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Promotion Voltaire de l'ENA : cuvée normale ou accident de l’Histoire ?
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François, Ségolène, Dominique et cie

Un président de la République, un Premier ministre, 6 ministres ou secrétaires d’Etat, des patrons de grandes entreprises, un membre du Conseil constitutionnel... Tentative d’explication de l'étonnante concentration de "personnalités" issues de la promotion 1978-1980 de l’ENA par l’un de ses élèves.

Régis   de Laroullière

Régis de Laroullière

Régis de Laroullière dirige l’Institut des Actuaires et intervient comme conseil en stratégie, gouvernance et gestion des risques auprès d'entreprises. Ancien du Trésor, il a été directeur général du Crédit Foncier de France puis de Malakoff-Médéric. Il est Président du Club des Dirigeants d'Assurances et de Mutuelles. Régis de Laroullière est ancien élève de l’ENA (promotion Voltaire) et de Normale Sup (Ulm mathématiques).

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François Hollande, Ségolène Royal, Dominique de Villepin, Michel Sapin, Renaud Donnedieu de Vabres, Frédérique Bredin, Pierre Mongin, Jean-Pierre Jouyet, Henri de Castries, Dov Zérah, ou plus récemment François Morlat nommé Directeur général du Crédit Immobilier de France, ou Jean Gaeremynck, Administrateur provisoire de Sciences Po, pas une semaine sans que la "promotion Voltaire" ne soit à l’honneur.

Simple aléa statistique dans la distribution des talents au sein des promotions de l’ENA, ou circonstances particulières sont-ils à l’origine de cette exceptionnelle réussite publique ?

La promotion Voltaire est certes, comme celles de la fin des années 70, l’une des plus nombreuses de l’ENA. Mais les lois de la dispersion statistique semblent ne pas fournir une explication suffisante. Quatre facteurs spécifiques méritent une attention particulière.

La veille d’une alternance longtemps attendue

Le 10 mai 1981, François Mitterrand est élu à l’Elysée, premier président de gauche de la Vème République. Les fonctionnaires en place, quelles que soient leurs opinions personnelles et leur sens de l’Etat, ont eu le temps d’être marqués à droite. L’appel d’air est donc important et bénéficie largement aux jeunes issus d’une promotion qui s’est achevée juste un an avant. Promotion assez attirée par l’engagement et la carrière politique au demeurant, à gauche dans les circonstances du moment, mais aussi à droite comme le montreront les alternances qui suivront.

Une promotion détendue, ouverte sur le monde

La promotion Voltaire était assez détendue à l’égard du classement. Comparée à la course exacerbée aux premières places de promotions ultérieures, cette attitude est un premier élément différenciant. Certes, il y avait parmi nous quelques "polars", mais l’ambiance globale était nettement coopérative et sympathique. Le directeur de l’Ecole, Pierre-Louis Blanc, grand diplomate et qui fut proche collaborateur du Général de Gaulle, avait coutume de dire que la vie serait une succession d’autres examens, et qu’il convenait de prendre un rythme de travail et de vie que l’on tiendrait dans la durée. Ce que la plupart ont fait, cette attitude leur conférant une ouverture sur le monde et les autres qui s’est révélée une qualité professionnelle appréciée dans les différents domaines où les goûts et les hasards des déroulements de carrière ont conduit les uns et les autres.

Peut-être avions-nous davantage le sens du service public qu’aujourd’hui ? Nous étions à la fin de la période de la reconstruction, l’entreprise n’avait pas encore été réhabilitée comme elle le sera sous le premier septennat de François Mitterrand, ouvrant la voie aux privatisations dès 1987 après les dernières nationalisations de 1981. Ce sens de l’intérêt général se révèlera une autre qualité pour se voir confier des responsabilités.

  1. Une promotion ne manquant pas d’humour

Le feuilleton du choix du nom de baptême de la promotion témoigne quant-à-lui d’un certain esprit potache : en  janvier 1978, le grand sujet du moment était le gâchis des finances publiques lié au grand chantier des Halles de Paris. Le trou réalisé pour la partie souterraine des installations risquait de conduire à un trou plus grand encore dans les finances publiques. Le budget de l’Etat était continûment déficitaire depuis 1974. Aussi, dans un mouvement de protestation prémonitoire contre ces premières dérives des finances publiques, et avec une pointe d’humour critique à l’égard de ceux de nos collègues qui se prenaient déjà trop au sérieux, certains avaient fait campagne pour que la promotion s’appelle "Trou des halles" . Nous imaginions en riant les plus pincés se présenter dans 20 ans : "Jean Trucmuch, promotion Trou des Halles". L’Ecole observait avec inquiétude. Finalement Voltaire, dont on fêtait le bicentenaire de la mort en 1978, poussé en avant à titre de contrefeu, l’emporta d’une courte tête.

Un effet caisse de résonance

Dès l’instant où la promotion Voltaire commença à être connue en tant que telle, grâce tout particulièrement à Ségolène Royal et François Hollande, mais aussi à Dominique de Villepin, toute nouvelle relative à l’un de ses membres se mit à s’accompagner de la référence à cette promotion, alimentant un effet cumulatif de caisse de résonnance, qui a pris une dimension nouvelle avec l’élection de François Hollande Président de la République.

La promotion Voltaire a depuis peu son livre, gageons qu’elle n’a pas fini de faire parler d’elle !

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