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Pourquoi, en politique, la morale est une arme inefficace, voire dangereuse
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Editorial

Les débats se sont ouverts hier lundi à l'Assemblée nationale sur deux projets de loi visant à améliorer la transparence de la vie publique.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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« Peut-on agir moralement sans s'intéresser à la politique ?» L’édition 2013 du baccalauréat a commencé hier, comme chaque année, par l’épreuve de philosophie.  Au vu du sujet proposé aux candidats, le plus cancre d’entre eux n’aura pas eu de difficultés, faute de savoir citer Rousseau ou Bergson, à puiser dans l’actualité pour construire son plan de dissertation.

« Moraliser la vie politique » : l’expression revient en leitmotiv dans les propos des responsables politiques, à commencer par ceux du chef de l’Etat venu devant les caméras promettre aux Français la transparence et la publication du patrimoine des parlementaires et membres du gouvernement. Deux mois après, même en créditant François Hollande d’avoir pris la parole dans l’urgence du fracassant aveu de mensonge de Jérôme Cahuzac (et donc un peu groggy après ce qui fut un week-end de panique à l’Elysée…), il est impossible de ne pas constater que le président de la République a fait purement et simplement machine arrière sous la pression des députés de sa propre majorité.

Ce résultat n’est pas très différent de celui de la promesse de campagne du candidat Hollande concernant le non-cumul des mandats. Ca va se faire, promet l’exécutif. Mais on ne sait pas encore bien quand. Seule certitude : pas tout de suite ! Il est urgent d’attendre ! Même les rares parlementaires opposés au principe du cumul, à l’instar de Bernard Roman, député socialiste rapporteur de la dernière loi sur le sujet en 2000, sont contraints de baisser pavillon, tant le courage du gouvernement face aux récalcitrants est inversement proportionnel aux gonflements de poitrine de François Hollande lorsqu’il évoquait le sujet pendant sa campagne.   

Voilà deux preuves, parmi tant d’autres, que vouloir « moraliser la vie politique » n’est pas la bonne façon d’appréhender les choses pour tenter de les faire changer. D’abord parce que moraliser la politique voudrait que notre système moralise les hommes et les femmes qui le dirigent. C’est là la fonction d’un directeur de conscience, d’un guide spirituel ou religieux… certainement pas d’une démocratie, laïque qui plus est.

Ensuite, parce qu’il est injuste et dangereux de vêtir les citoyens d’un costume de Torquemada. Qui n’a jamais fait d’entorse au système, chacun à son niveau, pour en tirer un bénéfice quelconque ? Quelle légitimité aurions-nous, individuellement, à faire valoir notre morale (fort souvent pas tout à fait identique à celle de notre voisin) ? Des règles précises et des systèmes de contrôle sont nécessaires, pas la morale.

Le résultat de l’élection législative partielle de Villeneuve-sur-Lot qui a vu dimanche dernier le candidat du Front national crédité de plus de 26% des voix et s’assurer ainsi une participation au second tour est une autre démonstration de l’inefficacité de la morale en politique.

Il y a trente ans que la lutte contre le Front national passe par la « diabolisation » du parti des Le Pen. Les électeurs s’en moquent. Les succès du FN vont grandissants (attention toutefois aux chimères des sondages et à l’illusion des chiffres. Villeneuve sur Lot nous montrent une fois encore que plus qu’une « montée du Front National », nous assistons à celle de l’abstention des autres électeurs. Mais bon, le désagréable résultat est le même à l’arrivée…).

Il est grand temps de cesser de faire des moues dégoûtées ou de pousser des cris horrifiés en parlant du FN ou en discutant de ses thèmes de prédilection et de s’opposer politiquement au parti de Marine Le Pen. Sur bien des sujets, à commencer par les propositions économiques du FN, ça ne devrait pas être trop compliqué.

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