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Europe : les trois questions qui affolent les milieux d’affaires et auxquelles François Hollande ne répond pas...
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Atlantico Business

Cinq jours après la décision des Britanniques de quitter l'Union Européenne, l'inquiétude n'est pas retombée. Les milieux d'affaires sont plongés dans l'incertitude la plus totale et il n'y a rien de pire pour des investisseurs.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Tout le monde prend son temps et personne ne dit ce qu'il pense vraiment. François Hollande se limite à des intentions de réformes et des généralités qui laissent la porte ouverte à toutes les hypothèses les plus floues.

Moins d'une semaine après le vote des Britanniques qui ont donc décidé de quitter l'Union Européenne, l'incertitude la plus totale règne sur le calendrier et les modalités de ce divorce. Et il n'y a rien de pire pour des investisseurs et des hommes d'affaires que de travailler avec un horizon complètement bouché.

Les Etats-majors des grandes entreprises ou des grandes banques sont bien évidemment sur les dents parce que pour une entreprise, toutes les situations de crise méritent qu'on les étudie pour y répondre. Ce qu'ils ne peuvent pas faire parce que les pages sont blanches.

Les grandes entreprises et les grandes banques ont tous des questions mais n'ont pas de réponses. Plus grave, les membres de l'Union Européenne ne sont pas d'accord entre eux.

1e série de questions : Faut-il un divorce rapide ou un divorce qui dure longtemps ?

En Grande-Bretagne, au moment de la campagne et juste après les résultats, les militants les plus déterminés n'avaient aucune hésitation. Il fallait quitter l'Union Européenne très rapidement, quitter Bruxelles, quitter le parlement et engager très vite des négociations avec les partenaires. Quelques jours plus tard, le climat a changé. Au fur et à mesure que les Anglais découvrent, l'ampleur du chantier, les perspectives, ils déchantent et tergiversent. Bref, le plus tard possible sera le mieux. Certains imaginent déjà que les Anglais pourraient changer d'avis. Juridiquement ça serait gérable, mais politiquement c'est inacceptable. Ce désordre dans les programmations a créé un trouble violent sur les marchés.

Du côté des partenaires européens, on est aussi perdu. Beaucoup, dont la France, sont partisans d'un divorce ultra rapide. François Hollande serait de ceux là, du moins au niveau des intentions. Pas question de tolérer une période transitoire pendant laquelle la Grande Bretagne pourrait négocier tous les avantages possibles sans les obligations correspondantes. Une période qui va donner des idées aux autres pays et nous entraînerait dans une Europe chamboulée sans axe, ni boussole. Donc pour beaucoup il faut aller très vite.

Pour d'autres en revanche, il faut garder son calme et réfléchir, c'est la position allemande qui veut préserver les positions économiques pour la Grande Bretagne comme pour l'Allemagne.

Les hommes d'affaires n'ont aucun à priori. Ils veulent simplement savoir ce qui va se passer. A court terme ou à long terme, peu importe.

A paris, il semble que la gouvernance voulait aller très vite mais sur la question de Calais par exemple, Emmanuel Macron hier en visite dans le Nord a plutôt tempéré, ce qui a mis Xavier Bertrand en colère et l'a amené à dénoncer les contradictions qu'il pouvait y avoir avec l'Elysée.

2 série de questions : Quelles relations entre la Grande Bretagne libérée de l'Union Européenne et ses principaux partenaires ?

Du côté anglais, on espère un contrat proche de celui qui relie la Suisse à l'Union Européenne et bien que les demandes n'aient pas été formulées on comprend que la city de Londres voudra conserver ses activités de centre de compensation de l'euro et disposer du fameux passeport européen qui permet, à partir de la Grande Bretagne, de travailler sur la totalité du grand marché.

Pour les Européens, c'est difficilement acceptable si la Grande Bretagne ne respecte pas des engagements sur la libre circulation des hommes. Si la Grande Bretagne acceptait la libre circulation (ce qui paraît compliqué compte tenu de ses positions critiques à l'encontre de l'immigration en provenance de l'Union) mais si elle acceptait cette obligation en échange du fameux passeport, la Grande Bretagne se retrouverait dans la même situation qu'auparavant mais sans commissaires à Bruxelles, sans parlementaires à Strasbourg et sans place au conseil européen des chefs d'état ou des ministres. Ce qui, pour les partisans du Brexit serait pire qu'avant.

Reste la solution qui va consister à négocier avec chaque partenaire européen des accords bilatéraux. Ce qui va lui prendre un temps fou et va décourager les investisseurs et les banques de maintenir leur activité en GB. La Grande Bretagne attirait les investisseurs industriels et financiers parce que la Grande Bretagne leur permettait d'accéder automatiquement au grand marché.

Si le grand marché est fermé, ou si ce grand marché ne s'ouvre qu'au coup par coup, les investisseurs industriels ou financiers vont préférer se délocaliser sur le continent, aux Pays-Bas, en Allemagne ou en France. Sur tous ces points, le monde des affaires a besoin d'y voir clair.

La 3e série de questions porte sur le cadre politique de la réforme. Pour faire simple, les 27 pays membres de l'Union sont partagés entre ceux qui veulent plus d'Europe, et ceux qui veulent moins d'Europe.

Ceux qui veulent plus d'Europe plaident pour plus de fédéralisme, c'est-à-dire des transferts de souveraineté.

Ceux qui expliquent qu'il y a trop d'Europe ne se rendent pas compte que moins d'Europe c'est plus de libéralisme à l'anglaise.

Ce débat-là est très confus. Il n'est pas certain que tous ceux qui sont sensibles aux arguments extrémistes de Marine Le Pen ou de Jean-Luc Mélenchon se rendent très bien compte qu'ils font le lit d'une Europe des nations reliées entre elles par un grand marché libéral sans réglementation aucune et surtout sans projet.

Ce qui est certain en revanche c'est que les pro-européens se recrutent massivement en Allemagne, en France, en Italie, mais sont incapables de mettre en œuvre des transferts de souveraineté, parce que les politiques de la défense, de l'immigration, de la fiscalité, du budget, de la dette impliquent une autorité fédérale qui n'existe pas.

Alors dans l’opposition, François Fillon et Nicolas Sarkozy sont à peu près clairs sur cette évolution. Mais en dehors de ces deux programmes qui paradoxalement seraient parfaitement compatibles, il n'existe aucune offre politique originale et précise. La Gauche au pouvoir n'en a jamais parlé pendant le quinquennat alors que c'était dans le programme. Elle n'en a jamais parlé parce qu'elle est très divisée. Le centre reste dans des généralités bien pensantes. Et les partis extrêmes sont dans le populisme et la démagogie. Tout ce qui ne va pas dans ce pays est de la faute à l'euro, à l'Europe, à Bruxelles et à la BCE ... Changeons tout. Très bien mais complètement irresponsable à partir du moment ou il n'y a pas de plan B ou d'alternative.

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