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Kazakhstan / France : victoire bleue sans l’art… ni la manière
Kazakhstan / France : victoire bleue sans l’art… ni la manière
©FRANCK FIFE / AFP

Football

Sans réussir grand-chose mais en ne ratant presque rien non plus (à part un pénalty de Mbappé), les Bleus se sont imposés 2/0 au Kazakhstan. Une frappe d'Ousmane Dembélé et un but contre son camp de Maliy auront suffi pour assurer, au petit trot et à l'heure du goûter, un succès précieux dans la course à la qualification pour le mondial 2022.

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez est entraîneur de tennis et préparateur physique. Il a coaché des sportifs de haut niveau en tennis. 
 
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Après avoir prouvé contre l'Ukraine que la France est le seul pays champion du monde où l'on joue aussi mal qu'ailleurs, notre équipe nationale devait absolument engranger trois points et un peu de confiance à l'occasion de son périple au Kazakhstan. Pour une fois, le coach, l'opinion publique, les bien-pensants qui n'ont jamais joué (les langues de vicaires) et les prétendus experts étaient tous d'accord : il fallait modifier certaines choses... En commençant par l'état d'esprit et l'intensité. 
Était-ce parce que la capitale Noursoultan avait changé six fois de nom au cours de son histoire que notre sélectionneur avait lui aussi procédé à autant de changements ? Allez savoir... Plus sérieusement, au-delà de la nécessité impérieuse de repartir avec la victoire, il flottait dans l'air l'idée qu'une large revue d'effectif s'imposait. Le noyau dur sur lequel s'appuiera Didier Deschamps pour disputer l'Euro en juin a beau être connu depuis quelques temps, il restait tout de même, à la marge, quelques places à prendre...
C'est vieux comme le monde mais ce type de match joué sans public, à un horaire inhabituel et sur un terrain synthétique, confirme que ce qu'il y a de meilleur dans le dimanche, c'est le samedi soir. Si l'essentiel est préservé, c'est à dire la victoire et les trois points, pour la manière en revanche, il faudra repasser. Car face à un adversaire modeste (122ème au classement Fifa) qui n'aura pas réussi à se créer la moindre occasion, les Bleus n'auront pas fait d'étincelles. Au fond, c'est peut-être parce qu'ils avaient leur jeu sur le bout de la langue que nous n'avons pas eu grand-chose à nous mettre sous la dent... Un petit but de Dembélé (19e), un autre insolite marqué par Maliy contre son camp, une tête du même Dembélé, un pénalty manqué par Mbappé (74e) et... et... c'est tout. Un match joué autant sur les bords de la rivière Ichim qu'au bord de l'ennui donc. 

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Alors, compte tenu de la relative faiblesse de l'adversaire, que dire d'un match dont on ne peut tirer aucune conclusion ? À moins d'avoir une imagination débordante, peu de choses. Quand nous aurons évoqué quelques circonstances atténuantes comme l'éternelle difficulté de jouer contre des équipes proposant un bloc bas ou encore un calendrier difficile qui oblige nos meilleurs joueurs à empiler les matchs (quand la crème est harassée), nous aurons presque tout examiné. Tout au plus, nous déplorerons les manques habituels dans la percussion et la vitesse de circulation d'une équipe qui, depuis quelques temps, n'amasse plus mousse.
Dans cette équipe fortement remaniée, qui aura été le meilleur ? Ousmane Dembélé, assurément. Le Barcelonnais aura été le seul à s'être montré vraiment actif et à proposer quelques initiatives personnelles ou du jeu direct. Aux esprits chafouins qui stigmatiseront ses erreurs, nous rétorquerons que ce joueur est un des seuls à vouloir apporter quelque chose de différent sans jamais se soumettre à la dictature des statistiques. Croyez-le bien, un joueur qui entreprend, qui ose, et donc, qui ose l'échec, ça fait du bien par les temps qui courent ! Pendant que la plupart de ses coéquipiers essaient par tous les moyens de ne rien rater, c'est à saluer. Souhaitons que son but inscrit après une disette en bleu longue de 1031 jours (tiens, une stat'...) lui mette du baume au cœur car la flamme qu'il a allumée hier après-midi n'a pas à rougir.
Mais au fond, peut-être que l'essentiel est ailleurs finalement... Car ce match ni raté ni réussi était aussi une belle occasion à saisir pour les neuf joueurs titularisés par Didier Deschamps qui ne sont jamais du onze de départ. À ce petit jeu, seuls Martial, pour sa passe décisive, Ndombélé et Lemar pour leur match globalement satisfaisant, seront à sortir du lot. Pour les six autres, cet essai non transformé pourrait bien ressembler à une sorte de victoire à la Pyrrhus car tous ne participeront pas, loin s'en faut, aux joutes finales. Le genre de "cadeaux" que font tous les entraîneurs et qui n'en sont pas vraiment... Un peu comme ceux que l'on offre aux enfants atteints d'un mal incurable en sachant pertinemment qu'ils ne pourront pas s'en servir... 

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Quoiqu'il en soit, et même si cette victoire nécessaire nous laisse au carrefour de quelques interrogations, elle a le mérite d'installer provisoirement l'équipe de France à la première place de son groupe. Avant de se frotter à une opposition un peu plus consistante mercredi prochain en Bosnie-Herzégovine, c'est toujours une chose appréciable. Une équipe Bosniaque dont 20% des 20 derniers matchs se sont terminés sans que celle-ci n'encaisse le moindre but (tiens, une autre stat'...). 
Comment ça vous vous en foutez ? Remarquez, je vous comprends... Si j'ironise, c'est que comme après tous les matchs de l'ère moderne, des tas de statistiques vont pleuvoir... On va nous infliger, à nous pauvres rêveurs, le nombre de sélections de Lloris, le nombre de buts marqués par les uns, le nombre de fautes commises par les autres etc, etc... De quoi frôler l'overdose mathématique... Le tout en oubliant un peu vite de nous rappeler que les chiffres, simples expressions de quantités, n'ont d'autorité, de sens et de valeur que si l'on sait leur origine, leur contexte d'extraction et surtout ce que leurs auteurs souhaitent leur faire dire. Alors clamons-le une fois pour toutes, les chiffres ne sont jamais chimiquement purs ! Pourquoi ? Parce qu'ils découlent d'une volonté, d'une méthode et pire : parce qu'ils accoucheront d'une interprétation. Des chiffres et des êtres si vous préférez... Au fond, c'est con un chiffre... Ça n'a aucune existence propre. Il y a le chiffre d'un côté et son évocation de l'autre. Si nous voulions nous faire des nœuds dans la tête, nous rajouterions qu'un chiffre est aussi tout ce qu'il ne dit pas. Vertigineux non ? Alors, à la lecture de ce procès à charge, j'en entends certains s'interroger : "c'est bien beau tout ça mais alors à quoi ça sert un chiffre ?"... À cette question épineuse, on pourrait répondre qu'au travers d'un langage qui peut être sévère, incommodant mais toujours éloquent, le chiffre a quand même le mérite de nous informer sans nous rendre plus intelligent. C'est déjà pas mal. Ensuite, sans en être dupe, libre à chacun d'en faire ce qu'il veut, ce qu'il peut...
Laissons le mot de la fin à Jean Dion : "Les chiffres sont aux analystes ce que les lampadaires sont aux ivrognes : ils fournissent bien plus un appui qu'un éclairage".
À mercredi prochain.

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