Les chefs d’entreprise sont effrayés par les risques d’une décroissance écologique <!-- --> | Atlantico.fr
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Les estimations les plus récentes chiffrent à 40 milliards par ans les investissements dans l’économie verte.
Les estimations les plus récentes chiffrent à 40 milliards par ans les investissements dans l’économie verte.
©GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Atlantico Business

Entre le projet de loi sur l’industrie verte, le débat lancé par les courants radicaux de l’écologie, les chefs d’entreprise craignent le pire pour l’avenir de l’industrie en France d’autant qu’une partie de la population suit le mouvement de lutte violente contre le réchauffement climatique.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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« Combattre le réchauffement climatique, les chefs d’entreprise le comprennent très bien et s’y préparent, mais combattre le réchauffement climatique à n’importe quel prix, leur réponse est non ! »  Les chefs d’entreprise pensent que cette volonté se traduira par une décroissance programmée des sociétés occidentales.

Le débat qui s’annonce à propos du projet de loi portant sur une politique d’industrialisation verte promet d’être violent parce que la nécessité de protéger l’environnement a révélé que certains groupes politiques nourris par une écologie radicale, était en mesure de convaincre une (presque) majorité de Français qu’il fallait absolument changer de système economique avec des changements de paradigme politique.  

Et que ce changement-là passait finalement par un ralentissement de l’activité economique.

Dans le projet de loi, deux points vont cristalliser le débat en dehors des articles détails ou le diable s’est caché et n’a pas encore relevé la tête.

1er point : le projet de bloquer l’artificialisation des sols à zéro. A priori c’est très technique. Mais, en clair, la loi stipulerait dans sa première mouture, l’interdiction d’accaparer le moindre M2 de foncier nouveau pour construire un logement, un commerce, une usine, un équipement collectif.

Seule solution pour investir, utiliser des friches industrielles qui représentent à peine 30% de ce dont on aurait besoin.

Ça signifie qu’on ne pourra pas construire de nouvelles usines ou alors qu’il faudra perdre beaucoup de temps pour obtenir des dérogations ou purger les recours.

Ça signifie aussi qu’on ne pourra pas construire de logements neufs. Or, il nous manque 2 millions de logements neufs et surtout il nous faudrait passer à 400 000 par an contre moins de 200 000 aujourd hui. D’où la crise historique qu’on se prépare dans le logement.

Cette disposition normative est assez délirante mais dans les faits, nous y sommes déjà puisque la majorité des maires qui sont tout puissants pour délivrer des permis de construire ont déjà tout bloqué.

2e point. Le financement de la transition écologique n’est pas prévu. Les estimations les plus récentes chiffrent à 40 milliards par ans les investissements dans l’économie verte. Les moyens de financement n’existent pas. Il y a trois solutions principales : les impôts et taxes, un impôt supplémentaire sur les super riches et l’épargne. Le gouvernement penche plutôt pour une mobilisation de l’épargne disponible et quasi liquide. L’épargne francaise qui dort, est considérable, plus de 3000 milliards d’euros, si on cumule le montant des livrets A, des comptes bancaires et à court terme dans les banques, l’assurance vie et le cash. C'est en gros l’équivalent du montant de l’endettement. On comprend que la France trouve à s'endetter sans difficulté. L’épargne liquide et disponible qui est placée sur le Livret A pourrait être fléchée vers les projets d’industrie verte. Avec 1000 milliards d’euros, on aurait quoi faire. Mais on sait déjà que l’extrême gauche, alliée par une partie de l’ancienne gauche, mais surtout les mouvements écologiques s’y opposent. Pour eux, mieux vaudrait augmenter les impôts et notamment l’impôt payé par les riches et même les super-riches.

Si, sur ces seuls deux points, le gouvernement ne parvient pas à dissuader les avocats de la zéro artificialisation des sols et de recourir à l’épargne, il est évident que les projets industriels s’organiseront au Portugal ou en Espagne mais ignoreront la France. Il est évident aussi que les super-riches finiront par faire leurs valises et s’installer en Suisse, en Belgique ou même au Maroc.

Les chefs d’entreprise dans leur immense majorité ne sont pas opposés à cette industrie verte. Ils le sont d’autant moins que le verdissement de leur fonction de production leur est nécessaire. Elle va dans leur intérêt parce que leurs clients le demandent. Les salariés et les actionnaires aussi. Donc les chefs d’entreprises sont dans cette logique-là. Mais ils ont aussi une obligation de résultat. Ils doivent délivrer des produits, des emplois et des salaires et enfin des investissements, donc de la croissance. Si l’obligation écologique les empêchent de travailler, ils baisseront les bras et abandonneront la course à la croissance.

Dons le problème va devenir insoluble. La France et ses 75 millions d’habitants ont besoin de croissance pour offrir des emplois de plus en plus sophistiqués, offrir un appareil de santé en équilibre, des transports, de digital internet etc. Bref les Français ont besoin d’avancer et d’évoluer dans un écosystème qui a une histoire certes, mais qui a encore besoin de délivrer de la richesse au plus grand nombre.

Tous les pouvoirs, d’ailleurs démocratiques ou autoritaires, ont fait des promesses de prospérité economique et sociale et tous, quand ils ne délivrent pas les résultats promis, finissent par avoir un accident mortel où sont violemment invités à partir en retraite, ou alors ils inventent un danger de l’extérieur pour faire la guerre. Ça occupe leur peuple.

La France a besoin de croissance parce que les Français ont besoin de croissance et protéger la santé, l’education, la sécurité, leur confort. Les chefs d’entreprise sont effrayés par l’idée que certains admettent l’idée que le seul moyen efficace de lutter contre le réchauffement de la planète est de moins produire, donc de moins consommer ou alors différemment. En attendant, les nouvelles lois et règlements, les courants écologiques nous inondent de projets d’interdits (moins de voiture, moins d’avion). Encore un effort et dès qu’on rentrera dans un hypermarché, on sera coupable de dégénérescence. C’est un peu l’effet Greta Thunberg.

Cette obsession de la non-croissance se nourrit d’une idéologie difficile à combattre parce qu’elle est pleine de bon sentiment, leurs militants appartiennent au camp du bien.

Le problème, c’est que beaucoup ont aussi un projet politique funeste. Ils ont envie d’accéder au pouvoir. Mais ils savent qu’ils n’arriveront jamais au pouvoir en passant par les processus démocratiques parce que la démocratie choisira toujours la croissance. Il leur faut donc semer le désordre pour déconstruire le système capitaliste. Sandrine Rousseau, est claire, mas pas qu’elle.  D’où les manifestations de rue  tous azimuts et les débordements de violence. Ils savent aussi que leur projet d’abaisser la croissance sera forcément à terme générateur de désordre et de manifestations sociales. Donc de fragilisation du pouvoir politique. Si la gouvernance croit toujours qu’elle peut gérer les révoltes sociales, elle se trompe. Les mouvements écologistes anti-croissance préparent bien autre chose qu’une simple révolte.

« Non sire ça n’ait pas une révolte… c’est une révolution! »

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