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Les jeux de société font leur grand retour. Et voilà ceux que vous devriez essayer pendant les vacances de février
©ROSLAN RAHMAN / AFP

Comeback

Nadine Seul

Nadine Seul

Nadine Seul est Commissaire du Festival international des jeux de Cannes, organisé par la Direction de l'Événementiel du Palais des Festivals et des Congrès de la Ville de Cannes.

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Atlantico : Le jeu de société revient en force aujourd'hui : comment expliquez-vous cette bonne santé ? Qui sont les adeptes du jeu de société aujourd'hui ? Des enfants ?

Nadine Seul : Notre festival des jeux, à Cannes, qui se tient sur 30.000 mètres carrés au cœur du Palais des Festivals et des Congrès est là pour démontrer que le jeu de société s'adresse à tous les publics, à toutes les tranches d'âge, à toutes les catégories socio-professionnelles. Au fil des ans, on voit une clientèle de plus en plus large, diverse et nombreuse venir découvrir nos nouveaux jeux. Ce n'est donc plus réservé aux enfants. Et je crois, contrairement à ce que beaucoup pensent, que le jeu-vidéo y est un peu pour quelque chose. Car au départ de ce qui allait devenir la première "industrie culturelle", on a beaucoup craint pour le jeu de société.

En fait, le jeu-vidéo a vraiment contribué à la déculpabilisation des loisirs avec l'arrivée d'une génération d'adultes pour lesquels le jeu est une culture à part entière et donc qui aujourd'hui se tourne aussi bien vers les jeux-vidéo que les jeux de société. Les ados qui, à la fin des années 1980-90 ont commencé à jouer aux jeux-vidéo considèrent le jeu comme quelque chose de tout à fait naturel. Ils sont devenus adultes, souvent des parents et donc transmettent cette passion à leurs enfants, à leurs environnements, à leurs amis. C'est pour cela, je pense, que nous avons de plus en plus d'adultes joueurs. Le jeu-vidéo a contribué au développement de cette culture ludique en général.

Ensuite, il faut mettre en avant le travail des éditeurs, des auteurs et des dessinateurs. On a vu une génération d'éditeurs qui sont arrivés sur le marché dès les années 1990 avec Gigamic ou Asmodee par exemple, et qui maintenant sont tous des success stories. D'autres les ont suivis, de jeunes éditeurs passionnés qui ont abordé ce métier parce qu'au début ils étaient avant tout des amateurs de jeu.  Ils faisaient donc souvent de leur passion leur métier. Ils ont beaucoup travaillé, notamment sur l'écriture des règles, sur la présentation des jeux, pour que les règles soient moins rébarbatives. Ils ont beaucoup travaillé sur la qualité, le packaging, ont travaillé avec des illustrateurs, et nous avons la chance d'avoir en France de très bons illustrateurs. Nous mettons une quinzaine d'entre eux en avant lors du Festival dans une exposition de leurs œuvres. C'est un bon moyen de se rendre compte de la richesse de ce milieu chez nous.

Ont émergé aussi des auteurs, de plus en plus nombreux. Bien sûr, il y a des stars, comme Bruno Cathala (Queendomino), Antoine Bauza (7 Wonders), mais aussi bien d'autres.

Le monde du jeu de société a donc connu une forte émulation créatrice ces dernières années ?

Exactement. Et on a vu apparaître des jeux très accessibles, qui facilitent la démocratisation, pratiques à déplacer et à des prix modiques. Le public s'est élargi. On a donc d'un côté des jeux aux règles simples qui demandent peu de matériel, des parties rapides, comme ceux de Cocktail Games. De l'autre, il existe des jeux plus complexes, aux parties longues et au matériel abondant.

Pour ceux qui ne connaissent que le Monopoly ou presque et ne jouent plus beaucoup, que leur conseillerez-vous comme jeux ? Pour des enfants ? Pour du grand public ? Pour des experts ?

Ce sont les catégories choisies par notre sélection annuelle, récompensée par l'As d'or, avec des jeux qui sont vraiment destinés à tous les types de public.

Dans la catégorie enfant, (à laquelle les parents sont aussi conviés) l'As d'or a été gagné par un jeu qui s'appelle "Nom d'un renard", jeu avec de très belles illustrations où la "poulice mène l'enquête". Coopératif, basé sur la déduction et adapté au jeu en famille, les joueurs se mettent en quête d'un renard qui a volé l'œuf d'or du poulailler, et il va falloir le démasquer. Il est équipé d'un petit scanner où les enfants vont passer les indices pour voir qui pourrait être le coupable.

