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Tsunami, un après : 
la double catastrophe naturelle 
et nucléaire qui s'est transformée 
en catastrophe sociale
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Dévastation

Le nord du Japon était déjà en proie aux difficultés sociales. Manque d'emploi et de croissance économique, vieillissement de la population. Les familles tenaient grâce à un équilibre agricole précaire que le tremblement de terre et Fukushima ont achevé de détruire.

Jean-François  Sabouret

Jean-François Sabouret

Jean-François Sabouret est directeur de Recherche au CNRS et Directeur du Réseau Asie-Imasie. Il a récemment publié Japon, la fabrique des futurs (CNRS-Editions, 2011).

 

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Dans la région du Tôhoku, où s’est produite la triple catastrophe le 11 mars 2011 (Séisme, tsunami, accident nucléaire), l’écart entre riches et pauvres s'est accéléré entre hommes et femmes (notamment les familles monoparentales), entre jeunes et personnes âgées, entre travailleurs réguliers et travailleurs temporaires. Et sans donner dans un humour facile, on comprend que lorsqu’on cumule plusieurs de ces critères, la vie quotidienne est compliquée : témoins ces personnes âgées qui volent à l’étalage avec l’espoir de se faire arrêter et de passer du temps en prison où l’on est nourri chaque jour. Les suicides de séniors sont à la hausse aussi.

Une enquête récente réalisée par la banque du Japon a montré que 28,6% des foyers n’ont aucune épargne financière. Dans un pays connu pour un comportement d’écureuil cela signifie-t-il que la situation s’aggrave ? C’est d’ailleurs le taux le plus élevé depuis le début de cette enquête lancée en 1963.

Le Tôhoku est cette région située au nord de Tokyo et qui a été la grande pourvoyeuse de main d’œuvre dans la reconstruction du Japon après la guerre. Les paysans l’hiver venaient gagner de l’argent en étant travailleurs  temporaires (dekasegi). Ils repartaient au printemps. Puis nombre d’entre eux ont fait venir femme et enfants  à la ville où le confort, l’éducation pour les enfants, et des possibilités d’emploi pour les épouses fournissaient un salaire d’appoint.

Les grands parents sont restés au village : solitude, manque d’argent, maisons vieillissantes on réparées, subsides des mairies trop faibles, puis veuvage. La consolation était de pouvoir produire ses légumes et un peu de riz. Le Tôhoku cultivait bio depuis quelques années. L’accident nucléaire a remis en cause cet équilibre très fragile.

Depuis l’éclatement de la bulle économique au début des années 90, le chômage, la mise à la retraite anticipée, le manque d’emploi même à temps partiel pour les femmes ont fait apparaître la pauvreté et l’écart croissant entre riche et pauvres (Indice de gini).

On mesure à cette occasion les conséquences d’une structure duale de l’emploi entre les employés réguliers (les ayants-droits) et les temps partiels, irréguliers, temporaires…de nombreuses personnes du Tôhoku appartiennent à cette seconde catégorie des familles fragiles économiquement et des laissés pour compte dans bien des cas. Toutes les personnes nées durant la guerre ou après 1945, arrivent aujourd’hui à la retraite… mais souvent sans bénéficier d'une pension conséquente. Certains se sont proposés pour aller travailler dans l’armée silencieuse des liquidateurs de la centrale nucléaire de Fukushima.

L’Etat et les collectivités locales ont relogé ceux qui avaient tout perdu mais aideront-ils  ces personnes au grand âge à reconstruire une maison ? Les doutes sont permis. Ce sont les familles qui prendront les relais et aideront les parents restés au village quand ceux-ci ont des familles. Pour les autres, le mieux à espérer est un assistanat soutenu des mairies et des préfectures. Mais le Japon est entré en récession et n’avait pas besoin de cette mauvaise nouvelle de Fukushima, d’une région entière détruite et souillée pour des dizaines d’années par les rejets radioactifs.

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