Record du nombre de détenus en France : pourquoi la réponse à la surpopulation carcérale ne peut pas être de vider les prisons mais de construire les milliers de places qui manquent <!-- --> | Atlantico.fr
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Les chiffres de l'administration pénitentiaire publiés vendredi, révèlent un taux d'occupation des prisons françaises de 118,5%
Les chiffres de l'administration pénitentiaire publiés vendredi, révèlent un taux d'occupation des prisons françaises de 118,5%
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Pousser les murs

Les chiffres de l'administration pénitentiaire publiés vendredi, révèlent un taux d'occupation des prisons françaises de 118,5%. Comparée à d'autres pays européens, la France dispose de peu de places de prison.

Alexandre Giuglaris

Alexandre Giuglaris

Alexandre Giuglaris est délégué-général de l’Institut pour la Justice.

 

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Atlantico : Selon les chiffres de l'administration pénitentiaire, la France comptait au 1er mai 2013, 67 839 personnes incarcérées, un nouveau record. Combien de places de prison manque-t-il en France ? Quelles sont les conséquences de cette situation ?

Alexandre Giuglaris : Le calcul est simple, on comptait 67 839 détenus au mois de mai pour une capacité carcérale de 57 235 places. On manque donc, déjà, de 10 000 places rien que pour régler le problème de la surpopulation carcérale qui concerne avant tout les maisons d’arrêt.

Mais ce que l’on sait moins c’est que des dizaines de milliers de peines de prison fermes sont inexécutées chaque année, faute de places ! 87 000 au 1er janvier 2012 pour être précis. Et c’est là que réside un véritable scandale qui explique une grande partie du sentiment d’impunité dans notre pays. Faute de places, on ne met pas à exécution les courtes peines de prison, on développe les aménagements de peine pour des condamnations à moins de deux ans et parfois même on abandonne purement et simplement l’exécution de la peine de prison prononcée…

Notre pays manque donc d’au moins 20 000 places de prison pour nous remettre au niveau de la moyenne européenne.

Pourquoi semble-t-il si difficile de mettre en œuvre la construction de places de prison ?

Il y a évidemment un coût qui peut dissuader mais face à celui de la criminalité, direct et indirect, que l’économiste Jacques Bichot chiffre à 150 milliards d’euros par an, on constate que c’est un mauvais calcul.

Mais la principale résistance est idéologique et donc politique. L’influence de Michel Foucault dans la pensée française mais surtout dans la sphère politique a été particulièrement négative. Certains trouvent plus "humaniste" de refuser d’incarcérer. Tant pis pour la hausse de la criminalité et du nombre de victimes…

Quelles est la situation dans d’autres pays européens ?

Selon les dernières statistiques pénales du Conseil de l’Europe, la France comptait en 2011, 56 562 places contre 75 647 en Espagne, 77 669 en Allemagne ou 96 158 au Royaume-Uni. Ces chiffres montrent que dans des pays relativement comparables en termes de population, le nombre de places de prison est bien supérieur, en particulier avec le Royaume-Uni qui est le plus proche.

Concernant la surpopulation carcérale, il faut savoir que la moitié des pays du Conseil de l’Europe sont concernés.

Certains, à l’instar de la ministre de la Justice, Christiane Taubira, voient dans ce phénomène une conséquence du "tout carcéral". Ils appellent ainsi à des solutions alternatives à la prison (réduction de peines, bracelet électronique, etc.). Cette approche pourrait-elle être une réponse efficace à la surpopulation carcérale et quelles en seraient les conséquences ?

Rien n’est plus faux que de parler de "tout carcéral" quand on se compare avec nos voisins européens ou quand on voit tous les dispositifs mis en place pour éviter d’envoyer des délinquants ou criminels en prison comme la systématisation des aménagements de peine.

Sur le bracelet électronique, l’idée n’est pas nouvelle et a été largement développée ces dernières années puisque cela concerne aujourd’hui plus de 10 000 personnes. C’est une bonne idée sauf quand elle est utilisée pour contourner la prison faute de places ou que le suivi des condamnés est défaillant…

Les alternatives à la prison sont déjà très nombreuses dans notre pays ce qui peut être nécessaire parfois. Mais aujourd’hui, ce n’est plus d’alternatives dont nous avons besoin, c’est de courage et de fermeté pour entamer enfin, la construction des 20 000 places qui nous manquent.

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