Inflation : le vrai risque, c'est le risque probable de contagion prix/salaires<!-- --> | Atlantico.fr
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Selon l'INSEE, la hausse des prix a atteint 4,8 % en août, après 4,3 % en juillet.
Selon l'INSEE, la hausse des prix a atteint 4,8 % en août, après 4,3 % en juillet.
©INA FASSBENDER AFP

Atlantico Business

La France a raison de s'inquiéter d'une reprise de l'inflation alors qu'on lui avait promis et annoncé le reflux. Mais le vrai risque est sans doute porté par la hausse probable des salaires... Pour les salariés c’est une bonne chose, pour la croissance c’est mortifère.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Les prix de la rentrée remontent, ce qui angoisse les familles et annonce une fin d'année compliquée... mais le vrai risque de l'inflation, c'est la tentation du rattrapage par les salaires...

Le gouvernement ne s'attendait sans doute pas à ce que les Français le convoquent aux portes des hypermarchés. Et pourtant, les chiffres sont indiscutables. Selon l'INSEE, la hausse des prix a atteint 4,8 % en août, après 4,3 % en juillet. On nous avait annoncé que le pic de l'inflation avait été atteint en juin/juillet... on s'aperçoit qu'il y a eu un nouveau pic en août et que le mois de septembre se présente mal... Avec 4,8 % d'augmentation moyenne sur l'année, on est certes loin des 6 % du premier semestre, mais le reflux s'est arrêté et tous les consommateurs qui vont à l'hypermarché se sont bien aperçus que les étiquettes ont encore bougé... D'où la mobilisation générale des associations de consommateurs, de l'opposition politique et des membres du gouvernement qui cherchent à contrôler le mouvement. 

C'est d'autant plus compliqué que le ministre de l'économie, Bruno Le Maire, n'a pas cessé de presser les industriels d'un côté, les distributeurs de l'autre pour qu'ils baissent leurs prix. Lors d'une grande messe convoquée à Bercy, il a encore obtenu un engagement de stabilité voire de baisse sur plus de 5000 articles, notamment sur des produits alimentaires et des fournitures scolaires... mais la marge de manœuvre du ministre est étroite. Il ne peut pas se mettre à fixer tous les prix des produits et services... d'abord, il n'en aurait pas le droit, d'autre part, cela signifierait un changement de système ; Quand l'un des membres de la Nupes suggère que l'État achète en gros des produits et les revende à prix coûtant dans des magasins nationaux, il sombre dans le ridicule et il vaut mieux taire son nom. La clé est plus sûrement dans le fonctionnement du marché et de la concurrence. D'ailleurs, les consommateurs l'ont bien compris. La grande majorité a modifié sa façon de consommer depuis un an : moins de produits de marque, moins de bio, plus de circuits courts, plus de marchés en plein air que d'hypermarchés. Certains ont même serré la ceinture... à tel point que cette sous-consommation de produits alimentaires fait réfléchir les producteurs et modifie leur modèle.

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La reprise actuelle de l'inflation tient principalement à la hausse des prix de l'électricité et des carburants. Pour deux raisons : d'abord parce qu'on a commencé à écarter les boucliers tarifaires, d'où la revalorisation de 10 % des prix de l'électricité... Ensuite, parce que les prix du pétrole sont repartis à la hausse (entre 6 et 10 %). 

Mais en dehors de ces deux cas difficiles, les prix alimentaires sont globalement restés calmes depuis avril-mai. Ils se sont stabilisés à un niveau élevé, certes, mais stabilisés. Et cela parce que la conjoncture mondiale est beaucoup moins tendue. Les exportations chinoises se sont effondrées parce que l'activité industrielle des émergents pique du nez, le commerce international s'est très ralenti par rapport à l'année dernière. Ce jeu du marché freine le mouvement des prix, d'où la persistance de prévisions d'une inflation à la baisse jusqu'à la fin de l'année. Le problème, c'est que pour le gouvernement, il faut convaincre l'opinion qui se focalise sur quelques produits phares. Il faut aussi surveiller que les industriels et les distributeurs ne profitent pas de ce retour au calme pour renforcer leurs marges. C'est évidemment le rôle des "coups de gueule" que pousse périodiquement Bruno Le Maire.

En fait, le vrai risque d'inflation pourrait venir des salaires. Le cabinet Deloitte a publié cette semaine les résultats d'une enquête réalisée dans les entreprises sur leurs prévisions de salaires pour 2024. La perspective est très nettement à la hausse. L'année 2023 a déjà été marquée par des augmentations fortes. L'année 2024 serait du même acabit, notamment pour les ouvriers, employés et agents de maîtrise. On parle de 5 % de mieux en moyenne. La hausse chez les cadres serait inférieure, mais la part de l'intéressement et de la participation serait plus épaisse compte tenu des résultats.

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Cette poussée des salaires est imputable à deux facteurs : d'une part, les entreprises vont être obligées de répondre à la poussée inflationniste qui fait monter la température dans le climat social, et c'est normal. D'autre part, il existe toujours des pénuries de main-d'œuvre dans beaucoup de secteurs, et les entreprises ont intérêt à fidéliser leur personnel par le biais des salaires . 

Le vrai risque, c'est donc la contagion entre les prix et les salaires. Jusqu'alors, il n'y a pas eu de contagion. La hausse des prix importée (énergie, produits alimentaires) a été absorbée par les entreprises au niveau des marges et de la productivité, et les consommateurs... Mais si l'inflation persistait, les entreprises devraient y répondre très précisément : 

Les entreprises ont deux outils pour cela : Un : accroître la productivité, donc investir. Deux : activer l'accord sur le partage de la valeur, qui est à ce jour la meilleure arme anti-inflation si on veut éviter un déséquilibre du modèle de croissance. L’exercice va être  périlleux en 2024. 

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