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Garde à vue : ce qui vous attend derrière la porte
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Et si ça vous arrivait ?

"Inacceptables", "indignes", "choquantes"... Le célèbre avocat Gilbert Collard dénonce, dans "Les dérives judiciaires", les conditions de mise en garde à vue en France. Le constat peu glorieux de ce qui vous attend derrière les portes des commissariats. Extraits (1)

Gilbert  Collard

Gilbert Collard

Gilbert Collard est un avocat et écrivain.

Avocat au barreau de Marseille depuis 1971, il a plaidé dans plusieurs affaires largement médiatisées.

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Quelles sont les conditions d’un placement en garde à vue ? Comment cette « chose » odieuse pourrait-elle vous arriver ? D’abord, cher citoyen irréprochable, sachez que la garde à vue peut avoir lieu n’importe où, «sur les lieux de l’enquête » ; elle peut être mise en œuvre partout où se trouve la personne qui en est l’objet, y compris à son domicile. En réalité, elle s’exécute presque toujours dans les locaux de la police ou de la gendarmerie. Les fonctionnaires de l’autorité préfèrent jouer à domicile. Aussi, au fil du temps, ces placards policiers ont-ils été soumis à un minimum de contrôles, hélas devenus théoriques.

Le procureur de la République doit visiter les locaux chaque fois qu’il l’estime nécessaire et, au moins, une fois par an. Il doit porter sur un registre le nombre et la fréquence des contrôles effectués. C’est dit, est-ce fait ? C’est un autre problème. Le papier et la théorie font très bon ménage avec la réalité qu’ils ignorent. Comme s’il n’y avait pas assez de paperasse hypocrite, il est aussi prévu un registre spécial dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue ; sur ce registre, on doit noter les dates et heures de début et de fin de garde à vue ainsi que la durée des interrogatoires et des temps de repos. Cependant, on n’a jamais entendu un registre restituer les cris, les humiliations, les bruits de menottes. Les députés et les sénateurs peuvent aussi effectuer de telles visites. Ils n’abusent pas de ce droit. Certains ignorent même qu’ils possèdent ce droit… Je l’ai vérifié !

La France, au banc des accusés

Il y a loin des lustres du Parlement et du Sénat aux cages croupissantes de la République. Un autre intrus peut pousser les portes des commissariats, le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le beau monde pourrait ainsi croiser la populace des nuits policières, s’il voulait s’en donner la peine. Toutes ces précautions inutiles, à elles seules, devraient suffire à faire frémir. Elles en disent long sur la suspicion. Il n’empêche, l’état de ces locaux est la honte de la République ! « Inacceptables », « indignes », « choquants ». Voilà, en quelques adjectifs définitifs, l’opinion d’Álvaro Gil-Robles, le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, sur les locaux français des gardes à vue. Il n’aurait rien vu de tel, sauf, peut-être, en Moldavie ! On peut toujours afficher la Déclaration des droits de l’homme, on se fout du monde.

Ce constat date de septembre 2005. Trois ans plus tard, le contrôleur général, Jean-Marie Delarue, rend public un rapport terrifiant : « La plupart des lieux degarde à vue restent dans un état indigne pour les personnesqui y séjournent, qu’elles soient interpellées ouqu’elles y exercent leurfonction. Les cellules de gardeà vue, comme les cellules de dégrisement sont les lieuxles plus médiocres des locaux administratifs les plusmédiocres» (Rapport Delarue, 2008)

Que dire de plus ? Tout est dit. La garde à vue est unepunition prononcée sans jugement dans laquelle entrentl’arbitraire, l’humiliation, la souillure, la violence,l’odeur de pisse et de merde, le dénudement, la perte desrepères, le manque de sommeil, la peur. Tout un chacunpeut y avoir droit pour un mot de trop, l’outrage, unverre de trop, un geste de trop, la rébellion. Vous ne mecroyez pas ? Je protège le confort des grands criminels,peut-être ? Voici l’histoire rapportée par Matthieu Arondans son livre.

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Extraits de Les dérives judiciaires: Et si ça vous arrivait, de Gilbert Collard, Eyrolles (Mai 2011)

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