La 4G vaut-elle vraiment une guerre des opérateurs de la téléphonie mobile ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les principaux acteurs des télécoms sont entrés dans une opération de séduction afin de conquérir les utilisateurs de la 4G.
Les principaux acteurs des télécoms sont entrés dans une opération de séduction afin de conquérir les utilisateurs de la 4G.
©REUTERS/Arnd Wiegmann

Coût pour coût

Orange, Bouygues, SFR, Free... les principaux acteurs des télécoms sont entrés depuis quelques semaines dans une opération conséquente de séduction du consommateur afin de conquérir les utilisateurs de la 4G. A force de trop vouloir anticiper le combat de demain, les grands de la téléphonie risquent de dépenser des moyens pas toujours justifiés.

Christophe Benavent

Christophe Benavent

Professeur à Paris Ouest, Christophe Benavent enseigne la stratégie et le marketing. Il dirige le Master Marketing opérationnel international.

Il est directeur du pôle digital de l'ObSoCo.

Il dirige l'Ecole doctorale Economie, Organisation et Société de Nanterre, ainsi que le Master Management des organisations et des politiques publiques.

 

Le dernier ouvrage de Christophe Benavent, Plateformes - Sites collaboratifs, marketplaces, réseaux sociaux : comment ils influencent nos Choix, est paru en mai  2016 (FYP editions). 

 
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Atlantico : Alors que Xavier Niel a encore défrayé la chronique en proposant d'abord à ses clients la 4G dans son forfait à 19,99 euros avant de l'inclure dans son offre à 2 euros, Bouygues Télécom a finalement décidé de proposer une offre similaire au prix de la 3G. Présentée comme le nouvel eldorado de la téléphonie, ce système vaut-il vraiment la guerre des prix qu'il a déclenchée ?

Christophe Benavent : Ce qui vaut, ce sont les parts de marché et les positions des acteurs. Il est tout à fait logique que Free fasse cette offre, et tout aussi logique que Bouygues ait déployé de grands moyens dans le domaine (autrement dit le nombre d'antennes). C'est au fond un jeu concurrentiel normal même s'il se joue plus sur les annonces que sur la réalité d'un service. Une approche plus coopérative, certains pourront dire collusion, aurait permis à chacun de récolter les profits sur un service haut de gamme. L'opposition à laquelle nous assistons est en fait un épisode normal d'une situation concurrentielle véritable. Ce qui aurait pu être une source de rente disparaît aussi vite qu'elle apparaît. Ce n'est pas une très bonne chose pour les acteurs qui perdent rapidement une source potentielle de profit presque durable. Mais c'est une situation qui bénéficiera au moins au consommateur en évitant des niveaux de prix trop élevés, et disons, aux e-commerçants qui ont de forte espérance dans le m-commerce. Pour revenir au cœur de la polémique, si l'action de Free obère la bonne santé des télécoms, elle a l'avantage de préserver le pouvoir d'achat des consommateurs et de stimuler le marché du digital. Le seul problème est que si Xavier Niel a raison tout autant que Montebourg, personne n'est en mesure de dire qui, au final, a vraiment raison. 

Ces récents accrochages médiatiques semblent par ailleurs négliger le fait que les dispositifs 4G sont encore très mal développés en France. Les opérateurs ne spéculent-ils pas finalement sur un avenir incertain ?

Pas tout à fait. La 4G deviendra la norme de fait. Les consommateurs ont besoin de débits plus importants qu'ils passent par la 3G, la 4G, la 5G, le Wifi le Wi MAx. Ils se moquent des normes, ils veulent juste un usage fluide de l'internet là où il sont, et à la hauteur des promesses qu'on leur a fait. Et ces promesses, ce sont celles des opérateurs et celles des hommes politiques. Le problème est qu'aujourd'hui chacun des acteurs dans ses stratégies d'annonce prend le risque de décevoir en annonçant plus qu'il n'est capable de faire ce qui est attendu. Dans la mesure où le déploiement est incomplet alors que la promesse est forte, la compétition va se déplacer sur le terrain de la déception : qui va décevoir le moins ? Le gagnant de cette bataille ne va pas être le mieux disant, mais le moins décevant. L'avenir est certain. Il y a une demande forte pour des communication de qualité à grands débits. Le problème est de savoir qui y ira le plus vite. En allant trop vite et en décevant trop de monde, certains opérateurs vont y laisser des plumes. D'autres iront trop lentement et y laisseront aussi des plumes. Chacun doit donc trouver le bon degré, à savoir un équilibre entre la promesse, la réalité de l'offre et le prix. Dans cette bataille le gagnant sera Free. Quelque soit la qualité du service, la stratégie adoptée garantit à ses clients une valeur accrue (et la valeur est le rapport de la qualité au prix), et si Free devrait perdre c'est d'avoir promis trop. Mais il n'ont pas augmenté le prix ! Il y a donc, même si la promesse est incomplète, tout à gagner.

En parallèle, existent-ils d'autres opportunités de développement dans le secteur des télécommunications qui gagneraient à être mieux exposées ?

Pas vraiment. Les services associés ne sont pas assez valorisés par les consommateurs. Ils ne veulent pas payer. Il y a peu de moyen de différenciation dans cette industrie. La 4G en était un. Il faut concevoir qu'elle ne le sera plus. A vrai dire la question que vous posez est celle de la vérité du marché. Celle-ci nécessite que les consommateurs soient parfaitement informés de la réalité de la qualité des offres, pas en moyenne, mais exactement là où ils sont et se déplacent. Les initiatives de l'UFC Que Choisir, les cartographies de cartoradio, et d'autres sont bienvenues. Mon seul conseil est que l'autorité publique encourage les initiatives qui visent à donner à chacun les moyens de juger sereinement de la qualité des offres offertes. Que l'on donne donc au consommateur le moyen de juger la qualité en fonction de leurs usages particuliers et des endroits où ils circulent. Que l'on dresse des cartes détaillées de la réalité de la qualité du "traffic data" quelques soient les technologies employées. Le consommateur ne se soucie pas des standards, il juge par la perception de la vitesse avec laquelle il obtient l’information qu'il souhaite, là où il se trouve, que ce soit en zone péri-urbaine ou dans le RER.

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