Le burn-out est-il une maladie contagieuse... ou simplement mieux détectée ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Des comprimés de prozac, un antidépresseur.
Des comprimés de prozac, un antidépresseur.
©Reuters

Mal du siècle

Le burn-out est un état dépressif lié aux conditions de travail qui, malgré l’ampleur du problème depuis le début des années 1990, n’est pas reconnu en France comme maladie professionnelle.

François Baumann

François Baumann

François Baumann est médecin généraliste, fondateur de la Société de Formation Thérapeutique du médecin Généraliste (SFTG). Intéressé par toutes les dimensions des Sciences Humaines et Sociales qui participent à une meilleure santé des hommes, il a publié de nombreux ouvrages sur ces thèmes. Il est également enseignant à l'Université Paris V et membre du comité Scientifique International de l'UNESCO (département de Bioéthique).

Il est auteur de Burn Out : quand le travail rend malade, L'après burn-out et Le Bore-out, quand l'ennui au travail rend malade aux éditions Josette Lyon. 

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Atlantico : Le burn-out toucherait 10% de la population active française et se caractériserait par un sentiment de vide intérieur proche de la dépression. Face au nombre alarmant de cas, de plus en plus de professionnels se battent pour faire reconnaître le burn-out comme une maladie professionnelle. Le burn-out est-il le mal du 21ème siècle?

François Baumann : Oui je pense que le burn-out est l'un des maux du 21ème siècle car il correspond bien à notre mentalité, à l’accélération de la vie que l’on ressent tous. Ce n’est pas par hasard que ce mal se prononce maintenant. Il s'agit de la dernière maladie en date qu’on ait découvert, elle touche l’individu somatiquement, elle touche à la société, au psychisme. Il s’agit d’une maladie "multicentrée".

La culture du résultat et de la performance propre à notre société a-t-elle encouragé ce phénomène ou existait-il déjà ?

Progressivement, on a vu ce phénomène apparaître et on a finalement mis un nom lorsque beaucoup d'individus ont été touchés. Le problème de la performance est inhérent à notre société : on n’a pas le droit aux défauts, il faut des résultats en permanence, tout cela contribue à faire du burn-out une maladie de notre société.

Quels sont les facteurs objectifs du burn-out ?

Il y a avant tout un épuisement de l’individu. Celui-ci se brûle de l’intérieur. On compare souvent la personne souffrant de burn-out à un immeuble dont seule la façade resterait mais qui serait entièrement brûlé de l’intérieur. Les gens qui souffrent de burn-out ne semblent pas épuisés mais ne peuvent plus rien faire. Cette maladie ne s’identifie pas tout de suite et les personnes s’enfoncent de plus en plus dans cette maladie.

Quel est le profil-type du salarié exposé aux risques de l’épuisement professionnel ? Y a-t-il des professions plus touchées par ces risques psychosociaux ?

Les professions les plus touchées sont les professions d’aide à l’autre comme les aides-soignantes, les médecins ou les policiers mais aussi des personnes qui aident des handicapés ou un proche malade par exemple. On commence à s’intéresser à l’empathie car le burn-out a révélé qu’il s’agit d’une maladie de l’attention à l’autre.

Le profil-type est souvent celui qui en veut trop. Une ambition démesurée peut conduire au burn-out. Le problème de la non responsabilisation est aussi un facteur : si on fait faire beaucoup de choses au salarié alors qu’il ne les domine pas.

D’autres pays comme le Japon reconnaissent le burn-out comme maladie professionnelle. Pourquoi la France n'en fait-elle pas autant ? Est-ce dû à son invisibilité et au fait qu’il s’agit davantage d’un processus que d’un état ?

Au Japon, certains meurent de burn-out. Celui-ci a une action sur le corps et peut provoquer des insuffisances rénales aiguës c’est-à-dire que les hormones du stress sont épuisées et qu’on ne peut plus y faire face. En France, on prend moins au sérieux ce genre de cas et on n’a pas la même culture du travail et de l’attachement à l’entreprise. Cependant, on commence à l’avoir.

Le burn-out est d'abord un processus, puis devient un état au bout d’un certain nombre d’années. Si on veut le repérer, on le peut mais les personnes qui en souffrent ne veulent pas se l’avouer. Ceci illustre la contradiction des salariés qui veulent travailler toujours plus et qui lorsqu’on leur dit de s’arrêter, refusent. Les symptômes du burn-out sont les mêmes que ceux de la dépression nerveuse, c’est pour cela qu’on a souvent confondu ces deux maladies.

Quelles sont les mesures de prévention aujourd’hui mises en place pour prévenir le burn-out ? Sont-elles efficaces ? Pourquoi ?

Les mesures de prévention se situent dans la réorganisation du travail. Le problème est surtout de préparer les gens à leur travail, ne pas leur demander des choses qu’ils ne peuvent pas faire, reconnaître leur travail constituent des éléments très importants.

On ne peut pas mettre un psychologue derrière chaque salarié mais il faut réaliser que les enjeux sont importants.

Propos recueillis par Karen Holcman

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