"Quelques mois dans ma vie" de Michel Houellebecq

En une centaine de pages complètement autobiographiques Houellebecq revient dans l’urgence sur deux mini-événements qui ont marqué pour lui les six mois écoulés : 

D’une part, les propos maladroits qu’il a tenus au cours de son entretien-fleuve avec Michel Onfray dans Front Populaire, parlant “du souhait de la population française de souche, qui n’est pas que les musulmans s’assimilent, mais qu’ils cessent de les voler et de les agresser” et sur lequel il tient à revenir. 

D’autre part, l’apparition sur le Net de la bande-annonce d’un film porno dans lequel il tient le premier rôle (Le porno de Houellebecq) film qui, assure-t-il, était destiné à rester dans la sphère privée et dont la diffusion lui paraît s’apparenter à un viol.

• De l’importance de l’humour et de l’autodérision chez un écrivain axé sur le porno, « à peu près aussi vaniteux que la moyenne des auteurs ».
• De la difficulté de filmer et de bander en même temps.
• De la bêtise de signer un contrat sans l’avoir lu.
• De l’insondable et suicidaire bêtise dont peut faire preuve le mâle (p.62) : « pour des commerçants purs, tel le cafard et la truie, ma notoriété d’auteur pouvait conférer à mes organes une certaine valeur marchande ».
• De l’expérience pénible de visionner un film porno quand « la laideur esthétique se trouve transfigurée par la laideur morale ».
• De la niaiserie de notre époque où, sur le Net, les abonnés d’une (mauvaise) performeuse telle la Truie doivent payer pour avoir accès à ses nouvelles vidéos sexuelles.

• Le manque d’intérêt total de ce petit opus ; les descriptions complaisantes du mode opératoire du triolisme doivent passionner un lecteur sur dix (et encore !)
• Les nombreux défauts cumulés de Houellebecq vu par lui-même :
• Il est intéressé : ce n’est pas la mise en ligne de ses galipettes qui perturbe l’auteur, c’est le fait qu’elles ne lui rapportent rien quand sa partenaire, la Truie, en fait payer les visionnages)
• Il est trouillard : la peur d’une attaque islamiste le retient de signer son ouvrage en librairie
• Il est d’une infinie bêtise enfin, quand il signe sans le lire un contrat largement rétroactif, autorisant le Cafard à filmer puis à diffuser sur le Net ses ébats sexuels avec sa femme et une étudiante en philo hollandaise. C’est ainsi que sa demande d'interdire la diffusion du film nommé Kirac 27 est rejetée à plusieurs reprises.

Où mène le besoin de se raconter chez un écrivain de talent ? Cette confession en forme de règlement de compte devrait être réservée à ceux qui ont deux heures à perdre. Pour les autres, mieux vaut relire Soumission ou Plateforme…

“A l’idée que ces images puissent être diffusées contre mon gré, je ressentais, pour la première fois, quelque chose qui me paraissait s’apparenter à ce que décrivent les femmes victimes d’un viol. D’abord une douloureuse sensation de dépossession de son propre corps, une sourde hostilité à son égard, un désir de le punir (…) Sur le plan mental j’étais traversé par des vagues de rage impuissante, mais parfois aussi je me recroquevillais, transpercé par la honte – jamais l’ultime phase du procès « Et c’était comme si la honte devait lui survivre » ne s’était si souvent présentée à mon esprit.” P. 63

Michel Houellebecq, romancier, essayiste, poète, est considéré par de nombreux critiques comme l'écrivain français le plus marquant de notre époque et demeure l’un des auteurs français contemporains les plus lus dans le monde depuis Extension du domaine de la lutte (1994). Il a reçu le prix Goncourt pour La Carte et le territoire en 2010 et Soumission, paru en 2015, a été un best-seller. Parmi les livres de Michel Houellebecq les plus marquants, on peut citer également La possibilité d'une île (2013) et plus récemment Les particules élémentaires (nouvelle édition parue en 2019).

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