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Pour un Etat de droit
©Reuters

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Alors que la République française puise son essence dans l'héritage des Lumières, la notion d'Etat de droit chère notamment à Jean-Jacques Rousseau se trouve aujourd'hui largement remise en cause.

Christian  Vanneste

Christian Vanneste

Christian Vanneste est ancien député RPR puis UMP, honoraire maintenant après 3 mandats, Président du Rassemblement Pour La France (RPF) et de La Droite Libre, Président d'honneur de Famille et Liberté, auteur de Pour Une France Libérée (Tatamis) et de M... Au Lobby Gay (Mordicus)

 
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Comme Jean-Jacques Rousseau l'écrivait dans le Contrat social, "force ne fait pas droit, et (qu') on n'est obligé d'obéir qu'aux puissances légitimes". Il est étrange que dans un pays dont les institutions s'inspirent davantage de Rousseau que des auteurs libéraux, ce principe, sans lequel il n'y a ni République, ni démocratie, ni même d'Etat digne de ce nom, soit si peu respecté.

Deux questions se posent : tout d'abord, quelle est la première mission de l'Etat ? Comme le dit l'article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen, "le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme". "Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression". L'Etat doit, pour atteindre cet objectif, assurer la loi et l'ordre. Il bénéficie pour cela de ce que Max Weber appelait le monopole de la violence légitime. Autrement dit, il est seul à pouvoir faire usage de la force pour que le droit soit respecté. Or, le pouvoir de plus en plus soucieux des effets médiatiques de ses décisions a pris l'habitude de louvoyer pour éviter les accidents, les blessés et les morts. Il pratique "l'euphémisation" de la violence, autrement dit il n'ose plus accomplir sa mission essentielle. L'abîme se creuse entre les déclarations du Premier ministre, plus "déterminé", plus "mobilisé" que jamais et qui dit "maîtriser la situation", et la chienlit qui existe à l'état endémique dans certains secteurs et s'installe parfois brutalement au coeur de la vie du pays.

Il y a, dans notre pays, des zones de non-droit où prospèrent les trafics et où les bandes règnent, des quartiers, voire des communes. Les règlements de comptes à l'arme de guerre à Marseille en témoignent. De nombreux clandestins franchissent nos frontières et on les retrouve installés dans des camps sauvages ou des locaux occupés au mépris de la loi. Lorsque des projets d'infrastructures rencontrent des oppositions, des groupes implantent des ZAD (Zones à Défendre) en affirmant la légitimité de leur action face à celle de la loi. En plein état d'urgence après les attentats islamistes, la place de la République est squattée et lors des manifestations contre la loi El Khomri, des débordements d'une rare violence sont sciemment organisés contre les forces de l'ordre par des groupes d'extrême-gauche parfaitement connus des services de police. Ils s'attaquent aussi au mobilier urbain, aux commerces et aux véhicules des particuliers. Enfin, un syndicat marxiste résiduel, la CGT, l'un des plus importants, mais dans un pays très faiblement syndicalisé, s'arroge le "droit" de bloquer des raffineries, en ce moment même. Ces pratiques, devenues courantes en France, bénéficient des légendes révolutionnaires qui, de 1789 à 1968, ont mis le désordre improductif et la violence suicidaire à l'honneur. Or, le fait que la liberté de circuler, de travailler, que la propriété, la sécurité ne soient pas assurées par l'Etat empêche de considérer la France comme un Etat de droit.

Se pose alors la seconde question : qui est légitime ? L'Etat ou l'opposant qui ferait usage de son "droit de résistance à l'oppression" ? On observera que la violence des minorités qui proclament leur légitimité supérieure se développe paradoxalement dans des Etats comme la France qui connaissent des élections régulières, des processus politiques constitutionnels, une autorité judiciaire trop lente, certes, mais qui jouit d'une indépendance relative. On la rencontre peu dans des régimes dictatoriaux. Des réseaux d'associations soutiennent le déploiement de cette zone grise par rapport à la loi. On favorisera donc au nom de la "solidarité" le passage de la frontière aux migrants, le logement des clandestins. A l'autre bout de la chaîne, on s'autorisera à la violence contre la police au nom d'une conception folle de la justice sociale. Il est nécessaire de distinguer les méthodes de contestation et les pouvoirs qui sont visés. Les "lanceurs d'alerte" qui prennent le risque de s'affranchir de la loi, ou du contrat qui les lie, pour informer l'opinion d'un dysfonctionnement qui nuit au bien commun, possèdent à l'évidence une "légitimité morale". La désobéissance civile que l'on tolère à gauche, et beaucoup moins pour les opposants à l'avortement, par exemple, est au contraire incompatible avec une démocratie qui fonctionne en respectant sa Constitution. La violence, enfin,  doit être sévèrement réprimée, puisqu'en l'acceptant au détriment des citoyens et des contribuables, l'Etat ne remplit plus sa part du Contrat. L'article 49/3 est constitutionnel. Son application ne donne aucun droit à la rébellion. On comprend en revanche que celle-ci naisse dans des pays où c'est l'Etat en apparence démocratique qui s'en prend aux droits des citoyens : la Turquie ou le Venezuela. Mais c'est beaucoup plus risqué...

La  solution à cette dérive française offre deux volets. Il faut qu'un gouvernement légitime puisse user de son droit de répression lorsque ses opposants sortent du cadre de la loi. Il est frappant de constater que cette répression a été plus forte contre les pacifiques "marcheurs pour tous" et autres "veilleurs" qu'elle ne l'est contre les "casseurs" (Eric Brunet article NdF) . Il faut aussi bien sûr que dans ce but la justice soit plus rapide et efficiente. Mais il faut surtout, et c'est le second point, qu'un renouveau soit insufflé à la légitimité démocratique. Le Référendum d'Initiative Populaire, à l'échelon local, ou au niveau national, avec ses trois possibilités : veto d'une loi votée au Parlement, proposition de loi, réforme constitutionnelle, rendraient les contestations illégales et violentes totalement illégitimes et inacceptables. Ainsi, la loi sur le travail serait ajournée dans l'attente du vote populaire, la suspension d'un projet comme l'Aéroport de ND-des-Landes serait suspendu à un scrutin régional décisionnel.

Il est nécessaire de remettre l'Etat à sa place dans une démocratie moderne, mais à condition qu'il occupe toute cette place et sans faiblesse.

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