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Apple pourrait révolutionner le domaine de l'intelligence artificielle dans les mois et les années à venir.
Apple pourrait révolutionner le domaine de l'intelligence artificielle dans les mois et les années à venir.
©Mladen ANTONOV / AFP

Intelligence artificielle

Discret depuis l’émergence des nouvelles intelligences artificielles génératives et face au succès de ChatGPT, Apple travaille actuellement sur la question de l'IA.

Gilles Dounès

Gilles Dounès

Gilles Dounès a été directeur de la rédaction du site MacPlus.net  jusqu’en mars 2015. Il intervient à présent régulièrement sur iWeek, l'émission consacrée à l’écosystème Apple sur OUATCH.tv, la chaîne TV dédiée à la High-Tech et aux loisirs.

Il est le co-auteur, avec Marc Geoffroy, de l'ouvrage iPod Backstage, les coulisses d’un succès mondial, paru en 2005 aux Editions Dunod.

Vous pouvez suivre Gilles Dounès sur Twitter : @gdounes

 

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Atlantico : Alors que tous les grands acteurs de la tech sont en train de se positionner sur les LLM, dans la suite de ChatGPT, Apple est relativement silencieuse sur le sujet. Pourquoi ?

Gilles Dounès : Tout le monde est en train de se positionner en effet, de façon explicite sur les LLM, en français les grands modèles de langage, c'est-à-dire des modèles d'intelligence artificielle qui reposent sur de grandes masses de données. Les algorithmes vont en extraire des données pertinentes en fonction des demandes de l'utilisateur, des résultats qui vont être restitués sous forme de texte à la demande, de synthèses à partir de contenu fourni par l'utilisateur, de traductions, et même d'images ou de lignes de code. Sans parler des Chatbots conversationnels que l'on connaît bien maintenant, puisqu'ils sont couramment utilisés sur des sites Web en tant que support client.

Microsoft a massivement investi dans Open AI, et a très largement intégré ChatGPT dans ses différents produits (Bing, Office 360, Outlook, Edge), et à la suite de leurs annonces tout un tas d'acteurs du secteur sont également sortis du placard : Google avec Bard et le succès qu'on connaît ; Meta (la maison-mère de Facebook) a annoncé un volte-face spectaculaire dans ses priorités stratégiques en plaçant l'intelligence artificielle au sommet de la pile, au détriment de son Métavers, avec un investissement de 12,5 milliards d'euros à la clé ; Adobe a annoncé Sensei, sa propre plate-forme de génération d'images en temps réel. Et même NVIDIA, qui fabrique des puces graphiques très utilisées dans ce type de calcul, a également publié 1 certain nombre de frameworks dédiés aux grands modèles de langage pour promouvoir sa plate-forme. Et encore, on ne parle que des acteurs occidentaux : un certain nombre d'industriels asiatiques ont également fait des annonces dans ce sens.

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Quant à savoir pourquoi Apple ne communique pas davantage sur le sujet, il y a à la fois des raisons structurelles, historiques, mais également conjoncturelles à cela. Structurelles, parce que historiquement Apple ne communique pas en amont sur les projets stratégiques qu'elle a planifiés, sauf à pousser ses concurrents s'engager dans un secteur encore neuf, et le laisser défricher le marché. C’est par exemple ce qui s'est produit avec les montres connectées, Tim Cook laissant échapper de façon plus ou moins ingénue son intérêt pour le concept encore vierge au détour d'une interview en 2012, et Samsung s'engouffrant immédiatement dans la brèche. Et depuis 2014 et le lancement de l'Apple Watch, Apple caracole toujours en tête des ventes du secteur avec jamais moins de 50 % de parts de marché. Dans le cas des LLM, tout le monde est déjà parti courir à fond de train derrière les annonces de ChatGPT, Apple peut continuer d'aller à son rythme.

De plus, d'une manière générale Apple sait pertinemment que l'attention médiatique est une denrée rare, et évite de multiplier les annonces de produits ou de familles de produits différentes pour éviter de brouiller son message. Or, si l'on en croit les rumeurs récurrentes, la firme de Cupertino s'apprête à frapper un grand coup avec sa propre interprétation de la réalité mixte/augmentée le 5 juin prochain lors de la WWDC. Hors de question dès lors de détourner soi-même l'attention de ce qui semble un projet stratégique, en multipliant des bavardages sur des produits ou des services qui ne sont pas prêts.

