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Le miracle Satya Nadella à Microsoft : plus d'abonnés que Netflix, plus de revenus liés au Cloud que Google, et près de 1000 milliards de capitalisation boursière
©GABRIEL BOUYS / AFP

Stratégie payante

L'entreprise Microsoft a dépassé les 1000 milliards de dollars de valorisation boursière, le résultat d'une politique de transformation en profondeur menée par Satya Nadella.

David Fayon

David Fayon

David Fayon est responsable de projets innovation au sein d'un grand Groupe, consultant et mentor pour des possibles licornes en fécondation, membre de plusieurs think tank comme La Fabrique du Futur, Renaissance Numérique, PlayFrance.Digital. Il est l'auteur de Géopolitique d'Internet : Qui gouverne le monde ? (Economica, 2013), Made in Silicon Valley – Du numérique en Amérique (Pearson, 2017) et co-auteur de Web 2.0 15 ans déjà et après ? (Kawa, 2020). Il a publié avec Michaël Tartar La Transformation digitale pour tous ! (Pearson, 2022) et Pro en réseaux sociaux avec Christine Balagué (Vuibert, 2022). 

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Atlantico.fr : Concrètement quelle est cette stratégie qui a permis de remettre Microsoft sur les rails et de devenir la 3e entreprise dans le monde à atteindre une telle valorisation (derrière Amazonet Apple) ?

David Fayon : Ce seuil est évidemment symbolique car ce qui prime reste le long terme sachant que les entreprises leaders voici 5, 10, 20 ou 50 ans ne sont plus les mêmes. Jadis, c’était dans le secteur de l’automobile et de la pétrochimie. Désormais, c’est dans le numérique où tout va plus vite et où la disruption est rapide.

Au milieu des années 1990, Microsoft était vu comme l’entreprise à abattre alors qu’à présent c’est davantage Google et Amazon du fait de leur croissance insolente et leur position quasi-monopolistique qui rend toute taxation délicate car celle-ci peut être facilement répercutée sur les clients. Satya Nadella est le 3e CEO de la firme de Redmond après Bill Gates et Steve Ballmer. Il a su insuffler un changement d’esprit, une dynamique, une diversification avec également des achats stratégiques (LinkedIn, GitHub) à l’image des GAFA si bien que l’on parle de plus en plus des GAFAM.Le virage d’Internet avec les réseaux sociaux, le smartphone ou les moteurs de recherche n’avait pas été bien abordé par Microsoft avec une ascension respective de Facebook, d’Apple (et de Samsung) et de Google. En outre les versions successives de Windows, en position dominantepour les systèmes d’exploitation des PCmalgré l’essor de Linux ou des solutions bureautiques de Google, n’ont pas toutes été bien perçues.En témoignent les échecs de Windows 95 ou de Windows Vista, consommatrices en ressources et plus lentes en exécution. 

Le développement  de Microsoft est fulgurant pour l’offre cloud pour les entreprises. La part de marché de Microsoft avec l’offre Azure, que Satya Nadella avait précédemment contribué à développer avant d’être à la tête de l’entreprise, a bondi à 17 % au 4e trimestre 2018 face au 32 % du leader AWS du Groupe Amazon et au 8,5 % de Google. Satya Nadella n’a pas hésité non plus à abandonner certains projets et à réorienter la stratégie de l’entreprise comme la fin des développements sur mobile suite au rachat de Nokia, ce qui n’est pas simple car il peut être confortable pour le court et le moyen terme de ne pas changer une stratégie qui génère des bénéfices.Pour autant la constante depuis de longues années est que les profits de l’entreprise sont à deux chiffres, le premier étant un 2 !

Signalons qu’alternativement Apple, Amazon et Google ont été première capitalisation boursière. C’est un peu les leaders de l’« ATP des entreprises » avec des changements de n°1. Apple a du reste peut-être mangé son pain blanc. La somme des capitalisations boursières de Microsoft, Apple et Amazon est par ailleurssupérieure au PIB de la France, ce qui montre leur omnipotence. Pour autant, il peut avoir des fluctuations boursières importantes et en quelques mois, ces géants de la tech avaient perdu 30 % de leur capitalisation entre septembre et novembre 2018 illustrant aussi un triple caractère : fragile, spéculatif et incertain lié à la régulation notamment. En effet, il existe des risques d’amendes fortes du fait d’actions notamment en Europe (avec la Commissaire européenne à la concurrence Margrethe Vestagerqui a mené un combat contre les positions jugées quasi-monopolistiques et abusives de Google ou fiscales d’Apple) et même aux États-Unis. Ainsi Facebook, qui n’est pas encore au niveau de chiffre d’affaires des autres GAFA a provisionné 3 milliards de dollars au 1ère trimestre 2019 (cf. figure) par rapport à une possible amende de l’US Federal Trade Commission.

Cette stratégie d'orientation vers les abonnements, le cloud et les services serait-elle la clé aujourd'hui du succès des entreprises de la tech ?

En effet, les nouveaux modèles économiques associés ne sont plus basés comme avant sur les licences, ce qui constitue un gros changement commercial. Il n’y a pas que le produit au cœur de la transformation mais aussi la relation client et la façon de vendre l’offre et d’interagir avec l’écosystème. Par exemple Microsoft a conclu d’importants contrats avec les entreprises américaines Walmart ou Chevron en étant plus à l’écoute de leurs besoins.

Mais c’est aussi le virage de l’open source avec le rachat de GitHub qui est un autre pas culturel de franchi avec le fait que l’intelligence pour les développements ne se situe pas uniquement au sein de l’entreprise mais à travers un écosystème plus large.

Il convient en effet de ne pas faire reposer son modèle que sur un seul canal d’affaires. Ainsi Apple est fragilisé par une culture mono-produit, l’iPhone génère près de deux tiers de son chiffre d’affaires. Google et Facebook sont très liés à la publicité avec pour le premier cité les AdWords et AdSense et l’achat aux enchères des mots clés auprès du moteur de recherche. Aussi cette diversification peut s’avérer intéressante si elle est présentée de façon lisible aux actionnaires comme la mue par exemple de Google en Alphabet.

Quelles leçons peut-on tirer aujourd'hui de l'expérience de Microsoft dans le monde de l'entreprise ?

Il ne s’agit pas seulement de tirer profit de l’expérience de Microsoft mais des 9 fantastiques (GAFAM et NATU) plus généralement avec aussi le modèle de management de Google (petites équipes agiles, 20 % du temps personnel pour les fonctions de développement consacré à des projets personnels pouvant rejaillir sur l’entreprise, vie sur le campus, évaluation par les pairs, version bêta permanente, etc.). Pour autant du côté de Microsoft, c’est la capacité à pivoter dans la culture : passage d’un mode de version successive à une culture ouverte avec des essais et des erreurs comme il en existe dans la SiliconValley. Le fait qu’il existe d’autres relais de croissance sur lesquels il convient de miser et de se repositionner comme une start-up qui pivoterait. L’agilité est aussi le propre des grands groupes qui savent se remettre en question !

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