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La France perd 26m² de terres agricoles toutes les secondes.
La France perd 26m² de terres agricoles toutes les secondes.
©Reuters

Decod'Eco

Expansion des parkings, maisons bon marché et autres supermarchés sont en train de réduire dramatiquement les surfaces cultivées. Une réalité française... mais aussi chinoise. Alors qu'il devient difficile de contrôler les valeurs de ces terres, des groupes privés cherchent à investir dans des terrains qui pourraient se révéler indispensables d'ici quelques années.

Florent Detroy

Florent Detroy

"Florent Detroy est journaliste économique, spécialisé notamment sur les questions énergétiques, environnementales et industrielles. Voir son site."
 
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Selon un calcul du ministère de l’Agriculture français, la France agricole est privée de 82 000 hectares de terres agricoles par an depuis 2006, soit 26 m² de terres agricoles par seconde, selon Joël Clergue, du syndicat des Jeunes Agriculteurs.

La raison est simple : la demande de nouvelles terres arables a continué de progresser tandis que l’offre s’est maintenue… voire réduite. Les parkings, les maisons Phénix ou encore les magasins Auchan ne cessent d’empiéter sur les terres agricoles françaises.

Cette tendance n’est pas nouvelle. Entre 1960 et 2010, la surface agricole utile (SAU) s’est réduite de 20% dans l’Hexagone. Il y a 40 ans, cette avancée inexorable des Auchan sur les champs agricoles pouvaient traduire la modernisation du pays, le vieux pays agricole se tournant vers la ville et la modernité. Aujourd’hui, cet empiétement devient dramatique.

Car des habitants d’autres pays ont à leur tour voulu aller faire leurs courses chez Auchan et construire des maisons en carton-pâte. Résultat, les hectares consacrés aux céréales par exemple se sont considérablement réduits depuis les années 1970.


De manière générale, depuis les années 1950, les terres cultivées ont toutefois augmenté, de 10%. Mais dans le même temps, la population mondiale a doublé.

Aujourd’hui, les besoins alimentaires n’ont jamais été aussi grands. Et selon la FAO, ils vont continuer à s’accroître. Selon l’organisme onusien, la demande de céréales devrait atteindre 3 milliards de tonnes en 2050, contre 2,1 en 2009.

Pénurie de terres arables ?

Il est indéniable que la quantité de terres cultivées depuis des décennies n’a pas progressé de manière proportionnelle à l’évolution des besoins. Le cas le plus inquiétant a concerné la Chine. Avec seulement 7% des terres arables dans le monde pour 20% de la population, Pékin partait déjà avec un handicap. Mais de surcroît, les terres cultivées en Chine se réduisent d’année en année.

Historiquement, 600 villes nouvelles, dont 90 de plus d’un million d’habitants, ont été créées sous le régime communiste, empiétant naturellement sur les terres arables. La croissance économique s’accélérant dans les années 1990, les superficies des terres arables ont commencé à reculer.

Elles sont passées de 130 millions d’hectares en 1996 à 121,7 millions d’hectares en 2008 selon le Bureau National des Statistiques. De même, la taille des terres cultivables par tête se monte actuellement à environ 0,092 hectare, soit à peine 40% de la moyenne mondiale.

Bien entendu, la hausse spectaculaire des prix agricoles, qui a débouché sur la crise alimentaire de 2007, tire en partie sa source de l’arrivée de la Chine sur les marchés pour compenser la réduction de ses surfaces cultivées.

Toutefois la pénurie de terres arables, en Chine comme dans le monde, est un faux problème. Les terres arables sont certes en voie de disparition dans certains pays, mais d’autres en possèdent plus que de raison. Simplement, elles se situent de plus en plus loin des centres de consommation.

Le plus important est de savoir si on les met en production ou pas. Or depuis plusieurs années, le pouvoir de décision a changé de main.

Il n’y a plus de capitaine de la terre

Qui tient les rênes de l’agriculture mondiale ? Dans les années 1960 ou 1970, un pays détenait le pouvoir sur les marchés agricoles, les Etats-Unis. L’USDA, le ministère de l’Agriculture américain, avait mis en place un système de jachère, qui permettait au pays de garder sous la main des terres qui étaient mises en culture en cas de besoin.

Ainsi en 1965 par exemple, l’Inde a connu une récolte catastrophique. Les Etats-Unis ont pu intervenir en fournissant un cinquième de leur récolte de blé. La disette a été évitée, et les cours ont été préservés. Ce système permettait d’assurer une grande stabilité aux marchés.

Aujourd’hui, la financiarisation du commerce des denrées agricoles, la hausse des besoins et les faibles réserves de terres arables limitent ce pouvoir régulateur des Etats-Unis. Mais de nouveaux acteurs sont en train d’émerger, les compagnies privées.

“Externaliser” les terres

En 2008, la décision d’un groupe sud-coréen de mettre la main sur “la moitié des terres de Madagascar”, a suscité l’émoi à travers le monde.

Pourtant, cette annonce n’était qu’une étape de plus dans la tendance de long terme de location des terres par les pays pauvres ou en développement à des compagnies privées. Surtout, il est difficile de blâmer des compagnies qui ne font qu’investir sur un actif qui prend de la valeur. La raison d’être des sociétés privées n’est pas d’assurer un égal accès à l’alimentation. C’est le rôle des Etats.

Cette logique est en train de se répandre. Récemment, l’Argentine posait des limites aux investissements étrangers sur le secteur de l’agriculture. lle ne faisait que copier des règles déjà en pratiquées en France, en Italie, aux Etats-Unis et au Canada.

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