter celle d’une femme, « depuis l’heure où s’éveille son cœur jusqu’à sa mort », inaugure une série de chef-d’œuvre, comme Bel-Ami, deux ans plus tard. Le roman se situe en Normandie, entre Goderville et Le Havre, région que connaît bien l’auteur, natif de Tourville-sur-Arques.

Cet ancrage géographique n’est pas le seul aspect autobiographique du roman : comme le vicomte Julien de Lamarre, Maupassant épousa une demoiselle fort bien dotée (mais issue de la bourgeoisie), et il fut un mari pareillement volage...

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