PFUE : Emmanuel Macron s'accapare l'agenda institutionnel européen et en oublie de faire des annonces concrètes<!-- --> | Atlantico.fr
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Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'une conférence de presse sur la présidence française de l'UE, le 9 décembre 2021.
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'une conférence de presse sur la présidence française de l'UE, le 9 décembre 2021.
©LUDOVIC MARIN / PISCINE / AFP

Avenir de l'Europe

Emmanuel Macron a exposé ses priorités pour la présidence française du Conseil de l'Union européenne lors d'une conférence de presse ce jeudi. Quels sont les principaux enseignements du discours du chef de l'Etat ? Ses propositions sont-elles à la hauteur des nombreux défis et des crises traversées par l'Europe ?

Guillaume Klossa

Guillaume Klossa

Penseur et acteur du projet européen, dirigeant et essayiste, Guillaume Klossa a fondé le think tank européen EuropaNova, le programme des « European Young Leaders » et dirigé l’Union européenne de Radiotélévision / eurovision. Proche du président Juncker, il a été conseiller spécial chargé de l’intelligence artificielle du vice-président Commission européenne Andrus Ansip après avoir été conseiller de Jean-Pierre Jouyet durant la dernière présidence française de l’Union européenne et sherpa du groupe de réflexion sur l’avenir de l’Europe (Conseil européen) pendant la dernière grande crise économique et financière. Il est coprésident du mouvement civique transnational Civico Europa à l’origine de l’appel du 9 mai 2016 pour une Renaissance européenne et de la consultation WeEuropeans (38 millions de citoyens touchés dans 27 pays et en 25 langues). Il enseigne ou a enseigné à Sciences-Po Paris, au Collège d’Europe, à HEC et à l’ENA.

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Atlantico : Depuis l'Elysée, Emmanuel Macron a tenu une conférence de presse afin de présenter ses priorités pour la présidence française du Conseil de l'Union européenne, qui va débuter le 1er janvier. L'objectif avancé par le chef de l'Etat durant cette présidence est de passer à une Europe « puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maître de son destin ». Qu’avez-vous pensé de ses choix politiques et de la pertinence des dossiers évoqués ?

Guillaume Klossa : Ce qui m’a frappé dans la conférence de presse d’Emmanuel Macron devant la presse, c'est le portage politique très fort de l’ensemble de l’agenda institutionnel européen des prochaines années. Il a évoqué le plan de travail sur lequel les institutions européennes se sont mises d’accord et les a repris à son compte. Plus que dans une présidence du conseil de l’Union européenne, il a voulu donner le sentiment de débuter une présidence de l’Union européenne, ce qui n’est pas le cas. Il a utilisé le « nous » pour parler des européens, comme s’il avait la charge de l’avenir de l’Europe. Ce très large tableau affichant de multiples priorités reflète moins les priorités d’une présidence française que de l’UE dans son ensemble.

Emmanuel Macron s'est une nouvelle fois posé en défenseur d'une Europe plus puissante et renforcée. C'est le rôle qu'il a voulu endosser depuis le début de son mandat. A dresser un portrait trop large ne risque-t-il pas de décevoir ?

Le risque est que la France est l’un des pays où la confiance en l’Union européenne est la plus faible. Dans les autres pays, la réconciliation a majoritairement eu lieu. Ce qui est paradoxal, c’est que les Français ont envie de se réapproprier le sujet européen, on le voyait dans un sondage le Figaro récent, mais le président est resté très général. Il n’a précisé aucun aboutissement ou calendrier concret des négociations. Cela a montré que le président avait une vraie vision européenne et maîtrisait les sujets. Mais cela s’est fait au détriment d’une présentation précise avec des objectifs et des exigences de résultats.

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Est-ce qu’il faut analyser cette manière d’aborder la conférence de presse dans le contexte de la présidentielle ?

C’est possible. Mais le vrai sujet, si la France veut avoir un leadership partagé avec le nouveau chancelier allemand Scholz, le président du conseil italien Draghi ou le Premier ministre grec Mitsotákis, il faut que les partis travaillent sur le sujet européen et se le réapproprient. On a le sentiment qu’Emmanuel Macron monopolise ce terrain et que les autres partis n’entrent pas sur ce terrain car l’Europe est devenue un sujet de confrontation avec le président. C’est malsain et cela peut créer de la rupture, en tout cas cela mine l’influence française aujourd’hui.

Quelles sont ses propositions les plus ambitieuses ? Quels sont ses plus gros chantiers ? 

Il a évoqué des chantiers mais sans préciser les résultats attendus donc c’est difficile de le dire. La (quasi)seule nouveauté est la volonté d’une concertation pour écrire une histoire de l’Europe objective. Je trouve que c’est une très bonne idée. En revanche, il a mis l’accent sur la nécessité d’une Europe plus humaine et de l’engagement des citoyens européens, en mettant en avant les résultats de la Conférence sur l’avenir de l’Europe qu’il souhaite voir aboutir le 9 mai. Or cette conférence débutée il y a un an est complètement méconnue des citoyens et n’en a engagé que quelques centaines alors que c’était l’occasion d’un engagement massif. J’aurais aimé que le président annonce que la Conférence était prolongée d’un an, comme dans le calendrier initial, et qu’on réduise les modalités d’accès pour permettre d’engager plus de citoyens. Il aurait été bon d’orienter cette conférence vers les enjeux de 2030-2040 car les propositions qui apparaissent sont plus les préoccupations d’aujourd’hui que les défis du monde de demain. En résumé, j’ai été convaincu que le président de la République maîtrisait les sujets européens, mais je reste attentif à ce que ne se soit pas uniquement une posture électorale. Il faut qu’il ait un vrai souci d’agir sur les dossiers structurants pour l’avenir de l’Europe : sur le numérique avec le DSA et le DMA, sur la transition énergétique, sur le développement d’un marché intérieur en matière de défense, etc. Il serait bon qu’on ait de vrais résultats sous présidence française.

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