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Les gens consomment des dizaines de milliers de particules microplastiques chaque année, avec des conséquences encore inconnues sur la santé.
Les gens consomment des dizaines de milliers de particules microplastiques chaque année, avec des conséquences encore inconnues sur la santé.
©Denis CHARLET / AFP

Alimentation

Selon une nouvelle étude chinoise, l'absorption de particules de microplastique serait l’un des facteurs majeurs des maladies inflammatoires de l’intestin.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico : Une nouvelle étude chinoise explique que les microplastiques seraient l’une des clés des maladies inflammatoires de l’intestin ? La corrélation est-elle sérieuse ?

Stéphane Gayet : La recherche médicale actuelle a deux principaux objectifs. Le premier est de s’évertuer à identifier les causes des maladies et à comprendre le mécanisme de leur action pathogène. Le second est de mettre au point des traitements étiologiques, c’est-à-dire agissant sur la ou les causes déjà identifiées des maladies. Quant à la recherche sur les traitements symptomatiques – qui diminuent les effets pénibles des maladies –, elle est menée parallèlement et en général de façon indépendante de ces deux principaux objectifs.

En dehors des maladies génétiques héréditaires, les deux causes essentielles de maladie sont les agents infectieux (prions, virus, bactéries, champignons microscopiques, protozoaires et autres parasites) et les agents toxiques. Quand on qualifie une maladie d’auto-immune ou d’inflammatoire, cela ne désigne pas véritablement une cause, mais des phénomènes que l’on constate sans vraiment les expliquer. Quant aux maladies cancéreuses, on considère qu’elles sont multifactorielles avec, plus particulièrement, des causes infectieuses et toxiques.

Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) sont aujourd’hui fréquentes. Les deux types principaux en sont la maladie de Crohn, qui peut atteindre tout le tube digestif de la bouche à l’anus, et la rectocolite hémorragique (RCH) ou colite ulcéreuse, qui n’atteint que le gros intestin ou côlon. Ce sont deux maladies prolongées, pénibles et invalidantes, dont on ignore encore les causes précises, bien que divers microorganismes (virus, bactéries…) soient fortement suspectés.

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Des chercheurs chinois ont analysé des échantillons de matières fécales de personnes atteintes de maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI). Leurs échantillons contenaient à la fois plus de microplastiques – une fois et demie plus – et plus de microplastiques de petite taille – diamètre inférieur à 50 micromètres ou microns - que les échantillons de personnes en bonne santé. L’étude a porté sur 52 personnes atteints de MICI et 50 personnes saines. La différence est statistiquement significative. Cette corrélation semble donc réelle, mais on n’a pas encore de quoi l’expliquer.

Nous avons déjà parlé des microplastiques dans la poussière de maison

Toujours est-il qu’il est possible que des microplastiques introduits dans l'intestin participent à la physio-pathogénie (processus de survenue) des MICI. On savait déjà que des microplastiques pouvaient provoquer, chez des animaux, une inflammation intestinale, une perturbation de leur microbiote digestif ainsi que divers autres troubles intestinaux.

Alors que les microplastiques sont partout, si les résultats de cette étude sont fiables, cela veut-il dire qu’il faut s’attendre à voir augmenter le nombre de maladies inflammatoires de l’intestin ?

Selon plusieurs estimations récentes, les gens consomment des dizaines de milliers de particules microplastiques chaque année, avec des conséquences encore inconnues sur la santé.

Les auteurs de cette étude sur les MICI – chercheurs de l'Université de Nanjing en Chine - affirment que l’ingestion humaine de microplastiques est inévitable, en raison de leur omniprésence dans de nombreux aliments ainsi que dans l’eau de distribution. Les microplastiques les plus fréquemment trouvés sont le polyéthylène téréphtalate (PET) et les polyamides. Le PET est un plastique transparent, solide et léger, qui est largement employé pour emballer les aliments et les boissons, en particulier les boissons gazeuses et les jus de fruit. Quant aux polyamides, ce sont surtout les nylons, très utilisés dans les vêtements et les produits de finition.

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On savait déjà que la prévalence – nombre de cas de maladie dans une population définie à un moment donné – des MICI augmentait à l’échelle mondiale depuis des années. Ces maladies sont apparues au cours du XXe siècle et l’on n’en trouve pas trace, semble-t-il, avant l’ère des matières plastiques. S’il est donc probable que les particules microplastiques jouent un rôle clef dans la physio-pathogénie des MICI, leurs causes sont vraisemblablement plurielles. On peut suggérer le rôle de certaines bactéries dont le pouvoir pathogène serait activé en présence de certaines particules microplastiques.

Quoi qu’il en soit, la prévalence et l’incidence – nombre de nouveaux cas de maladie dans une population définie, au cours d’une période donnée – des MICI devraient croître toutes les deux.

C’est l’occasion de préciser que la pathologie humaine comprendra de plus en plus de maladies prolongées, chroniques.

Existe-t-il des moyens de se protéger des microplastiques et de protéger notre intestin contre ces maladies ?

Il est toujours possible de se protéger vis-à-vis d’agents pathogènes, qu’ils soient infectieux ou toxiques.

En ce qui concerne l’apport digestif, il faut commencer par éviter l’eau conditionnée en bouteilles plastiques. Mais boire de l’eau de distribution ne règle pas entièrement ce problème, étant donné qu’elle contient elle aussi des particules microplastiques, cependant en quantité bien moindre.

Les films plastiques qui recouvrent les fruits, les légumes, les plats cuisinés… sont à éviter, car ils relarguent des particules microplastiques que l’on ne peut pas éliminer par rinçage ou nettoyage.

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Il faut donc faire la chasse aux films et emballages plastiques. Par ailleurs, on retrouve ces microparticules plastiques dans le corps de nombreux animaux qui font partie des denrées alimentaires courantes. C’est donc un argument de plus pour privilégier les aliments de nature végétale.

Dans l’intestin, toute inflammation a tendance à augmenter l’absorption des substances étrangères : il est donc essentiel de lutter contre l’inflammation intestinale, à laquelle certains aliments plus que d’autres participent : le gluten de blé industriel, les aliments acides et irritants (vinaigre, épices…). Il appartient à chacune et à chacun de bien connaître son tube digestif : il n’est pas normal d’avoir des douleurs abdominales après un repas, ni d’avoir de la diarrhée, ni d’être constipé (on devrait s’exonérer chaque jour), ni d’avoir des matières fécales d’aspect inhabituel…

Il faut également avoir à l’esprit le fait que le tissu adipeux est capable de conserver de nombreuses substances toxiques : la lutte contre la surcharge pondérale (toujours de nature graisseuse) est un autre moyen de se protéger.

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