Fiac 2013 : comment le protectionnisme, le copinage et la fiscalité ont tué le marché de l'art en France<!-- --> | Atlantico.fr
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Speed Limit, François Curlet, 2012.
Speed Limit, François Curlet, 2012.
©Courtesy Galerie Micheline Szwajcer, Antwerp © ADAGP

L'Art en crise

Alors que se tient du 24 au 27 octobre la Foire internationale de l'Art contemporain au Grand Palais, le marché de l'art dans notre pays se meurt doucement. Tour d'horizon des raisons qui expliquent ce phénomène.

Philippe Herlin

Philippe Herlin

Philippe Herlin est chercheur en finance, chargé de cours au CNAM.

Il est l'auteur de L'or, un placement d'avenir (Eyrolles, 2012), de Repenser l'économie (Eyrolles, 2012) et de France, la faillite ? : Après la perte du AAA (Eyrolles 2012) et de La révolution du Bitcoin et des monnaies complémentaires : une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro ? chez Atlantico Editions.

Il tient le site www.philippeherlin.com

Voir la bio »

Le rapport annuel du marché de l’art contemporain publié par Artprice montre que la France demeure le 4ème marché mondial, certes, mais loin derrière le trio de tête. Les Etats-Unis représentent 33,72% du marché, à quasi égalité avec la Chine avec 33,70%, suivis du Royaume-Uni avec 21,10%. Puis arrivela France avec… 2,79%. On le voit, il y a surtout trois acteurs majeurs, puis des places secondaires (Allemagne, Suède, Qatar, Turquie, Taiwan) parmi lesquelles la France se classe en première position.

Pourtant il n’en a pas toujours été ainsi. Paris, qui fut dans la première moitié du XXe siècle la capitale mondiale des arts, a longtemps dominé le marché des ventes. En 1952, la plus grande maison parisienne de ventes aux enchères, Ader, réalisait à elle seule un chiffre d'affaires supérieur à celui de Sotheby's et Christie's réunies ! Mais, pour protéger son marché, les autorités ont fermé hermétiquement le marché français. Les deux maisons anglaises n’ont alors eu d’autres choix que de développer leurs implantations à travers le monde de façon à compenser la perte du marché français. Aujourd’hui, c’est ce réseau international qui fait leur force, qui fait de ces deux sociétés les leaders mondiaux incontestés du secteur, tandis qu’Ader a disparu corps et biens depuis longtemps.

Lorsque la gauche arrive au pouvoir en 1981, elle veut promouvoir la création contemporaine. Mais cela passe bien sûr par l’intervention publique, et c’est ainsi que sont créés les FRAC (Fonds régionaux d’art contemporain) et le FNAC (Fonds national d’art contemporain), qui dispose d’un budget équivalent à la totalité des fonds régionaux. Conséquence logique, pour un galeriste, il importe surtout d’avoir les bons contacts au sein de la sphère publique de façon à s’assurer un flux régulier de chiffre d‘affaires. La commande publique prédomine, et le copinage qui va avec, elle n’incite pas les galeries à rechercher les collectionneurs ou à se développer à l’international. Résultat, la cote des artistes français contemporains se situe en net retrait par rapports à leurs collègues des autres grands pays.

La hausse continue de la fiscalité représente aujourd’hui le danger majeur qui menace les derniers acteurs importants. Déjà l’année dernière, l’une des plus grandes galeries parisiennes, Jérôme de Noirmont, avait annoncé qu’il mettait la clé sous la porte, dénonçant une "pression fiscale étouffante". La semaine dernière, les acteurs du marché de l’art ont finalement réussi à obtenir l’annulation du relèvement de la taxe à l'importation des œuvres d'art de 7% à 10 %, et qui aurait marginalisé encore plus la place de Paris. Mais la "créativité fiscale", ou la demande récurrente de réintégrer les œuvres d’art dans le calcul de l’ISF, constituent des menaces permanentes qui dissuadent les investisseurs et éloignent les collectionneurs. Pour finalement tuer à petit feu le marché de l’art.

Heureusement, il reste à Paris ses grandes foires internationalement reconnues, comme la FIAC cette semaine, mais aussi la Biennale des Antiquaires, le Salon du dessin, Paris Photos, Paris Tableaux, etc. Mais attention, déjà le patron de la Biennale a menacé de tout arrêter, ulcéré par le fiscalisme incessant et le mépris du pouvoir (aucun ministre n’est venu honorer de sa présence ce qui est la plus grande foire internationale d’objets d’art). Ces grands événements internationaux constituent le dernier rempart, s’il cède la France sera définitivement marginalisée.

A lire de l'auteur de cet article : La révolution du Bitcoin et des monnaies complémentaires : une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro ?, Philippe Herlin (Atlantico Editions). Pour acheter ce livre, cliquez ici.


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