G7 finances : premiers pas vers le monde de l’après Covid… ou du tout comme avant ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, lors du G7 finances à Londres, le 4 juin 2021.
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, lors du G7 finances à Londres, le 4 juin 2021.
©DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP / POOL

Idée ancienne

Le projet d'un impôt minimal mondial sur les entreprises sera au coeur des discussions lors du G7 finances qui se tient à Londres ce weekend. Il est soutenu par les grandes puissances européennes et par le président américain Joe Biden.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Atlantico : Le G7 finances qui se tient ce vendredi 4 et samedi 5 juin à Londres devrait soutenir le principe d’un impôt minimal et international sur les entreprises. Quel est l’intérêt dans un contexte Post-Covid d’un impôt international ? Il y aurait-il des lésés ?

Jean-Paul Betbeze : Le G7 et le G20 sont un exercice politique très complexe qui combine plusieurs domaines, avec leurs ministres spécialisés, pour trouver des solutions ou mieux encore des consensus. Mais rien n’est immédiat, moins encore en matière fiscale.

En général, les G20 balisent large et les G7 préparent des décisions, car ce qui est accepté par les pays les plus riches a de bonnes chances de l’être par les 13 (G20 - G7) qui le sont moins, d’autant que les G7 ont toujours des « invités », pour discuter, aplanir et convaincre. Les G7 Finance abordent ainsi divers sujets, toujours sur la croissance, les inégalités ou les solidités des systèmes bancaires et financiers avec, plus souvent, un thème plus technique encore qui émerge.

Au G7 Finance de cette semaine, il s’agit de fiscalité et d’un impôt international mondial avec un taux minimal pour les sociétés. Ceci pour éviter la concurrence à la baisse des taux d’impôts, qui pose des problèmes fiscaux aux états surtout les plus sociaux et les plus fragiles, poussent à des délocalisations physiques (les entreprises s’installant alors où la fiscalité est la plus « compréhensive ») ou bien fiscales (les profits « s’installant » où la fiscalité est, là aussi, la plus « compréhensive »). La concurrence fiscale est ainsi surtout comptable, à partir de bases fiscales et juridiques, autrement dit de lobbying.

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La nouveauté, dans ce contexte, est la digitalisation des entreprises qui permet de dissocier chiffre d’affaires et profit, sans mouvements de machines ou de personnel. La concurrence fiscale qui est donc très ancienne pour attirer ou rattraper des ressources fiscales, se trouve ainsi accélérée par la révolution technologique en cours. Il de s’agit donc plus du Luxembourg, de Malte, de Panama ou encore des Îles vierges, mais de l’Irlande qui capte les profits européens des GAFAM ! En réponse naît l’idée de grands pays européens (Allemagne, France, Italie et Espagne) de taxer directement les GAFAM abrités en Irlande. La guerre ! Ceci ne pouvait rester à son tour sans réponses, ni de l’Irlande, ni des GAFAM, ni des Etats-Unis. Avec le Président Trump, la.riposte est immédiate : les USA taxeront les multinationales européennes ! Avec Joe Biden la donne change, d’abord parce qu’il lui faut des ressources pour financer ses propres plans de modernisation, mais il ne peut laisser taxer sans réagir ses entreprises !

D’où l’idée d’un taux minimum mondial, qui toucherait, dans l’esprit américain, les 100 premières entreprises... mondiales. Un début ? Sauf si elles trouvent des parades. Les enjeux économiques sont non seulement de financer la reprise après le COVID-19, mais de réduire les fuites hors du système fiscal, qui lèse souvent les pays les plus fragiles d’abord et aussi les plus sociaux, les poussant à la dette.

Au sommet de ce G7, à quels rapports de force pouvons-nous nous attendre ? La voix des Etats-unis et de la Chine portera-t-elle plus dans le débat de la relance d’un monde après Covid ?

Le G7 Finance est donc une préparation des arguments et propositions du G7 des responsables politiques qui va suivre, avant le G20 où tout sera proposé... à tous. En matière fiscale, comme de climat, il faut faire pression sur les états et les entreprises, pour cette fiscalité minimale à 15% par exemple, mais sur les petits états qui ne seront pas présents, car trop petits, souvent opaques et bien défendus. Pas facile !

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Ce qui est nouveau, c’est que le virus a affaibli les pays à économie de marché qui pousseront ainsi à une fiscalité minimale mondiale. Le cas chinois n’est pas clair, faute de bien connaître ses règles comptables et fiscales. 

Au niveau mondial, un taux fiscal mondial minimal, AVEC des règles comptables et fiscales mondiales, notamment en matière de transparence, est évidemment positif, mais ne peut être immédiat.

Les ministres des sept pays les plus développés ainsi que les banquiers centraux repousseront peut-être les annonces formelles d’accords au G20 de juillet. Réel changement économique international ou simple retour au monde d’avant ?

La caractéristique de la situation d’ « avec-COVID-19 », qui est appelée à durer est cette forte dette des entreprises et des états, soutenus à bras le corps par les banques centrales. Or, les responsables des banques centrales savent qu’ils vont devoir acheter moins de bons de leurs trésors respectifs. Ceci s’annonce aux Etats-Unis, bientôt au Royaume-Uni, puis dans un ou deux ans en zone euro. La reprise va aider les finances des états, notamment du G7, mais rien ne sera résolu sans plus de ressources venant de la fiscalité des entreprises. 

En même temps que les banquiers centraux vont aider, sans oublier non plus certains acteurs de la société civile et politique, une révolution est en train de naître dans une population surprenante : les actionnaires. Voici des mois que l’on voit les actionnaires s’exprimer sur les responsabilités économiques, sociales et environnementales des entreprises. Ils veulent des engagements sur la décarbonation, sur les rapports de salaires entre hommes et femmes, sur les salaires des dirigeants, sur l’étique. Dans ce contexte, une entreprise qui fréquente les paradis fiscaux, évite en fait ses responsabilités sociales (même si les états ne sont pas des modèles de vertu et d’efficacité) leur plaira de moins en moins. 
Il ne s’agit pas, dans cette affaire, d’être naïfs. Le COVID-19, la concurrence Etats-Unis Chine, la digitalisation poussent à des crises financières des états. Ils s’endettent, buttent sur des limites, repoussées par les banques centrales, avec de nouvelles limites. Les états, Etats-Unis en tête, ne peuvent continuer comme avant. Ils viennent de le reconnaître, suivant Joe Biden. Les raisons de chacun sont multiples, tout ceci prendra du temps mais montre un réel changement, tout simplement parce qu’i n’est plus possible aux états, Etats-Unis en tête et sans doute aussi Chine, de vivre comme avant, en s’endettant. 

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