"Histoire du drapeau de France et d'ailleurs" de Bertrand Galimard Flavigny

Le drapeau ne s'est pas toujours appelé ainsi, le mot est même plutôt récent. Jadis, on parlait de bannière, fanion, gonfalon, penon, pavillon, étendard... L'auteur développe donc les nombreuses étapes de l'évolution de cet objet emblématique et symbolique, en fouillant la mythologie, l'histoire, et surtout d'innombrables textes anciens ou modernes. Il commence par l'Antiquité (des bas-reliefs témoignent de l'existence d'un bâton de ralliement, qui deviendra enseigne, hampe...) chez les Romains et les Gaulois.

L'un des personnages les plus emblématiques de l'histoire de la France fut saint Martin, dont on se souvient que la chape (le manteau) fut partagée en deux et qu'elle aurait servi de bannière de guerre, brandie notamment à Poitiers en 732. Il rappelle l'importance de saint Denis où fut déposée l'oriflamme royale.  Il survole ainsi les siècles, en détaillant les couleurs, les armoiries, les figures qui ornaient bannières et étendards. Un chapitre (le 8ème)  est réservé à ceux de Jeanne d'Arc. Il mentionne les décrets royaux, en particulier ceux de Louis XIV qui entendait organiser régiments et bataillons. Il souligne enfin l'importance des couleurs, le blanc tout d'abord, l'apparition du bleu et du rouge jusqu'au drapeau national français adopté en 1880 après avoir connu bien des vicissitudes.  

Les drapeaux étrangers sont également présentés : l'Union Jack, le pavillon du Canada, le Royal Standard du monarque britannique, les cinquante étoiles des Etats Unis, etc. Quant au drapeau européen, il n'a pas toujours été bleu (l'actuel date de 1955)... Sont alors présentés les drapeaux de la Belgique, de la Grèce nouvellement indépendante (1833) , de l'Italie (1861), de l'Allemagne (1871), du Portugal, de l'Ukraine et de Malte. On compte 254 drapeaux du monde dont 193 sont reconnus par les Nations Unies. Plusieurs régions restent fières de leur drapeau ainsi que certains mouvements ou associations.

Le pari est gagné : proposer une étude sérieusement documentée qui reste néanmoins agréable à lire, et même amusante tant les anecdotes y abondent.  

On sent l'auteur très à l'aise dans les nombreuses appellations du monde maritime, autant de la marine de guerre que de la marine marchande, rappelant (p. 127) que "La Marine a été l'un des acteurs principaux de la formation du pavillon national" français.  

Huit annexes complètent cette étude : la description des drapeaux des vieux régiments ; Le porte-drapeau, texte d'Alphonse Daudet dans les Contes du lundi ; le drapeau blanc (manifeste de deux soldats combattants à Gravelotte) ; les drapeaux décorés (huit régiments décorés sous le Second Empire) ; les marques personnelles des chefs d'Etat ; le protocole du drapeau en France (art.2 de la Constitution de 58) ; les drapeaux du monde (et leurs couleurs) ; la société française de vexillologie. 

Un glossaire précise les mots utilisés, une chronologie rappelle les principales étapes (de 671 à 2021), une bibliographie mentionne les nombreuses sources de l'auteur.

Certaines descriptions, largement détaillées, intéresseront les spécialistes (en héraldique, en symbolique, en vexillologie) plutôt que le lecteur " grand public" mais ce ne sont heureusement que quelques pages. 

On pourrait regretter qu'aucune illustration n'accompagne les propos de l'auteur.

Voilà un bout de tissu, un drapello, qui méritait bien qu'un historien se penche sérieusement sur lui !

"Notre histoire n'est pas une encyclopédie mais davantage un parcours destiné à comprendre comment le morceau de tissu accroché au vexille s'est transformé et a évolué afin d'incarner la plus forte des symboliques destinée à conduire une nation, un peuple, une idée...  Comme les hommes, les drapeaux ont vieilli et parfois ont disparu ; ils ont été malmenés, brûlés et salis. Leurs couleurs ont brillé davantage ou se sont fanées... L'histoire des nations et des peuples s'est inscrite en lettres de sang et d'or sur ces morceaux de tissu, c'est la raison pour laquelle tout drapeau est sacré". (P. 220)

Bertrand Galimard Flavigny, écrivain, journaliste et critique, a publié de nombreux ouvrages (sa propre bibliographie nécessite deux pleines pages) principalement sur l'histoire du livre -il est également bibliophile- et sur l'histoire des ordres de chevalerie. Il est l'auteur d'un "Gallimard Découvertes" intitulé Les chevaliers de Malte, des hommes de fer et de foi (1998) ; chez Perrin, on lui doit une Histoire de l'Ordre de Malte (coll. Tempus 2010) et une Histoire des décorations (2017).  Il a consacré plusieurs livres à l'Ordre de la Légion d'Honneur dont un "Gallimard Découvertes" rédigé avec Anne de Chefdebien (2017). Il a contribué à la rédaction de plusieurs ouvrages collectifs et a donné des préfaces à d'importants livres historiques. Il est chroniqueur du marché de l'art aux "Petites Affiches" (depuis 1977).