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Pourquoi les Occidentaux ne prennent pas assez au sérieux le discours de Poutine sur les avancées russes dans le nucléaire militaire
©Kirill KUDRYAVTSEV / POOL / AFP

Prudence requise

Les élites dirigeantes françaises semblent complètement sous-estimer la puissance russe, alors que le pays possède pléthore de brillants jeunes ingénieurs et chercheurs.

Le premier mars 2018, le président russe, Vladimir Poutine, a annoncé, au cours d’un discours annuel de politique générale, que son pays possédait désormais des armes nucléaires « invincibles », c’est-à-dire technologiquement plus avancées que celles qu’ont à leur disposition, l’autre superpuissance nucléaire, les Etats-Unis. Ce discours a été très largement commenté dans la presse Outre-Atlantique, créant une inquiétude patente chez les spécialistes de l’armement américain, l’arsenal dont disposerait Moscou étant réellement considéré comme supérieur à tout ce qui existe aujourd’hui, même si les autorités politiques de Washington tentent de minimiser la situation. Le très sérieux Washington Post parle même d’un effet « Sputnik » dans un article publié le 2 mars 2018, espérant que cette annonce contribue à une remise à niveau du nucléaire militaire américain, où les investissements ont été limités depuis la fin de la Guerre Froide dans un contexte de désarmement, faisant suite à l’application effective des différents traités sur la non-prolifération nucléaire.

Cependant, cette inquiétude légitime n’a guère touché les élites dirigeantes françaises, qui semblent complètement sous-estimer la puissance russe, alors que ce pays constitue, à l’heure actuelle, notre principal adversaire (« non déclaré » il est vrai) sur le continent européen puisque notre politique étrangère, dans le cadre de notre appartenance à l’Union Européenne et à l’OTAN, vise depuis plusieurs décennies à l’affaiblir. En conséquence, il ne faut pas s’attendre à des actions amicales de la Russie dans le futur. Il convient donc de ne pas répéter les erreurs du passé (l’Allemagne nazie d’Hitler prêtait à sourire au départ) et de prendre au sérieux le réarmement spectaculaire de l’empire eurasiatique, la crise syrienne ayant déjà montré concrètement ses nouvelles capacités en la matière.

En effet, l’élite française souffre d’un complexe de supériorité certain vis-à-vis de la Russie, qui a toujours était considéré comme un pays semi-barbare, pas vraiment européen, et donc technologiquement arriéré par rapport à l’occident, c’est-à-dire l’Europe occidentale et les Etats-Unis. Pourtant, au cours de la Guerre froide, ce qui s’appelait alors l’URSS a largement contribué à l’avancée de la science planétaire, réalisant de nombreuses premières (satellite, homme dans l’espace, station spatiale…). Au moment de sa chute, si l’URSS était en retard dans certains domaines, dont celui primordial de l’informatique, elle était en avance dans d’autres, comme les armes nucléaires et électromagnétiques, ce qui a été « oublié » par une historiographie officielle, qui a insisté, pour des raisons idéologiques, de manière exagérée sur la supériorité technologique de l’occident. Il n’apparaît donc guère surprenant que la réouverture des laboratoires militaires par Vladimir Poutine au cours des années 2000 conduisent, de nouveau, à des avancées technologiques dans les domaines où la Russie investit massivement, le pays bénéficiant de l’un des meilleurs systèmes éducatifs au monde et donc d’une pléthore de brillants jeunes ingénieurs et chercheurs. Ces avancées ne sont pas contradictoires avec un retard certain dans d’autres domaines, jugés moins stratégiques par le Kremlin. Il faut donc que les dirigeants français prennent au sérieux les affirmations de Vladimir Poutine.   

Il s’en suit que la posture militaire française doit être révisée. Malheureusement, le maintien de la dissuasion nucléaire est plus que jamais d’actualité (l’auteur de ces lignes comme tout un chacun aimerait vivre dans un monde sans risque nucléaire) et l’état-major ne doit pas uniquement consacrer ses réflexions stratégiques à la guerre asymétrique (lutte contre des guérillas ou des groupes terroristes), mais aussi se préparer à une éventuelle confrontation localisée en Europe orientale face à une armée puissante, comme c’était le cas pendant la Guerre Froide. Or, à l’heure actuelle, on voit mal comment une Union Européenne incapable de s’entendre sur un sujet, comme la crise des migrants, serait en capacité de mettre sur pied une force capable de résister à une intervention militaire russe massive à ses frontières, qui plus est sous la menace d’utilisation d’armes de destruction massive ultra-perfectionnées. Certains officiers de l’Otan affirment que la somme des troupes européennes est équivalente à l’armée russe, mais, ils oublient, un élément important, l’armée européenne n’existe que sur le papier et n’a pas de langue de commandement…

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