Dans cette catégorie, nous avions nommé Haba, grand éditeur qui propose souvent des jeux pour les tous petits avec "Booum !" Cela se passe lors d'une ruée effrayée vers l'or, où les joueurs envoient des bâtons de dynamite pour récupérer les précieuses pépites ! Mais elles ne sont pas toutes excellentes !

L'autre jeu sélectionné dans cette catégorie était "La sorcière Perlatette", où des sorcières déboulent sur un plateau mouvant, jeu magique qui fait travailler la dextérité, la cohésion d'équipe…

Ces trois jeux sont très représentatifs de ce que cherchent les familles actuellement. Avant on nous demandait plutôt des "jeux éducatifs". Du genre qui vous apprend à retenir les multiplications, avec des visées scolaires. Aujourd'hui, ils nous demandent de l'ambiance, du partage de moments familiaux. Les parents n'ont plus peur de jouer avec les enfants. Il y a quelques années, les enfants jouaient entre eux, désormais ce terrain est partagé, lors des moments privilégiés le soir avant de se coucher ou le week-end. Ce sont donc les trois jeux qui nous ont marqué, mais il y en a bien d'autres, ce ne sont que trois jeux parmi plein d'excellents jeux. La nouvelle gamme de jeux "Loki" mérité par exemple le détour.

Dans la catégorie expert, le grand vainqueur est "Terraforming Mars", qui nous vient des Etats-Unis. Édité par Intrafin, l'objectif est d'atteindre Mars et de rendre la planète rouge habitable en créant une atmosphère, augmentant la température etc. C'est un jeu de gestion, de construction, et s'adresse à des joueurs passionnés, parce qu'il faut compter au moins une heure et demi de jeu !

Dans cette catégorie, nous avions nommé "Great Western" de Gigamic, où il s'agit de devenir le meilleur éleveur de l'Ouest. Beaucoup de stratégie, des mécaniques subtiles qui rendent chaque action décisive.

Le troisième se nomme "Horreur à Arkham", un jeu de carte, qui nous plonge dans un univers loftcraftien très effrayant.

Enfin nous avons notre catégorie tout public, où le grand gagnant est "Azul", jeu où il faut devenir un artisan carreleur et faire de magnifiques azulejos, comme c'est le cas dans les plus beaux palais du Portugal et du Sud de l'Espagne. C'est un jeu de stratégie accessible au plus grand nombre, dès 8 ans. Il est magnifiquement illustré et prend tout de suite.

Après nous avions nommé un jeu qui symbolise très bien ces jeux d'ambiance, rapide, qui marchent bien en ce moment. Il s'appelle "Twin It" de Cocktail Games. C'est un jeu d'observation complètement frénétique. Cela fonctionne avec plein de cartes très colorées et très similaires et il faut trouver des paires vraiment identiques. Étant donné la similarité des cartes, c'est très rapide ! Ce jeu s'installe en une minute.

Enfin nous avions un excellent jeu de dé avec "Dice Forge", et "Flamme rouge" qui va permettre de se lancer dans le frisson d'une course cycliste. Des jeux très différents qui sont représentatifs de cete richesse du marché du jeu en France. Et que l'on trouve dans notre Festival International des jeux.

Avance-t-on aussi vers une hybridation du numérique et du jeu de société ?

On assiste à une digitalisation de plus en plus importante des jeux dits de plateau et des jeux de cartes. Beaucoup d'éditeurs de jeux de société proposent d'ailleurs depuis déjà plusieurs années une version numérique de leur jeu. C'est le cas notamment des "Aventuriers du Rail" depuis longtemps. Asmodee a lancé Asmodee Digital qui propose des versions numériques de grands succès tels que Avalon, Carcassonne, Splendeur etc.

On voit aussi apparaitre des jeux qui utilisent des applications pour aider les joueurs. C'est le cas de Unlock qui avait été primé en 2017 et reprend le principe des Escape Rooms, très à la mode. L'application joue le rôle timer, de musique d'ambiance et permet d'obtenir des indices quand on sèche. Voilà un exemple des passerelles qu'on crée entre jeu-vidéo et jeu de plateau. Et on en revient à la complémentarité que je vous décrivais tout à l'heure.

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