Enfin, l'approche d'Apple à propos de l'intelligence artificielle est différente de ce qui a été annoncé un peu partout, au point d'ailleurs de susciter du tirage parmi les équipes et même des départs de la société.

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Avec sa popularité et sa force de frappe actuelle, Apple n’aurait-il pas une possibilité de révolutionner la course à l’IA s’il s’y  lançait ?

C'est le sens d'un fil récent sur Twitter en début de semaine dernière, par @SullyOmarr un développeur assez suivi (plus de 27 000 followers) qui travaille par ailleurs sur un client Web d'automatisation de ChatGPT. Il est possible qu'il ait de l'intuition, ou encore qu'il bénéficie d'informations privilégiées de la part de connaissances qui travaillent dans le même champ que lui chez Apple, mais il semble assez confiant sur le fait que les puces Apple Silicon, le processeur M2 en particulier, soit suffisamment puissant pour faire tourner une version de grands modèles de langage en local, directement sur l'appareil de l'utilisateur, au lieu de faire remonter la requête sur de grands serveurs centralisés. Avec en particulier un levier démultiplié dans l'efficacité de Siri.

Mais il n'est pas le seul : c'est une rumeur qui qui revient régulièrement, depuis plusieurs mois, et le même jour que le tweet de Sully une enquête très fouillée deThe Information laissait au contraire flotter un sérieux doute sur les avancées d'Apple en matière d'intelligence artificielle LLM… pour des raisons identiques ! Parallèlement, Amazon a également annoncé vouloir utiliser l'intelligence artificielle et les grands modèles de langage pour doper les performances d'Alexa, sa propre interface de commande vocale.

Pourquoi les équipes d’Apple n’ont-ils pas (encore) de LLM/d’IA propre ? 

En ce qui concerne les grands modèles de langage, Apple vraisemblablement travaille dessus avec semble-t-il un certain nombre de difficultés, mais encore une fois, Apple a pour habitude de ne jamais communiquer lorsque l'annonce risque de parasiter le retentissement médiatique attendu pour une autre annonce produit, imminente celle-là, identifié comme stratégiques ou du moins très importante dans le portefeuille produit. Il est également possible que Apple ait choisi d'attendre la WWDC, sa conférence annuelle à destination des développeurs, pour commencer à dévoiler des annonces en ce sens au sein de ces différents systèmes d'exploitation. Le 5 juin n'est pas si loin.

Mais depuis l'iPhone 8 et la puce A11 Bionic et son neural Engine, Apple n'a cessé d'insérer de l'intelligence artificielle dans ses différents logiciels et systèmes d'exploitation, en s'appuyant sur des noyaux dédiés au sein même de ses systèmes sur puce Apple Silicon. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Sully se montre vraisemblablement si enthousiaste à propos du processeur M2, avec pas mal d'arguments pertinents d'ailleurs, Apple ayant montré depuis longtemps qu'elle savait coopérer avec le monde du logiciel Open Source à de nombreuses reprises, et lui renvoyer l'ascenseur.

A quoi pourrait ressembler une IA de type LLM pensée par et pour Apple ?

Mark Gurman a levé un coin du voile dans sa dernière livraison pour Bloomberg ce dimanche, en mentionnant pour l'année prochaine la possibilité d'un service supplémentaire de coaching destiné à son application de suivi de l'activité sportive et de motivation Apple Fitness+, avec le nom de code provisoire Quartz, et qui ferait l'objet d'une facturation supplémentaire.

Mais bien entendu, à terme, c'est l'ensemble des fonctions de recherche et des services d'Apple qui pourraient faire l'objet d'améliorations grâce à ses grands modèles de langage, qu'il s'agisse de recherche à l'intérieur des données stockées dans l'appareil, de la traduction et bien entendu du monitoring des applications de santé, au fur et à mesure où les fonctionnalités de l'Apple Watch sont amenées à se développer. Le même Mark Gurman parle en effet de mesures et de suivi de la pression artérielle, pas avant l'horizon 2025 cependant. Mais pour des raisons de sécurité et de confidentialité des données, il semble que pour l'essentiel le traitement et le calcul doivent s'effectuer en local, au sein même de l’appareil à partir duquel la demande est lancée. 

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