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Gilets Jaunes, la colère et le mépris
©ABDULMONAM EASSA / AFP

Manifestations

Les flammes des incendies allumés sur les Champs Elysées se reflètent sur les casques des gendarmes mobiles épuisés.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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Après une nouvelle journée d’affrontements, le mouvement des Gilets jaunes semble s’enraciner dans le paysage de la fin 2018 en même temps qu’il prend une tournure plus sombre, plus déterminée aussi. La fatigue des semaines de mobilisation est, sous nos yeux, en train de se muer en une sourde colère dont les éclats n’en sont que plus durs. Certes, comme dans tout mouvement dit social, les manifestants, désespérés de se faire entendre par un pouvoir méprisant, ont été rejoints par des extrémistes, black-blocks pour la plupart sans doute, dont le seul horizon est la destruction. Toutefois il s’agit de ne pas se tromper d’interprétation comme de lutte. Hors les dégâts commis par cette minorité qu’il convient d’interpeller et de juger, ce qui est en jeu aujourd’hui porte un nom : la dignité. Dignité de ceux qui travaillent mais voient leurs conditions de vie se dégrader. Dignité de ceux qui s’inquiètent pour leur avenir et celui de leurs enfants. Dignité de ceux qui ont contribué leur vie durant et dont la retraite s’amenuise toujours d’avantage. Les Gilets jaunes ne sont au fond rien de plus que des citoyens français qui demandent à l’exécutif de jouer son rôle suprême : protéger la nation. 


Le pouvoir macronien répond à cette vague de colère par la distance, le dénigrement, en un mot le mépris. Du haut de son Capitole, le Président-Jupiter en a décidé ainsi : ceux qui ne sont rien sont ceux qui n’ont rien compris. En matière de compréhension, d’écoute en réalité, c’est pourtant nos gouvernants qui se trompent. Quand les Gilets jaunes parlent fiscalité, pouvoir d’achat et avenir, les chevau-légers de la majorité présidentielle leur répondent écologie et ratio de rentabilité. Jusqu’à quand enfin Macron abuseras-tu de notre patience demanderait un moderne Cicéron devant une telle avanie. Une seule chose sort de ces scènes de violence commentées en boucle sur les chaînes d’information par des députés La République en Marche sidérés : le mépris. Ce sentiment c’est la marque indélébile du quinquennat d’Emmanuel Macron. Celui qui dès les débuts s’était mué en Pontifex Maximus du libéralisme, marqué par son idolâtrie pour une Allemagne dont il refuse toujours de voir les faiblesses structurelles, n’a eu de cesse de dénigrer les Français. Pardon, certains Français : le peuple. Nous nous souvenons tous que ceux qui ne sont rien n’ont qu’à traverser la rue pour trouver un emploi. Quand les ministres parlent d’une « insulte à la République », ils devraient se souvenir que c’est ce même peuple souverain qui les a portés où ils sont et qu’ils demeurent, qu’ils le veuillent ou non, ses serviteurs.


L’histoire aime les prophéties auto-réalisatrices en quelque sorte et Jupiter triomphant à la Maison de l’Amérique latine en pleine affaire Benalla, demandant « qu’on vienne le chercher », aura été entendu. Pas sûr que ce soit ce que l’Auguste président ait eu en tête ce soir-là. Il aura fallu six mois. En un automne la colère s’est accumulée. Elle s’est muée en une vague et a fini, à l’image de l’analyse du philosophe Peter Sloterdijk dans Colère et temps par exploser. E. Macron a commis une erreur sémantique, il n’est pas face à ceux qui ne sont rien, il est face à ceux qui n’ont rien. Les Gilets jaunes sont avant tout des Français qui, écrasés par des taxes toujours plus lourdes, n’ont plus rien à perdre. La politique du laisser-faire qui relève de la tactique politicienne la plus basique, montre son échec patent. En refusant de répondre sur le fond – le vrai, pas l’écologie érigée en dogme moralisateur et punitif – le gouvernement, isolé loin sur sa montagne, se trompe. Les parallèles historiques de 1788, 1934, ou autre date ne valent que peu de chose en ce sens, les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets. A chaque fois du moins une chose est sûre : le pouvoir s’est révélé incapable d’assumer son rôle de défenseur du peuple. Aujourd’hui on pourrait même dire que la situation est pire, le pouvoir ne défend pas le peuple et même le méprise. S’ils n’ont plus de pain, qu’ils mangent des bio-carburants ! 

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