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Le froid affecte la productivité des femmes : quelle température choisir pour assurer l’efficacité de tous au bureau ?
©JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Bataille des thermostats

Cette question, qui peut paraître dérisoire, pourrait pourtant bien avoir des répercussions sur la productivité des employés.

Xavier  Camby

Xavier Camby

Xavier Camby est l’auteur de 48 clés pour un management durable - Bien-être et performance, publié aux éditions Yves Briend Ed. Il dirige à Genève la société Essentiel Management qui intervient en Belgique, en France, au Québec et en Suisse. Il anime également le site Essentiel Management .

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Atlantico : D'après une étude scientifique publiée dans la revue Nature Climate Change portant sur les températures dans les bureaux, les bâtiments devraient mettre à jour le confort thermique, qui a trop souvent un "caractère sexiste". Un test réalisé sur plusieurs centaines de personnes indique que le personnel féminin supporte mal les faibles températures et est plus productif lorsque la température est élevée. Comment faire cohabiter hommes et femmes au sein d'un même environnement professionnel ?

Xavier Camby : Il me semble tout d'abord essentiel de bien rester prudent face à ce genre d"études". On se souvient peut-être de cette croyance, pseudo-scientifique et sans cesse répétée, affirmant que les femmes sont multi-tâches, alors que les hommes seraient mono-tâches. Il a été prouvé depuis, par de véritables études scientifiques cette fois, que, si notre cerveau est multi-tâches, toutes les personnes humaines sont mono-tâches, quelque soit leur sexe. 
Je ne peux vérifier les fondements scientifiques des allégations que vous mentionnez, même si je constate empiriquement que, lors de nos Ateliers-Dirigeants donnés en Amérique du Nord ou en Europe, les femmes sembleraient plus sensibles au froid. A-t-on pris soin cependant de faire l'étude symétrique concernant les hommes ? A-t-on pris en compte les biais culturels ? De quelles populations parle-t-on ? Hispaniques, latino, chinoise ou indiennes d'origines ou plutôt européennes ? Comme tous ceux qui ont vécus aux USA et au Canada, j'ai l'expérience des habitats ou des bureaux, surchauffés l'hiver (25° est une moyenne) et sur-climatisés l'été (il n'est pas rare qu'il y fasse 16 à 17°). Ces habitudes de vie ne manquent pas de conditionner nos organismes. Cette étude "scientifique" qui semble ignorer ces facteurs, demeure donc pour moi bien trop sommaire pour s'y fier aveuglément.
Pour répondre à votre judicieuse question, toute cohabitation harmonieuse entre êtres humains procède d'un consensus. Donc d'un travail collaboratif. Le consensus a très mauvaise réputation en France, où il est radicalement discriminé, au motif qu'il serait "mou" ! Je ne sais d'où vient ce déni du réel et d'intelligence : le vrai consensus, socle d'une harmonie solide et durable, est très exigeant. A l'inverse, l'oukase, l'injection péremptoire d'un seul, qui éradique toute concertation, ne manque jamais de créer rejets, refus, sabotages et conflits.
Il en est de même au travail. On peut laisser les collaborateurs améliorer par eux-mêmes, individuellement ou collectivement, leur environnement laborieux. L'expérience date un peu mais demeure exemplaire : Vincent Bolloré, sur un site industriel, base historique de la fondation de son Groupe, offrit un jour 1'000 francs français à chaque collaborateur et à chaque collaboratrice pour améliorer son poste de travail. Cette somme était à l'époque non-marginale. Les réactions furent extraordinaires. Certains achetèrent des plates vertes pour eux-mêmes ou pour les couloirs ; d'autres choisirent un meilleur fauteuil ou des souliers de protection. Finalement le plus grand nombre se réunit pour des améliorations collectives, le plus souvent à l'initiative de femmes ! Le parking, les accès, les éclairages furent repensés et transformés.
L'auto-organisation, lorsqu'elle est vraiment libre, est une source intarissables d'améliorations utiles !

