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Sur l’Europe, Angela Merkel répond à Macron avec tellement de prudence qu‘elle donne l‘impression de préparer sa sortie de l’euro
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

A trois semaines du sommet de Bruxelles qui doit dessiner les plans d’une réforme importante de l’Union européenne, Angela Merkel détaille sa position.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Alors que beaucoup de responsables politiques et hommes d’affaires spéculent sur une grave crise de l’euro qui exploserait en Italie, alors que beaucoup craignent une faillite de l’Italie avec sortie de l’euro, d’autres estiment que ça n’est pourtant pas l’Italie, l’Espagne ou le Portugal qui seront contraints à sortir de la zone euro poussés par « les intransigeances allemandes ». Mais c’est bien l’Allemagne qui prendra les devants pour recréer à son image un espace monétaire homogène et rigoureux autour des pays de l’Europe du nord, l’Allemagne pourra alors, sur ce terrain monétaire, se rapprocher de la Russie et de beaucoup d’anciennes républiques soviétiques qui sont désormais orphelines et qui offrent des marchés importants.

A quelques semaines du sommet de Bruxelles qui doit dessiner les plans de la réforme de l’Europe lancée par Emmanuel Macron, Angela Merkel a pris soin de répondre par voie de presse et de détailler sa position.

Le projet Macron doit permettre d’avancer sur la voie du fédéralisme en organisant un transfert de pouvoir vers Bruxelles, avec l’idée de mettre en gestation les Etats-Unis d’Europe. Avec un parlement au pouvoir législatif renforcé, un président qui incarnerait l’Union européenne, une politique d’harmonisation fiscale, sociale et administrative, un budget commun (en défense par exemple), une politique budgétaire commune, une mutualisation des dettes de façon à permettre à l’Europe d‘émettre des eurobonds. Et des organismes de stabilisation et d’intervention dans les pays membres avec des moyens d’intervention considérablement allongés.

Angela Merkel accepte :

1. De créer deux mécanismes d’entraide entre les pays de la zone euro, un budget d’investissement et un système de prêts pour les Etats confrontés à des difficultés importantes. Mais la Chancelière prend soin de préciser que les budgets seront très modestes, quelques dizaines de milliards d’euros. Pas question d’accepter une mutualisation des dettes en réponse aux politiciens italiens dont le programme ne teinte la route que si et seulement si on en viendrait à écraser les dettes.

2-Angela Merkel a aussi détaillé la proposition de FME, fonds monétaire européen qui, à l’image du FMI, pourrait intervenir dans un pays membre, à condition que celui-ci ait un droit de regard et d’intervention dans leurs politiques nationales.

3-Angela Merkel imagine même la possibilité de mesurer la solvabilité des pays en difficulté et la fourniture d’instruments pour rétablir cette solvabilité.

On est donc très loin des projets français, puisqu’Emmanuel Macron parlait lui d’un fonds capable d’intervenir avec plusieurs centaines de milliards d’euros. Emmanuel Macron n’a jamais exclu d’emblée la mutualisation des dettes, au contraire, avec à l’appui un accompagnement politique pour que chacun puisse préserver son identité et son indépendance.

En clair, la majorité des mesures de réformes prônées par Angela Merkel sont faites pour rassurer l’électorat allemand qui considère que l‘Europe est une vache à lait pour les pays de l’Europe du sud qui ont des trop gros déficits. L’électorat allemand a le sentiment de payer les factures de ses voisins et partenaires.

Plus grave, les sondages nous apprennent que les Allemands s’interrogent, eux aussi, sur l’utilité d’appartenir à une Europe où il est difficile de se faire entendre. Beaucoup d’allemands considèrent aussi que l’Allemagne n'a plus besoin de l'Union européenne. Son terrain de jeu désormais, ce sont les pays de l’Europe de l’Est et surtout la Russie.

Dans ces conditions disent les allemands, pourquoi rester dans l’euro avec des partenaires qui ne paient pas leurs dettes, qui grognent tout le temps contre nous, et qui, plus est, considèrent l'euro comme néfaste mais ne veulent pas, pour autant en sortir ? Pas même en Grèce ou en Italie. Ils croient en l’euro. Ils travaillent d’ailleurs beaucoup en euros.

Pas conséquent, ca n‘est pas le départ de l’Italie, de la Grèce ou même de la France qu’il faut craindre. Les sondages nous disent que les européens ne veulent pas quitter la zone euro.  La seule chose que les milieux d’affaires et la majorité des européens redoutent, c’est que l’Allemagne claque la porte et se retrouve dans un club de quelques pays qu’elle aurait choisis et qui suivent les règles d’origine.

Angela Merkel sait très bien qu’en brandissant cette menace, elle isole les gouvernements qui en Europe projettent une sortie de l’euro.

Tous les pays qui ruent dans les brancards de l’Union européenne savent trois choses.

La première, c’est que les européens souhaitent que l’Europe soit gouvernée autrement, mais veulent rester dans l’euro.

La deuxième chose, ils savent que l’euro et l’Allemagne qui garantit sa valeur, leur servent d’assurance vie. Ils grognent et pleurent contre l’Europe, mais ils ne pourraient pas s’en passer.

La troisième chose est qu’ils ne savent pas comment vivre sans l’euro. Angela Merkel l’a très bien expliqué. Sans l’euro, il faut vivre seul. C’est à dire sans l’Allemagne.

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