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Insincérité, nous (re)voilà : pourquoi les trois engagements budgétaires pris par Edouard Philippe n’ont quasi aucune chance d’être tenus
©JOEL SAGET

Le compte n’est pas bon

S’il marque le coup d’envoi de l’action gouvernementale, le discours de politique générale du Premier Ministre, Edouard Philippe, est également la voiture balais de plus d’un an de campagne électorale.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Formation professionnelle, efficacité des ministères, niches fiscales, inflation salariale de la fonction publique, aides au logement, les différentes sources d'économies évoquées par le Premier ministre dans son discours de politique générale sont-elles conformes aux ambitions annoncées de réduction des dépenses publiques ? Un tel plan est il réaliste ? Comment le gouvernement pourra t il tenir ses engagements ?

Philippe Crevel : Nous avons eu le droit à un cycle riche de promesses, d’annonces, de propositions. Un sentiment de lassitude commence à nous étreindre. Le Premier Ministre, dans son discours du 4 juillet a tenté tout à la fois de décliner les engagements pris par le Président et répétés lors du Congrès de Versailles et de colmater autant que possible les déficits publics. Les sources d’économies avancées apparaissent bien ténues et floues. La refonte de la formation professionnelle est un serpent de mer que nul n’a pu attraper depuis une vingtaine d’années. La réforme des aides au logement constitue également un défi sur lequel de nombreux gouvernements ont échoué. Le Gouvernement travaillerait sur l’idée que les étudiants, les jeunes devraient opter entre le rattachement au foyer fiscal de leurs parents et l’octroi des aides. Par ailleurs, la mise à plat des aides au logement entraînent bien souvent la collusion des associations défendant le logement social et du secteur du bâtiment. Il faudra, à la rentrée, du courage au Gouvernement pour ouvrir ce chantier. Il pourra se fonder sur les travaux de la Cour des Comptes qui soulignent que la politique du logement de ces trente dernières années a avant tout contribué à l’augmentation des prix. Sur les niches fiscales, le Gouvernement risque de se tromper de combat. Si ces niches existent, c’est en raison du niveau excessif des impôts. Elles atténuent la progressivité et le poids des prélèvements. De ce fait, leur suppression nécessite une réforme de fonds des impôts et de l’impôt sur le revenu en particulier. Faute de quoi, elles réapparaîtront tout aussi vite qu’elles auront été supprimées. Avec le gel de l’indice de la fonction publique, le Gouvernement opte pour la facilité. Je bloque les compteurs. En revanche, à terme, ce n’est pas tenable. Il faudrait revoir la politique des ressources humaines et mettre un terme au code de la fonction publique qui n’est plus adaptée aux temps nouveaux.

Au regard des annonces faites par le Premier Ministre, qui seront les gagnants et les perdants budgétaires de ce quinquennat ?

Les retraités acquittant la CSG seront évidemment pénalisés par son relèvement de 1,7 point. Dans l’attente de l’application de la flat tax, les épargnants pourraient figurer au rang des victimes de la CSG. En effet, les prélèvements sociaux devraient passer de 15,5 à 17,2 % au 1er janvier 2018. Les fonctionnaires devraient être également perdants avec le gel de l’indice même s’ils peuvent compter sur le GVT, Glissement Vieillesse et Technicité qui leur permet d’améliorer leur traitement. Au niveau des gagnants, il faut noter les salariés grâce à la baisse des charges sociales qui aura un effet plus élevé que la hausse de la CSG. Les indépendants et les fonctionnaires pourraient profiter de mesures leur permettant de profiter d’une baisse de la taxation équivalente à celle des salariés. Les travailleurs non salariés pourraient à terme être couverts face au risque de chômage. Par ailleurs, comme ils le réclament, le Régime Social des Indépendants devrait  a minima être adossé au régime général des salariés.

Concernant le volet entreprises et les investisseurs, les promesses faites durant la campagne semblent être minorées, ou reportées, aussi bien du point de vue de la réforme de l'ISF, prévue en 2019, de l'IS, dont l'objectif à 25% est fixé à 2022, comme celle du CICE, dont le champ d'application apparaît rétréci. Les promesses de campagnes ont elles fondues à l'aune du rapport de la Cour des Comptes ? Comment expliquer que des réformes prétendues prioritaires pour relancer l'économie françaises par le gouvernement soient ainsi reportées ?

Comme tous les Présidents et gouvernements passés, quelques semaines après les élections, un tri est opéré au niveau des promesses. Le rappel à l’ordre de la Cour des Comptes savamment orchestré offre au nouveau pouvoir la possibilité d’étaler dans le temps les réformes. L’objectif de coller au plus près de la barre des 3 % impose des reports, des abandons, des remises en cause plus ou moins importantes. C’est ainsi qu’Edouard Philippe a décidé de reporter en 2019 plusieurs mesures, l’exonération des biens mobiliers de l’assiette de l’ISF, l’instauration de la flat sur les produits de l’épargne financière également reportée en 2019 la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés qui sera de 25 % en 2022. Plusieurs dispositifs ont été revus en mode mineur. Cela concerne la transformation du CICE en baisse pérenne de charges sociales. Le Premier Ministre a simplement annoncé que cela s’appliquera aux salariés payés au SMIC. L’exonération des heures supplémentaires semblent de son côté oubliée.

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