D'après cette même étude, fixer les températures à des niveaux légèrement plus élevés peut contribuer à lutter contre le réchauffement climatique. Sur quels sujets les méthodes managériales ont-elles encore à progresser ?

Je ne suis pas un spécialiste du climat. Mais la métaphore est savoureuse ! Et assez pertinente. La management actuel à été inventé en même temps que l'industrialisation moderne (dite 1ère révolution industrielle), il y a un siècle et demi. La "prospérité" économique qui en découla se paie désormais au prix fort, avec de très lourds intérêts : destruction massive de nos ressources naturelles principales (air, eau, terre, biodiversité, épuisement ou disparition des espèces comme des ressources rares...). 
Les maltraitances managériales -surchauffes pandémiques actuelles, terriblement dommageables- me semblent procéder de la même idiote pensée systémique (peut-être judicieuse en 1880, c'est à dire il y a presque 150 ans...).
La logique sachant/ignorant, dominant/dominé (avatars de celle maître/esclave), profondément insane, montre chaque jour davantage ses cruelles et dispendieuses limites. Les méthodes managériales actuelles, générant de nombreux points chauds et d'innombrables tsunamis émotionnels, n'ont pas à progresser, mais à être intégralement repensées. Réinventées afin d'être applicables et utiles, dans notre monde réel (et non pas seulement sur les bans dangereusement dogmatiques des MBA). Nous sommes nombreux à y travailler, affrontant pacifiquement et quotidiennement les colères de celles et ceux qui outrent encore l'instrumentalisation paroxystique de l'homme par l'homme... Avortons d'humanité, se voulant alpha exemplaires mais devenus, malgré leurs bonnes intentions, de pitoyables et tristes prédateurs, pétris d'inhumanités...
C'est l'anthropologie même du management qui est à refonder, loin des innombrables théories toxiques des leaderships introuvables.

Malgré l'influence de l'actualité politique et sociale (Gilets jaunes, #MeToo) sur la vie d'entreprise, le management avance-t-il toujours de pair avec les questions de société ?

Pertinente question à nouveau. Très révélatrice d'une perception, tragi-comique à la française, de l'entreprise hors de la société... Or, il est bien certain que nos organisation collectives, industrieuses, sociales, humanitaires, politiques... constituent le coeur même de notre monde commun (que vous pouvez appeler société, si cela vous chante). Vous conviendrez peut-être aussi que c'est  le même mot pour notre vie civile communautaire et pour une entreprise ! Ce qui n'est absolument pas un hasard ! Le mot société vient du latin Socius, qui a aussi donné associé ! Qu'il s'agisse de notre vie, privée ou laborieuse, nous sommes tous, par chacune de nos interactions humaines des associés ! 
Les discriminations sexistes, religieuses ou morales en entreprises ne sont que le regrettable reflet, parfois plus visible, de celles qui polluent nos sociétés ! Et là encore, la réalité ne peut se décréter ni se voir légiférer. Imposer la parité homme/femme en entreprise alors que la société civile s'y refuse est un non-sens et très risqué. On voit ainsi des femmes dirigeantes singer des "comportements d'homme", pour se faire accepter et reconnaître. Aux détriments de leurs vraies capacités, compléments indispensables à celles des "autres".
Le management qui tente d'enfermer dans la délétère dialectique Objectifs individuels/Evaluation de la performance est déjà obsolète. La pyramide hiérarchique, outil de pouvoir et d'affirmation égocentrique de soi, est condamnée. Les comportements responsables, collaboratifs et contributifs, fondés sur une forme de simplicité volontaire et de réaliste humilité, émergent irrésistiblement, dans notre monde entier. 
De nombreux jeunes gens, de 17 à 77 ans, magnifiquement reliés et associés de part le partage de vraies valeurs, inventent déjà le futur !

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