Les trois raisons pour lesquelles la rigueur maastrichtienne ne s’impose plus<!-- --> | Atlantico.fr
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Valerie Pécresse lors d'une séance photo, le 8 avril 2021 à Paris.
Valerie Pécresse lors d'une séance photo, le 8 avril 2021 à Paris.
©JOEL SAGET / AFP

Atlantico Business

Valérie Pécresse s’engage sur une politique budgétaire stricte, mais c’est pour essayer de mieux rallier les électeurs de François Fillon. Sur le terrain économique, ce retour à l’austérité et au respect des normes maastrichtiennes ne s’impose plus. 

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La candidate LR, Valérie Pécresse, a choisi de présenter un programme économique axé sur les déficits publics et le retour à une rigueur budgétaire. Il est évident qu‘elle revient là sur le terrain qu’avait défendu François Fillon pour s’attacher cette clientèle de droite qui n’a pas trouvé chez les autres candidats un discours et un programme qui correspondent à leur exigence. 

Le culte de la rigueur budgétaire se justifiait lors de la campagne présidentielle de 2017 à laquelle François Fillon se présentait. D’abord, parce que depuis la crise de 2009/10, les gouvernements successifs n’ont pas réussi à rétablir l’équilibre des comptes publics, ce qui a complètement décrédibilisé la France au sein de l’Union européenne, face à une Allemagne qui servait de banquier à tout le monde et cherchait ainsi à conforter sa surpuissance économique. 

En 2012, Nicolas Sarkozy a perdu les élections, faute d’avoir été compris dans sa gestion de la crise financière qui a pourtant permis d’éviter la catastrophe. 

François Hollande, qui lui succède, ne va pas régler la dette des subprimes puisqu’il va essayer de relancer l’activité par des dépenses publiques. La croissance n’est pas au rendez-vous mais le déficit est là. 

Pour François Fillon, il n’y a pas d’autres solutions que de faire campagne sur la nécessité de ramener le déficit public dans les normes européennes pour obtenir des lignes de crédit supplémentaires de la part de l’Allemagne. François Fillon perd les élections, balayé par les affaires. 

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En 2017, le scrutin va porter Emmanuel Macron au pouvoir avec une ligne stratégique forte : relancer la croissance par l’innovation et l’investissement. Mais la start-up nation sera frappée en plein vol par le Covid. 

Le bilan du quinquennat Macron est sujet à débat. D’un côté, la France n’aura pas trop mal géré la crise pandémique et la crise économique qui lui était attachée, mais de l’autre, la France est restée en panne de réformes structurelles promises. 

Valérie Pécresse a beau jeu de reprendre la partition Fillon, sur l’air de la rigueur nécessaire pour effacer la dette ; sauf que les circonstances sont très différentes. Le retour à l’austérité budgétaire est beaucoup moins urgent et moins opportun qu’avant.

1ère raison : la dette publique française traine une dette ancienne de fonctionnement et une dette nouvelle liée au Covid. Le total de cette dette avoisine les 120 % du PIB, mais elle a été financée à cout zéro. C’est à dire que les frais financiers globaux diminuent d’une année sur l’autre avec la croissance. L’Etat et les collectivités locales feraient des erreurs grossières de ne pas s’endetter à ce prix-là. Le problème est de savoir à quoi sert l’endettement. Si l’endettement sert à financer des dépenses de fonctionnement, c’est une catastrophe financière. Si cet endettement sert à financer l’investissement, c’est tout bénéfice parce que la dette d’investissement génère mécaniquement les revenus qui serviront à la rembourser. 

La dette accumulée pendant le Covid est une dette qui a servi à protéger les actifs de production de la destruction et à réformer le système pour qu'il s’adapte aux mutations digitales et environnementales. Personne de censé ne peut s’opposer à ce type d’investissement. 

2e raison : l’action des banques centrales, et l'équilibre financier international qui appuie l’endettement sur des montagnes d’épargne (épargne intérieure et réserves des pays émergents) garantit, pour quelques années encore, le maintien des taux d’intérêt à taux très faibles. Les risques d’une inflation généralisée sont très faibles. Le prix de l’argent restera encore longtemps proche de zéro. 

3e raison : la situation politique nouvelle en Allemagne, avec un large gouvernement de coalition, laisse penser que l’Allemagne va pouvoir abandonner ses exigences de rigueur absolue.  Le marché intérieur va se détendre, les impératifs de compétitivité externe seront moins prégnants. Enfin, l’Allemagne a accepté de garantir les emprunts européens, ce qu’elle a déjà commencé de faire. Le résultat est que l’Allemagne va alléger la pression sur Bruxelles et accepter d’assouplir les critères de Maastricht. 

 L‘Europe va s’engager dans une chasse systématique aux mauvaises dettes, c’est à dire les endettements qui sont contractés pour payer les frais de fonctionnement et les prestations sociales, de façon à préserver les bonnes dettes, c’est à dire les financements d’investissement. A noter que l’Europe va aussi engager une réforme pour exclure des dépenses budgétaires, les dépenses militaires ou d’ordre public. L’Europe toute entière a besoin de stabilité et de lutter contre tous les risques de désordre et de violence (guerre et terrorisme) il y a des pays qui dépensent beaucoup d’argent dans la défense nationale (la France) et d’autres qui en font moins (l’Allemagne). Les travaux de réformes sur le volet budgétaire de Maastricht devraient permettre de mutualiser ce type de dépenses. 

En fait, la réduction des déficits publiques n’est évidemment pas urgente. Ce qui est urgent en revanche, c’est la réduction des dépenses publiques et sociales et c’est beaucoup plus compliqué politiquement. 

Les déficits publics se réduiront mécaniquement selon la croissance économique, à une condition : que le stock de dettes ne s’accroisse pas. 

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